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que les compensations demandées portaient sur une plus grande liberté dans les affaires de l'Eglise.

NAPLES. - Une retraite donnée aux détenus de Castel Capuano a produit les plus heureux effets: 393 prisonniers ont reçu la sainte Communion des mains de S. E. le Cardinal Archevêque.

ANGLETERRE. Plus de 1500 ecclésiastiques puséistes ont dirigé à leurs Evêques des adresses où ils réclament contre le jugement du banc de la reine dans l'affaire d'Exeter un grand nombre d'autres pièces dans le même sens circulent et se couvrent de signatures.

PRUSSE.

Bulletin de la politique étrangère.

On écrit de Berlin, à la date du 11 mai:

« Le régiment des gardes (Alexandre) a fêté hier à Spandau l'anniversaire du rétablissement de l'ordre à Dresde.

« Le Roi, qui avait envoyé 400 thalers à chaque bataillon pour les frais du banquet, a daigné s'asseoir à la table de ses soldats et a porté la santé des troupes prussiennes et saxonnes qui ont sauvé la capitale de la Saxe des fureurs révolutionnaires.

S. M., en s'adressant aux officiers, s'est exprimée en ces termes : « Messieurs, ce n'est pas pour vous parler de votre mérite que je suis aujour‹ d'hui parmi vous; votre conduite à Dresde ayant été au-dessus de tout éloge, « il n'y a pas un homme d'honneur qui ne le reconnaisse. Je suis ici pour vous « féliciter à l'occasion de ce glorieux anniversaire et pour vous assurer qu'en tout temps je compterai sur vous comme on compte sur un ami dévoué. ›

« Le Roi, en portant ensuite la santé de ses soldats, leur a dit:

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Mes chers enfants, j'ai éprouvé le besoin de vous voir ce même jour où l'an◄née passée vous avez couvert le nom de votre régiment d'une gloire que désormais rien ne fera oublier. Chacun de vous qui a combattu à Dresde a pleine«ment rempli son devoir. Votre conduite, en vous méritant l'affection et l'estime « de tous les gens de bien et celles des braves de toutes les nations, vous a voués à l'exécration de tous les révolutionnaires. C'est le sort des gens d'honneur, ⚫ continuez ainsi. Quand l'occasion s'en présentera, je compterai sur vous, convaincu que vous remplirez votre devoir comme vous l'avez rempli en Saxe. La • cause qui pourrait vous faire marcher sera la bonne cause; je m'en porte ga«rant; fiez-vous à moi. ›

« Ces paroles ont fait éclater parmi tous les auditeurs les manifestations du plus vif enthousiasme. »

AUTRICHE. Le Corriere italiano de Vienne annonce que l'Autriche remet son armée sur le pied de guerre.

-On dit que les souverains de l'Union enverront des plénipotentiaires au Congrès de Francfort, mais seulement pour protester contre sa convocation par l'Autriche, pour annoncer officiellement la formation de l'Union, au nom de laquelle la Prusse, possédant toutes les voix des Etats qui la composent, prendra part à la révision de l'acte fédéral. On ajoute que M. de Radowitz est nommé dans ce but plénipotentiaire de la Prusse.

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ESPAGNE. L'infant D. Francisco de Paula, père du Roi, est arrivé le 10 à Madrid. Il a reçu le soir les ministres et les personnes les plus considérables de la capitale.

ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE.

Séance du 16 mai.-PRÉSIDENCE DE M. LE GÉNÉRAL Bedeau, vice-prĚSIDENT. L'ordre du jour appelle les interpellations sur les affaires de Grèce.

M. LE PRÉSIDENT. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. LE GÉNÉRAL DE LAHitte, ministre des affaires étrangères. Messieurs, dans la séance de samedi dernier, j'ai eu l'honneur d'annoncer à l'Assemblée qu'à la nouvelle fâcheuse et inattendue de l'insuccès de nos bons offices dans les négociations suivies à Athènes, le gouvernement de la République avait cru de son devoir de demander des explications au gouvernement anglais. La réponse qui nous a été faite ne se trouvant pas telle que nous avions le droit de l'attendre d'après les bons rapports qui existaient entre les deux pays, le président de la République, après avoir pris l'avis de son conseil, m'a donné l'ordre de rappeler de Londres notre ambassadeur. (Triple salve d'applaudissements.-Mouvement prolongé. Nous remarquons que la Montagne, qui avait d'abord aussi applaudi, cesse d'applaudir sur les recommandations de quelques meneurs.) Pour faire connaître à l'Assemblée les motifs qui ont déterminé le gouvernement à prendre cette décision, je ne puis mieux faire que de vous donner lecture de la lettre que j'ai adressée à M. Drouin de Lhuys à ce sujet. (Mouvement d'attention.)

