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huit voyages, et il en a remporté plus de 3,000 dessins exécutés par un habile artiste. Jusqu'à présent, dans les Revues, dans son Dictionnaire d'architecture, dans son Compagnon, manuel de l'antiquaire voyageur, M. Parker n'a donné que des lambeaux de l'immense et magnifique ouvrage qu'il doit publier, mais dont il diffère encore la publication pour le rendre aussi complet que possible.

La parole est ensuite donnée à M. Dugast-Matifeux pour répondre à la vingt-huitième question dont suit le texte : Historique de la littérature à Nantes et dans le pays

nantais.

Sans doute, pour faire une histoire complète de la littérature à Nantes et dans le pays nantais, il faudrait parler d'Abeilard. Mais de l'illustre disciple de Guillaume de Champeaux au XV. siècle, il y a un intervalle de plus de trois siècles où l'on ne trouve pas trace de littérature locale. Ce motif a déterminé M. Dugast-Matifeux à commencer son mémoire avec Meschinot, sieur des Mortiers. Ce poète, cité par Rabelais, a composé, entre autres ouvrages, un poème intitulé: Les Lunettes des princes, d'où M. DugastMatifeux a extrait bon nombre de sentences qui sont déparées, comme en convient son panégyriste lui-même, par un trop grand nombre de passages burlesques. Meschinot, pour préparer les princes à bien gouverner, voudrait les préserver de l'erreur; or, pour qu'ils aperçoivent toujours la vérité, il leur propose l'usage de lunettes dont les verres sont: prudence, justice, force et sagesse.

M. Dugast pense que Michel Colombe a emprunté cette pensée au poète Meschinot, et que les quatre grandes figures qui encadrent le mausolée de François II, sont la reproduction des verres symboliques des Lunettes des princes. Après la mort de Meschinot, dont M. Dugast fait un grand

éloge, pendant un certain temps encore, les littérateurs font défaut à la ville de Nantes. Aussi, en 1532, époque où François Ier. vint à Nantes, lors de ce voyage politique qui avait pour principal but d'assurer la réunion de la Bretagne à la France, les Nantais, qui voulaient donner un divertissement au roi et lui faire débiter de beaux vers par de belles dames apostées aux principaux carrefours de la ville, les Nantais eurent-ils recours, dans leur embarras, à Jean Bouchet , procureur de Poitiers. Malgré l'invitation pressante qui lui était adressée, Bouchet ne vint pas; mais il envoya les poésies qui furent débitées au roi de France. Jean Bouchet s'était déjà fait avantageusement connaître, lors de la réception, à Poitiers, de François I., par les poésies qu'il avait composées à cette occasion.

De Meschinot aux écrivains du XVII. siècle, M. DugastMatifeux, ne jugeant pas qu'il y ait d'auteur digne d'être cité, arrive de suite à parler du Commerce honorable, ouvrage anonyme qui produisit alors une grande sensation. Cet ouvrage, dédié au maréchal de La Meilleraye, était l'oeuvre du carme Matthias de St.-Jean.

Ce livre intéressant est divisé en trois parties. Dans la première, l'auteur considère l'état du commerce à l'époque où il écrit, et, le voyant presque anéanti, il recherche les causes de cet abandon et en montre les tristes conséquences. Dans la seconde partie, Matthias de St.-Jean traite de la dignité et de l'utilité du commerce. Il fait l'histoire du commerce chez les peuples de l'antiquité, et s'efforce d'en ramener le goût parmi ses contemporains. Il le montre enfin comme un agent de la civilisation chrétienne, comme un puissant moyen de porter les lumières de la foi chez les peuples qui en sont privés. Dans la troisième partie, pour assurer le résultat qu'il poursuit, le rétablissement du commerce, l'auteur propose d'établir des bourses de négoce, sorte d'association du capital et du talent: c'est l'établisse

ment du crédit, la création des banques. Le moine donne une foule de citations de la Bible, pour prouver que l'association multiplie les forces, et il a soin de rappeler que l'art. 461 de la Coutume de Bretagne déclare que le négoce n'implique pas la roture, encourageant ainsi la noblesse à se mêler des affaires du commerce.

Après la lecture de M. Dugast-Matifeux, M. de Wismes demande la parole et, tout en rendant hommage au travail intéressant qu'il vient d'entendre, il croit que M. Dugast n'a pas rempli le cadre du programme; dans son mémoire, il n'aperçoit que deux monographies: celle de Meschinot et celle de l'auteur du Commerce honorable.

