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land, les cinq autres données nous fournissent une moyenne de 4,42 hectolitres par hectare.

Les cultivateurs réfléchis, nous dit M. de Varnbühler, se règlent encore sur l'état de développement du grain : comme, pour l'épeautre, les écales produisent un effet sensible en augmentation de volume du grain, le semeur doit prendre les poignées d'autant plus fortes que le grain est plus gros, parce qu'il y a une plus forte proportion d'écales.

Il est d'usage d'employer moins de semence après la navette, davantage après la jachère, la plus forte proportion après le trèfle, dans le rapport, à peu près, de 6 à 7 et de 7 à 8.

Sur les sols qui ne sont pas particulièrement appropriés à l'épeautre, qui manquent de richesse et de cohésion, il est avantageux de semer du seigle en mélange avec l'épeautre ; la proportion ordinaire est de 175 de seigle sur 415 d'épeautre. Cependant il ne faut pas oublier que, dans un simri de seigle, il se trouve largement une fois plus de grains que dans un simri d'épeautre. Ainsi celui qui a coutume de semer six simri d'épeautre pur par morgen ne doit prendre, à la place de cette quantité, que cinq simri de mélange. Là où l'on prend 8 simri d'épeautre, il n'en faut prendre que 6 172 de mélange ainsi cinq parties d'épeautre et 1 172 de seigle. Je ne regarde pas comme admissible une plus forte addition de seigle, parce que le scigle, croissant plus vite et s'élevant plus haut, comprimerait trop facilement le développement de l'épeautre.

Ce mélange offre une plus grande sécurité que la semence pure, lorsque les circonstances ne sont pas favo

rables. Lorsque l'une des graines ne réussit pas, l'autre gagne plus d'espace et réussit ordinairement d'autant mieux. Ce mélange a aussi des avantages particuliers pour les sols qui se gercent facilement par la gelée. Par suite de cette remarque, l'usage s'est établi dans le Hundsruck, pays élevé entre la Moselle et la Nah, où domine la culture du seigle, d'ajouter à la semence de celui-ci un cinquième d'épeautre. On attribue aussi à ce mélange la propriété de garantir l'épeautre du charbon; du reste, la séparation de l'épeautre et du seigle après le battage est très-facile; et c'est une raison de préférer l'addition de l'épeautre à celle du froment, dont la séparation du seigle est extrêmement difficile, sinon impossible.

§. 8. Soins et façons.

Le hersage au printemps ne fait autant de bien à aucune céréale qu'à l'épeautre, particulièrement lorsqu'il est très-rempli de mauvaises herbes et, bien entendu, lorsqu'on procède au hersage comme si on voulait tout détruire; comme le commun des cultivateurs ne se défie de rien tant que de cette pratique, qu'on ne saurait trop lui recommander, il me sera permis de rapporter ici quelques-uns des exemples qui sont à ma connaissance et qui constatent ses bons effets.

M. Vacano, maître de poste à Simmern, trouva, au printemps de 1817, un de ses champs d'épeautre tellement infesté de mauvaises herbes, qu'il fut tenté de désespérer de la récolte; il eut l'idée de le faire herser, et cela avec la herse de fer. Le valet chargé de l'opération ne voulut consentir à la faire qu'après qu'on lui

eut assuré que le champ devait ensuite être labouré et semé d'orge, il agit en conséquence et fit fonctionner la herse dans l'intention de tout détruire. Quelques jours après, la pluie survint, et, quelques semaines plus tard, lorsque le même valet revit le champ d'épeautre, il fut tout étonné de le trouver superbe, et courut chercher son maître pour lui faire partager son admiration et le prier de n'y pas mettre la charrue. J'ai vu moi-même ce champ d'épeautre en été, il était réellement magnifique.

