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MM. les membres du Congrès, après avoir visité avec intérêt les divers points de vue du monument, dans la chapelle de la Vierge, un vitrail de M. Ledoux, puis les fragments de ceux de l'ancienne église, accordent des éloges mérités aux peintures de M. Delaunaye, à l'autel St.-Joseph, et montent à la tribune provisoire de l'orgue. L'effet est trouvé saisissant; il diffère essentiellement de celui du bas de la nef, mais ne lui cède en rien. L'impression qu'il produit est digne de celle qui s'empare de l'âme à la vue des plus beaux édifices du moyen-âge. M. de Caumont se rappelle avec plaisir le chœur de la cathédrale de Chartres.

Le triforium ensuite, enfin les terrasses des bas-côtés, attirent également l'attention des membres du Congrès.

Les quatre-vingt-deux marches du petit escalier tournant n'arrêtent personne dans l'élan qui entraîne tout le monde sur la tour actuellement arrêtée au milieu de l'étage du beffroi.

Après quelques instants consacrés à l'étude de la flèche du transept, en partie recouverte de tapis nécessaires pour garantir la dorure inachevée des anges qui doivent la décorer, tous les regards se dirigent naturellement sur le triste spectacle qu'offre la vallée de la Loire entièrement inondée.

Alors, M. l'abbé Fournier invite MM. les membres du Congrès à venir voir à la cure le projet de la grande tour.

Indépendamment du reste de l'église, remarquable par la pureté de l'arc ogival autant que par la légèreté de ses voûtes pénétrées de fenêtres géminées du style le plus pur, cette tour est déclarée devoir constituer, à elle seule, un monument imposant pour sa hauteur, sa hardiesse et ses formes élancées.

Cette magnifique étude de M. Lassus reçoit tous les suffrages et occupe les derniers instants de la réunion de ce jour.

Avant de se séparer, le Congrès félicite M. l'abbé Fournier de son zèle, de son goût et de son dévouement si éprouvé ; il émet le vœu que le Conseil municipal de Nantes et l'État lui facilitent les moyens de terminer cette belle œuvre, et de continuer le plus tôt possible la tour qui doit en être le

couronnement.

1re. Séance du 11 juin.

Présidence de M. BIZEUL, membre de l'Institut des provinces.

Siégent au bureau MM. de La Fruglaye, de Caumont, l'abbé Jubineau, comte O. de Sesmaisons, Th. Nau, Louis Gaugain, l'abbé Le Petit.

M. A. d'Izarn est invité à remplir les fonctions de secrétaire.

BertrandOn remarque dans la salle: MM. de Glanville, Geslin, Demangeat, H. de Bouteiller, Vandier, de La Bassotière, de Lustrac, l'abbé Hillereau, Parenteau, P. de Cornulier, Audé, de Kergos, Martineau, Thibault, docteurmédecin; Leray, docteur-médecin; Liberge, Le Bastard de Mesmeur, de Kersabiec, Lallemand, Blanchard-Merveau.

M. Phelippes-Beaulieu, de la Société académique de Nantes, fait hommage au Congrès :

1°. D'un mémoire sur les fouilles faites en 1852, 53, 54, dans le champ des Bésirais, commune de Sautron ( LoireInférieure).

2o. D'une monographie de la chapelle et du prieuré de Bois-Garand, en Sautron.

L'ordre du jour appelle la première question du programme ainsi conçue :

Examen des systèmes émis jusqu'à ce jour sur l'origine et la destination des monuments dits celtiques.

La parole est donnée à M. de Keranflech, inscrit sur cette question :

Ce travail plein de recherches, traité avec une scrupuleuse exactitude, présente une statistique des monuments de Carnac et des environs, dans le Morbihan, appuyée de plans et de dessins très-exacts et très-complets. L'Assemblée y prête une religieuse attention. Nous ne saurions donner trop d'éloges à cette communication riche de documents, capable d'amener sur cette question, si controversée, des conclusions que la modestie de l'auteur se refuse jusqu'ici à produire d'une manière absolue.

M. de Keranflech termine ainsi :

« Les différents systèmes émis jusqu'à ce jour par les savants qui se sont occupés des monuments antérieurs à l'époque romaine, sont tellement contradictoires qu'il est impossible de les considérer comme sérieux.

