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Nantes, ait été l'église de St.-Similien. Et le fait historique cité par lui, ne serait concluant pour la séparation du clergé à Nantes en églises paroissiales urbaines, que par sa date, qui est rapprochée de celle où une semblable séparation s'est faite dans plusieurs églises de la chrétienté.

Il termine en disant qu'il est bien difficile que quelques documents certains et authentiques sur l'établissement des paroisses soit urbaines, soit rurales, dans les siècles antérieurs, aient pu échapper à la double invasion des Francs et des Normands aux V. et IX. siècles, et aux préventions qu'avaient pour toute autre origine les moines et les écrivains bretons, quand, après les victoires des princes bretons et le rétablissement du duché ou royaume de Bretagne-Armorique, les églises et leurs archives commencèrent à se reconstituer.

L'Assemblée remercie M. Lallemand pour cet exposé, si plein d'intérêt et d'érudition.

M. l'abbé Jubineau, inscrit pour traiter la question relative à saint Clair et à l'introduction du christianisme dans le pays nantais, est invité à prendre la parole; il s'excuse en disant que, n'ayant pas été prévenu, il n'a point apporté son manuscrit. Cette lecture est remise à une prochaine séance.

M. l'abbé Cahour s'excuse pour le même motif de ne pas donner connaissance de son travail sur saint Émilien, évêque de Nantes, vénéré comme martyr à Autun.

M. Bizcul (de Blain), en l'absence de M. de La Borderie, demande que la question n°. 6, qui est à l'ordre du jour, soit remise au lendemain. Cette motion est adoptée.

M. de Caumont annonce à l'Assemblée que la séance du soir (7 heures), est consacrée aux assises scientifiques de l'Institut des provinces; il engage MM. les membres du Congrès à y assister.

M. Audé, président, annonce qu'il a une demande à faire à

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MM. les archéologues bretons. Il raconte qu'il y a quelques années, se trouvant à St.-Gilles (Vendée), on lui signala une tour qu'au premier abord il considéra comme un vieux moulin à vent, mais qu'après un examen sérieux, il crut reconnaître pour une construction plus digne d'intérêt. Bientôt une autre tour fut observée, non loin de là, à St.-Gervais, par M. de Sourdeval, tout près d'un gisement considérable de débris romains. Trois autres tours, dont deux mieux conservées, et dont les murs avaient encore des traces évidentes de l'appareil réticulé, portèrent à cinq le nombre de ces constructions. Bien que M. le Curé de St.-Gervais, tranchant la question, prétende que ce ne sont que de vieux moulins à vent, M. Audé pense que la disposition de ces monuments, tous placés sur des lieux élevés et dans une direction parallèle au bord de la mer, mérite un nouvel examen ; il demande à MM. les archéologues bretons s'ils ont observé quelque chose de semblable en Bretagne.

M. Bizeul, répond qu'il n'a rien vu de semblable en Bretagne. M. Le Bastard de Mesmeur fait la même déclaration, pour ce qui est du Finistère, qu'il habite.

M. de Caumont ajoute que, pour sa part, il n'a jamais eu connaissance de pareilles constructions, et qu'il serait en effet bon de les étudier. Il demande qu'on en fasse, s'il est possible, des dessins qui pourraient être examinés avec fruit au Congrès de La Rochelle.

M. de La Tour-du-Pin, à propos de la tour St.-Gervais, qu'il connaît et dont on semble nier l'origine romaine, fait observer que les environs sont couverts de briques et de débris romains, et que, dans l'intérieur même de cette tour, on a trouvé de fort belles médailles, les unes d'or, les autres d'argent et de cuivre, aux effigies d'Auguste, de Domitien et d'autres empereurs dont il ne se rappelle pas les noms en ce moment. Tout semble prouver que St.-Gervais a été un

établissement considérable, et que toute cette côte, du reste, a été très-fréquentée.

L'incident étant vidé, M. l'abbé Rousteau a la parole pour lire un mémoire sur la cathédrale de Nantes.