A M. Drouin de Lhuys, ambassadeur à Londres.

<< Monsieur,

« Paris, 14 mai 1850.

<< Comme j'avais l'honneur de vous l'annoncer hier, le conseil à délibéré sur la réponse du cabinet de Londres à la demande que vous aviez été chargé de lui transmettre. Mes précédentes dépêches vous auront fait pressentir la résolution du gouvernement de la République. La France, dans un esprit de bienveillance et de paix, s'était décidée à interposer ses bons offices dans le but de terminer à des conditions honorables le différend qui s'était élevé entre la Grande-Bretagne et la Grèce.

<< Il avait été convenu que les mesures coërcitives déjà mises en usage par l'Angleterre seraient suspendues pendant la durée de la médiation, et que si un arrangement jugé acceptable par le médiateur français était repoussé par le négociateur britannique, ce dernier devrait en référer à Londres avant de recourir de nouveau à l'emploi de la force. Nous avions reçu sur ce dernier point les promesses les plus formelles; elles n'ont pas été tenues.

« Il en est résulté cette déplorable conséquence qu'au moment même où un projet de convention, négocié directement et définitivement arrêté entre les cabinets de Paris et de Londres était sur le point d'arriver à Athènes, où déjà les bases essentielles en étaient connues, la Grèce, attaquée de nouveau par les forces navales britanniques, malgré les vives représentations de l'envoyé français, a dû, pour échapper à une ruine complète, accepter sans discussion les clauses d'un ultimatum bien autrement rigou

reux.

« En apprenant cet étrange résultat de notre médiation, nous avons voulu n'y voir que l'effet de quelque malentendu. Nous avons espéré que le cabinet de Londres, considérant comme non avenus des faits regrettables pour tout le monde, et qui n'avaient eu lieu que par suite de la violation d'un engagement pris envers nous, maintiendrait le projet de convention que nous avions arrêté avec lui.

« Vous avez été chargé de lui en faire la demande. Cette demande n'ayant pas été écoutée, il nous a paru que la prolongation de votre séjour à Londres n'était plus compatible avec la dignité de la République. (Vifs applaudissements.) Le Président m'a ordonné de vous inviter à rentrer en France, après avoir accrédité M. Marescalchi en qualité de chargé d'affaires. Il m'a ordonné également de vous exprimer toute la satisfaction du gouvernement de la République, pour le zèle, l'habileté, l'esprit de concilia

tion et de fermeté tout à la fois que vous avez constamment porté dans une négociation dont il n'a pas tenu à vous d'assurer le succès.

« Vous voudrez bien donner lecture de la présente dépêche à lord Palmerston. (Nouveaux applaudissements.)

« Signé: DE LAHITTE. »

M. LE PRÉSIDENT. L'Assemblée jugera sans doute qu'elle ne peut engager de discussion approfondie que quand chacun de ses membres aura pu lire toutes les pièces de ce volumineux dossier, et se mettre ainsi à même de juger les actes et les intentions du gouvernement.

Voix nombreuses: Oui! oui! l'impression.

L'Assemblée consultée décide que les pièces seront imprimées et distribuées.

Une vive agitation succède à cette communication, et la séance reste suspendue pendant quelques instants.

L'Assemblée a commencé la discussion du budget des recettes. Un amendement de M. Félix de Saint-Priest pour diminuer le droit sur les transports d'argent par la poste, a été rejeté après les observations de M. le ministre des finances.

La discussion du budget des recettes continuera demain.

Chronique et Faits divers.

Par un ordre du jour en date du 4 mai, le général Baraguay-d'Hilliers annonce à l'armée expéditionnaire d'Italie son retour en France, où le rappellent les travaux de l'Assemblée législative.

-On a senti plusieurs secousses de tremblement de terre à Messine. Elles n'ont causé aucun accident sérieux.