« Le moyen le plus sûr d'arriver à la vérité, est de s'en tenir aux déductions que l'on peut tirer des faits constatés par une observation consciencieuse des monuments connus en Bretagne sous le nom de grottes druidiques ou celtiques, d'allées couvertes, de coffres de pierre, de kist-veans, de lichavens, ou porticelles, et des objets qu'on y a décou

veris.

« Ces objets sont des armes, des ornements, des vases et des détritus, dans lesquels on a constaté la présence de substances prouvant qu'ils contiennent des débris de matières animales.

« Il résulte de l'examen des constructions grossières, dites celtiques, qu'elles ne sont toutes que les débris d'un même monument, que l'on peut décrire ainsi : une cavité, de forme variable, ayant son entrée constamment

tournée vers l'horizon compris entre le Sud et l'Est, formée tantôt de gros blocs de pierres superposés, tantôt de maçonnerie en pierres sèches; le tout enfoui sous un monticule artificiel de terre, de vases ou de pierres. Ce sont évidemment des tombeaux. Tout ce qu'on y a trouvé dénote une ignorance presque complète des procédés de l'industrie les plus anciennement connus, des tours à potiers, des procédés métallurgiques à l'aide desquels on extrait le cuivre et le fer. L'orseul, métal que l'on trouve à l'état natif, s'y rencontre parfois.

«Les pierres, dites druidiques ou des tombeaux, n'étaient pas des autels, mais des piliers, auxquels on portait des offrandes et qu'on adorait. Les canons des conciles d'Arles (472), de Tours (567), de Nantes (678), les capitulaires de Charlemagne, et les réglements faits, en 967, par Edgar, roi des Anglo-Saxons, pour défendre les pratiques superstitieuses, qu'on regarde généralement comme les restes du culte druidique, ne peuvent pas être appliqués aux monuments en question.

« Si ces monuments n'appartiennent pas à la civilisation des peuples que les Romains trouvèrent dans la Gaule, à quelle époque faut-il les rapporter?

<< La solution de ce problême offre des difficultés qu'il sera sans doute bien difficile de surmonter. Tous les efforts faits jusqu'à présent par les historiens les plus célèbres, pour dissiper les ténèbres qui enveloppent les premiers âges de l'ouest de l'Europe n'ont pas réussi à déterminer l'époque à laquelle eurent lieu les différentes invasions qui la peuplèrent. On sait seulement qu'au premier siècle avant notre ère elle était occupée par des Galls ou Celtes, des Kymris et les Ligures ou Aquitains. Tous les auteurs sérieux ont admis que les deux premiers peuples appartenaient à la même race, venue du centre de l'Asie. Le Huerou a pensé que les Ligures étaient d'une origine différente.

« Quoi qu'il en soit, l'observation impartiale des monuments ne permet pas de les attribuer à une époque plus récente que celle à laquelle la Gaule fut peuplée pour la première fois. Jusqu'à ce que l'on ait retrouvé le nom de cette antique race, il conviendrait donc de les désigner par la seule qualification de monuments de l'ère primitive, et de chercher ailleurs les restes des constructions élevées par les Celtes, Galls, Kymris ou Ligures, connus des Grecs et des Romains. >> M. Duchatellier adresse à M. le Directeur la note sui

vante :

J'aurais bien voulu mettre sous les yeux du Congrès les faits nombreux que j'avais recueillis sur les tumulus et les dolmens de la Bretagne ; mais les dessins des monuments que j'avais observés demanderaient des développements que je ne saurais donner, dans une courte notice. Quelques membres du Congrès de Nantes se rappelleront cependant, peut-être, que tous les faits tendent à prouver que, dans le principe, tous les dolmens (probablement sans exception) n'ont été que des sépultures que le temps et les hommes ont mises à découvert et fait regarder, contrairement à la vérité, comme des autels ou des lieux de sacrifice.

« J'essaierai quelques nouvelles fouilles dans les tumulus que j'ai sous les mains, et je ne doute pas, si la Société française ou le Congrès y attache quelqu'intérêt, qu'il ne soit facile d'acquérir quelques données nouvelles tant sur ces monuments que sur celui de Keléern, encore non décrit, et que j'avais signalé dans le temps à l'un des congrès bretons, à celui de Morlaix, je crois. >>

M. Lallemand demande à prouver, dans une prochaine séance, que ces monuments sont dus aux Celtes, qu'il regarde comme les premiers habitants de l'Armorique.

M. Thibaud fait quelques observations sur le même sujet :

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