Après un début où l'auteur célèbre les pieuses et poétiques inspirations de l'art au moyen-âge, dans nos églises surtout, il annonce que son intention n'est pas de faire l'historique de la cathédrale de Nantes, mais seulement de conduire ses auditeurs autour du portique et de rechercher, avec eux, les différents sujets que le tailleur d'images a représentés sur les voussures des portails et sur les piliers du vestibule intérieur. Souvent, hélas! il n'aura qu'une inscription pour indice; d'autres fois cette inscription même aura disparu sous le marteau démolisseur! Quoi qu'il en soit, grâce à M. l'abbé Rousteau, l'auditoire parcourt facilement toute l'histoire de l'Ancien-Testament gravée à l'extérieur, à partir du premier pilier du portail Nord de la façade principale pour se continuer sur les soubassements des trois portails, puis sur tous les piliers du vestibule intérieur, et sortir de nouveau pour sc suspendre aux voussures des portes, où nous voyons se dérouler les histoires du Nouveau-Testament les anges, les démons, les joies du ciel, les peines de l'enfer, les prédications des saints apôtres Pierre et Paul et la vie allégorique de saint Christophe. Chaque sujet est accompagné, nous l'avons dit déjà, d'une légende explicative dont le style, piquant dans sa naïveté, éveille l'attention, et ôte à cette nomenclature ce que sa longueur même aurait pu avoir de monotone, car nous avons plus de cent bas-reliefs. Le portail du Sud nous offre toute la légende de saint Yves; celui du Nord, l'histoire des glorieux enfants nantais, les saints Donatien et Rogatien, histoire un peu allongée cependant par l'artiste, sans doute inspiré par quelque mystère de l'époque tout plein de détails perdus pour nous. Le grand tableau de pierre du

milieu nous représente pieusement la vision miraculeuse qui mit en fuite les troupes de Chillon. Ce travail, plein du plus vif intérêt et qui sera publié en entier dans le Bulletin de la Société française, est terminé par quelques mots bien sentis qui soulèvent d'unanimes et chaleureux applaudissements. La séance est levée à 5 heures.

Le Secrétaire,

Vicomte DE KERSABIEC.

1o. Séance du 13 juin.

Présidence de M. LEVOT, membre de l'Institut des provinces, à Brest.

Sont présents au bureau MM. G. Demangeat, de Cornulier, Cahour, de La Fruglaye, de Keranflech, l'abbé Le Petit, de Caumont, Gaugain et Nau.

M. Blanchard-Mervau remplit les fonctions de secrétaire.

M. l'abbé Cahour a la parole pour lire un mémoire sur saint Émilien, mémoire habilement rédigé, dont les idées principales peuvent être résumées en quelques mois :

Au rapport d'anciennes légendes du diocèse d'Autun, saint Émilien fut nommé évêque de Nantes, vers l'époque de l'invasion de la France par les Sarrazins. Les farouches conquérants s'étaient avancés jusqu'au sein de la Bourgogne; Émilien, alarmé des dangers que courait la chrétienté, réunit ses diocésains dans la cathédrale, prêcha une croisade, et partit à la tête d'un certain nombre de guerriers nantais, auxquels il avait donné la communion avant de quitter la ville épiscopale. Reçu avec joie par les Autunois, qui le regardaient comme un libérateur, il courut sus à l'ennemi.

Dans deux premières rencontres, les armes bretonnes

furent victorieuses; mais bientôt les Sarrazins accoururent en foule de Châlon-sur-Saône et une dernière bataille fut livrée à quelques lieues d'Autun, dans les champs de St.Jean-de-Leuzy, connus aujourd'hui sous le nom de St.-Émiland ou St.-Miland. Après des prodiges de valeur, Émilien, accablé sous le nombre, fut tué dans la mêlée avec ses généreux compagnons. Il fut inhumé sur le champ de bataille, et son tombeau, honoré par la piété et la reconnaissance des Autunois, devint l'objet de pélerinages qui ont subsisté jusqu'à nos jours.

Telle est l'histoire de saint Émiland ou saint Émilien : son nom n'est pas inscrit sur les catalogues des évêques de Nantes; mais ces catalogues, qui ont une origine récente, sont incomplets.

D'ailleurs, ils sont suppléés par les autorités nombreuses que le mémoire invoque. Ce sont : Dom Chifflet, qui avait préparé une Vie du saint en s'appuyant sur des documents malheureusement perdus; les Bollandistes, qui offrent sur la question un discours critique du plus haut intérêt; l'abbé Travers, qui affirme l'existence de saint Émiland dans son Histoire des évêques de Nantes; Dom Mabillon, qui visita le tombeau du saint au XVII. siècle et qui se livra à une enquête pour en établir l'authenticité; Dom Taillandier, l'abbé Tresvaux et quelques autres savants contemporains. Ces autorités sont corroborées par quelques documents écrits, savoir un office du saint mis en musique, en 1612, par un chantre de la cathédrale d'Autun; une légende insérée dans le même office, légende extraite d'un vieux manuscrit conservé autrefois dans l'église de St.-Émiland; une Vie du saint évêque breton écrite en français, en 1607, et dont le style, peu élégant, révèle l'antiquité du texte latin que l'auteur voulut traduire servilement.

Enfin, le mémoire signale le tombeau de saint Émilien,

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