— Une caisse de secours mutuels pour les ouvriers en cas de maladie, va être établie à Abbeville.

- Lundi a eu lieu, à l'évêché de Bruges, le jugement des pièces envoyées au concours de sculpture ouvert par Mgr Malou. Neuf concurrents y avaient pris part; le premier prix a été remporté par M. Bion, de Paris.

La grande et majestueuse façade principale de l'embarcadère de Strasbourg, rue de Chabrol, est terminée. On a sculpté dans les pendentifs de la colonnade, les armes de toutes les villes par lesquelles le chemin passe. La grande et belle cour sur la rue est entourée de sa griile surmontée de candélabres, et on en poursuit le pavage disposé en diagonale, d'après un nouveau système, par MM. Panis et Mallet. En ce moment on dresse un appareil à la crête du pignon pour y placer la statue colossale de la ville de Strasbourg. Cet embarcadère, au dire des voyageurs, est incontestablement le plus beau qu'il y ait dans le monde.

On lit dans la Patrie:

Le 19 février 1848, un honorable député conservateur présenta lui-même à un ministre de Louis-Philippe M. Napoléon-Jérôme, le républicain qui signe aujourd'hui des protestations contre la réforme électorale. Dans cette visite, il fat stipulé que le roi Jérôme recevrait une pension viagère de 150,000 fr., avec reversibilité de 50,000 fr. de rente sur la tête de M. Napoléon-Jérôme. C'est done le temps seul qui a empêché M. Napoléon-Jérôme, le Montagnard, d'être pensionné par la royauté. Or, de deux choses l'une ou lé 19 février 1848 M. Napoléon-Jérôine n'était pas républicain, et alors il est permis de dire que les événements ont bien promptement modifié ses convictions politiques, ou alors il était républicain, et il est permis de lui demander comment ses convictions se laissaient pensionner par la royauté? »

-Les réunions d'officiers-généraux et supérieurs, chez M. le général en chef Changarnier, sont en quelque sorte permanentes.

On annonce que le château d'Ecouen va prochainement être converti de

nouveau en succursale de la maison des filles de la Légion-d'Honneur de SaintDenis.

La santé de l'ex-roi Louis-Philippe a donné cette semaine de sérieuses inquiétudes à sa famille.

Un dérangement d'entrailles a été jugé assez grave pour faire appeler immédiatement des médecins. Le docteur Chamnel, médecin de la duchesse d'Orléans et de ses enfants, s'est rendu à Londres.

L'état de l'ex-roi lui a paru assez grave, mais sans être alarmant. Il a pensé qu'un changement de régime suffirait pour arrêter le progrès du mal.

M. Berryer.

L'Emancipation de Bruxelles nous apporte l'appréciation qu'on va lire de l'admirable talent de M. Berryer, et du rôle qu'il a rempli dans la discussion du budget. Nous devons dire que l'impression si parfaitement exprimée par le correspondant du journal belge, a été partagée par tous les esprits impartiaux dans l'Assemblée. Nous reproduisons cet article comme un éclatant et juste hommage rendu à l'une de nos gloires nationales :

«Laissez-moi vous parler à mon aise d'un de nos plus grands burgraves, de M. Berryer. En le revoyant à la tribune, à la fin de la séance d'hier, où semblait se devoir clore la discussion du budget, en l'y revoyant comme on l'y a vu tous les jours, à toutes les heures depuis deux mois, j'accusais la presse française, j'accusais l'Assemblée de ne pas paraître assez comprendre, assez admirer cette ardeur de combattre, cette infatigable faculté de la parole qui se manifestent dans notre grand orateur, si ample sans être superflu, si noble sans emphase, se mesurant avec mille petits ennemis, sans perdre un pouce de sa taille, une parcelle de sa glorieuse renommée, et sortant plus considérable d'une épreuve où tout autre talent que le sien, vu si souvent et de si près, aurait laissé de son prestige et de sa splendeur.

Depuis longues années M. Berryer vivait sur sa réputation acquise, dont les titres étaient beaucoup plus éclatants que nombreux. Une session pouvait s'écouler sans qu'on le vit monter à la tribune, je crois même qu'il lui arriva de se tenir plusieurs années de suite à l'écart. Ses amis s'en plaignaient, le parti légitimiste en murmurait tout haut souvent et tout bas encore plus; les envieux commençaient à nier sa valeur et les jeunes générations à considérer sa royauté oratoire comme un mythe: ce qui pouvait nuire à sa royauté politique, car M. Berryer est le roi intérieur de la légitimité, comme M. de Montalembert l'évéque extérieur des catholiques français.