M. de Wismes ne peut pas non plus partager l'avis de M. Dugast-Matifeux sur l'intérêt que présente la lecture des œuvres de Meschinot. Plusieurs fois il l'a commencée sans pouvoir la poursuivre. Quoi qu'il en soit, il lui préfère de beaucoup les intéressantes chroniques que nous a transmises Alain Bouchard dont le manoir se voit encore auprès du bourg de Batz. M. de Wismes s'étonne aussi que M. Dugast n'ait pas placé entre Meschinot et Matthias de St.-Jean les noms de Pierre Biré, d'Hugues de Gation, du P. Lebossu, de Nicolas de Montreuil et de cette foule d'écrivains qui surgissent de Nantes, sous l'influence du duc de Mercœur, de 1589 à 1594.-M. de Wismes apprend au Congrès qu'il possède un livre d'heures, imprimé à Nantes, en 1599, avec des caractères gothiques; c'est une preuve, ajoute-t-il, que les caractères ordinaires étaient encore peu répandus en Bretagne.

Comme l'heure est avancée, M. le Président déclare la séance close, en invitant M. Dugast-Matifeux à reprendre, dans une prochaine réunion, la lecture de son travail sur la littérature nantaise.

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Le Secrétaire,

C. VERGER.

Séance du 15 juin.

Présidence de M. le vicomte DE KERSABIEC.

La séance est ouverte à 7 heures 1/2 du matin. Siégent au bureau MM. de Caumont, Nau, Gaugain. M. Martineau remplit les fonctions de secrétaire.

Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté à l'unanimité, après la rectification d'erreurs matérielles, relevées par MM. l'abbé Jubineau et Lallemand.

M. de Caumont propose d'ajouter au programme la question suivante :

Existe-t-il, dans les chartes et les monuments écrits de la Bretagne, quelques documents concernant l'état de l'agriculture, les modes d'exploitation et les procédés de culture au moyen-âge ou dans les derniers siècles?

Il rappelle que cette question a reçu, pour la Normandie, la solution la plus remarquable dans l'ouvrage, couronné par l'Institut, de M. Léopold Delisle. On trouverait, dans les manuscrits ayant appartenu aux anciennes abbayes, des plans ou tous autres travaux de cette nature qui serviraient de point de départ pour l'étude de cette question intéres

sante.

M. Bizeul a lu, dans des baux du XVI. siècle, que les preneurs étaient tenus d'aller chercher, dans les environs de Pontpéan, près de Rennes, un sable blanc de nature calcaire, destiné aux amendements du sol.

M. Nau dépose sur le bureau un mémoire, de M. Ragueneau: Sur une motte féodale située à Montfaucon ( Maineet-Loire).

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M. de La Borderie a la parole pour répondre à la neuvième question du programme, ainsi conçue:

Quelles étaient les principales seigneuries de la Bretagne, du Poitou et de l'Anjou? En indiquer l'étendue et les prérogatives; présenter au Congrès la carte féodale de ces trois provinces ou de l'une d'elles.

M. de La Borderie soumet au Congrès la carte féodale de la Bretagne, et en appuie l'explication des considérations suivantes:

Deux époques doivent être remarquées dans la constitution géographique de la Bretagne au moyen-âge. La première, qui correspond à la division par paroisses ou machtyernats, remonte à l'émigration des peuplades bretonnes en Armorique, à la suite des invasions anglo-saxonnes. Elle a pour origine la constitution du clan breton sur le sol armoricain. Elle s'étend jusqu'au X. siècle, époque où les invasions normandes ayant fait refluer les peuplades armoricaines dans la France proprement dite, ces dernières rapportèrent avec elles quelque chose de la constitution de la féodalité française.

Dans la seconde période, qui commence avec Alain BarbeTorte, apparaissent les grandes divisions de la Bretagne féodale, copiées sur celles de la période précédente, si ce n'est que deux principautés importantes se trouvent alors annexées à l'ancienne Armorique : les comtés de Rennes et de Nantes. Les principautés, dont M. de La Borderie indique la situation d'une manière sommaire, sont: le comté de Cornouailles, le comté de Léon, le comté de Tréguier, le comté de Vannes, le comté de Nantes, le comté de Rennes, dont dépendait la baronnie de Chateaubriant, et dont une partie, détachée plus tard, formera l'apanage de Penthièvre.

Après une résistance commencée avec Alain Barbe-Torte,

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