En 1818, la carie ayant détruit un seigle dans lequel on avait semé du trèfle, M. Hergen, propriétaire près Coblentz, attendit la fin de l'automne pour faire déchirer le trèfle à la herse, semer de l'épeautre et enfouir par un trait de charrue. Au printemps suivant, les feuilles de l'épeautre ne se montrèrent pas nombreuses ; cependant il fit passer la herse de fer, de manière à briser toutes les moltes de gazon et tous les grumeaux qui existaient encore, et cette opération, inusitée dans le pays, douna lieu à de vives discussions entre les cultivateurs, blåmant, pour la plupart, ce procédé; mais l'été arriva et donna un démenti aux critiques et un triomphe éclatant à l'emploi de la herse.

Quelque unanimes que soient les auteurs qui n'écrivent pas toujours ce qu'ils savent par expérience, pour assurer que l'épeautre n'est pas sujet à verser, c'est par expérience, c'est après une longue pratique dans la culture de cette céréale, que je suis malheureusement obligé de les contredire. Là, sans doute, où on ne donne à l'épeautre que ce qu'il lui faut pour vivre, il ne peut pas verser par réplétion, pas plus que le seigle

sur un sable aride; mais, sous de bonnes conditions, il ne verse pas plus rarement que le froment et l'orge. Le danger du versage est, au contraire, si particulier à l'épeautre, qu'il y a peu d'années dans lesquelles il n'y soit pas exposé, raison pour laquelle on l'effiole tous les ans. En 1823, à Hohenheim, un champ d'épeautre qui n'était pas extrêmement dru. mais venu dans un sol très-approprié, fut effiolé deux fois, et la première lorsque les tiges commençaient à se former en tubes, et cependant cela ne l'empêcha pas de verser. L'effiolage, comme moyen d'empêcher l'épeautre de verser, est si généralement répandu, qu'on dit en allemand dinkelen (épeautrer) pour efficler.

Suivant M. de Varnbühler, lorsque les plants d'épeautre se présentent trop drus au printemps, lorsqu'ils tallent fortement et affectent une couleur verte foncée, il faut effioler, si l'on ne veut pas être sûr de les voir verser. On fait ordinairement cette opération en avril et, au plus tard, au commencement de mai. Lorsque les tiges se sont formées en tubes, il faut que l'opération soit faite avec beaucoup de précaution. Le produit de l'effiolage est le premier fourrage vert pour les bêtes à cornes, et on doit le donner coupé avec de la paille de vesces ou d'avoine.

L'épeautre n'a pas de maladie qui lui soit propre ; le charbon ne l'atteint pas aussi souvent que le froment. Les grains charbonnés, d'une belle apparence extérieure, contiennent une poussière brune d'une odeur tellement fétide, que, lorsque plusieurs épis charbonnés sont voisins les uns des autres, on en est averti par cette odeur en passant près du champ.

S. 9. Récolte.

La maturité de l'épeautre arrive dans la première quinzaine d'août. On coupe dès que la paille a blanchi, même quand l'épi n'est pas encore complètement mùr. Comme les épis parfaitement mûrs s'égrènent facilement, on ne peut pas retarder la récolte, quand la maturité est suffisante. L'épeautre coupé achève de mûrir en javelles par l'influence de l'air, et le grain y gagne en qualité ; cependant l'épeautre germe aussi plus facilement que toute autre céréale sous l'influence d'une température humide.

On peut couper l'épeautre aussi bien à la faux qu'à la faucille. J'ai vu, par une température sèche et chaude, rentrer, le soir, de l'épeautre coupé le matin. Dans le Palatinat, on lie en gerbes et on rentre, à mesure qu'on a coupé. Seulement, lorsque les épis sont trop peu mûrs, ou lorsque la paille est mêlée de beaucoup d'herbes, on laisse mûrir et sécher pendant quelques jours avant de lier et de rentrer. Pour éviter la perte du grain, on fait bien de garnir les chariots de grandes toiles, précaution négligée dans beaucoup de localités, mais toujours observée dans le Palatinat. On peut battre l'épeautre aussitôt arrivé à la grange Il se conserve des années, étendu sur le plancher des greniers, même sur de bonnes aires, probablement parce que ses cosses le garantissent des avaries.

Quatre hommes peuvent battre en six jours le produit d'un hectare. Le battage ne fait que séparer de l'épi les grains avec leurs capsules, et c'est dans cet état que l'épeautre se vend; cependant quelques capsules se bri

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