‹ Personne à Paris ne sait et ne parle mieux la politique que M. Berryer, dans les salons, dans son cabinet et dans les bureaux de l'Assemblée. Il s'était fait la réputation surtout d'entendre supérieurement les questions de finances, de connaître à fond tous les ambages, les chemins creux, les mystères d'un budget. Ce fut là, évidemment, ce qui lui valut le laborieux honneur d'être le rapporteur de celui de 1850. Le budget républicain de 1850 avoir pour pivot législatif, le chef du parti de Henri V, c'est une des curiosités du temps présent! Y verra qui voudra un présage.

« Assez lente fut l'élaboration du budget de cette année. L'esprit légitimiste s'y révèle le moins possible. M. Berryer, s'il est avant tout légitimiste, est avec large mesure un homme de son temps. Le lendemain de la chute de Charles X, on l'a vu dans la chambre révolutionnaire, qui avait ratifié la déchéance de son roi, dis

cuter sans violence, sans aigreur, les bases de la Charte de 1830. Et, sous la branche cadette, au grand scandale de ceux qui n'ont rien oublié ni rien appris, il osa justifier la Convention, en pleine tribune, d'avoir préservé la robe sacrée de la patrie de la souillure du bâton anglais ou autrichien; car la honte de l'invasion, attribuée au parti de M. Berryer, n'est reprochable ni à la légitimité ni à la France, elle charge devant l'histoire le compte de l'Empereur.

Le seul tribut payé par M. Berryer à l'opinion légitimiste dans le budget de 1850, consiste en quelques idées de décentralisation que j'y vois semées. Par exemple, au chapitre de l'enseignement professionnel de l'agriculture, il propose de maintenir à soixante-dix le nombre des fermes-écoles que le ministre voulait élever jusqu'à cent; au chapitre des écoles d'arts et métiers, il oppose aux prétentions absorbantes de l'Etat enseignant, la doctrine : Que l'instruction théorique donnée par les écoles de l'Etat n'a produit que d'assez médiocres ouvriers, qu'elle n'a été pour beaucoup de jeunes gens qu'une source de fâcheuses déceptions, qu'elle a multiplié le nombre des mécontents, des ambitions non satisfaites devenues pour notre société un si grand péril.

<< Au chapitre du service des vivres, à ce même point de vue, M. Berryer a soutenu que le pain de nos troupes, acheté à la boulangerie civile, coûterait moins cher à l'Etat que le pain de munition, et qu'il serait meilleur; or, nous venons de lire dans les journaux que ce procédé, mis à l'essai immédiatement, eut pour résultat de procurer, outre une amélioration sur le pain, une amélioration en quantité et qualité sur la viande achetée avec le prodnit de l'économie faite sur le pain.

«Enfin, une quatrième proposition de M. Berryer, à ce point de vue encore, consistait à supprimer dans l'armée les compagnies hors rang confectionnaires de l'habillement de l'armée que l'on remettrait aux mains d'ouvriers civils.

Une lecture attentive du rapport de M. Berryer ne m'a pas fait découvrir d'autre trace du passage des opinions légitimistes dans notre budget.

«La lenteur avec laquelle ce rapport se produisit excita de nombreuses et vives réclamations. On annonça enfin sa venue. M. Berryer envoyait à l'imprimeur de l'Assemblée les feuillets de son manuscrit un à un, et le rapport imprimé n'avait pas plus de 90 pages, tandis que ceux de M. Bignon en conte1 naient 400 !

C'était bien la peine, disait-on, de nous faire tant attendre ! Que cela est étriqué de fond et maigre de forme! On ne voyait pas que dans cette lenteur, dans ce succinct rapport se révélait M. Berryer tout entier.

Sauf une correspondance obsédante que sa grande position dans le monde légitimiste lui nécessite depuis vingt ans, M. Berryer n'écrit pas. Chez lui tout se transforme en orateur. Journaux, revues, brochures, livres, M. Berryer connaît tout, absorbe tout, s'assimile, s'incorpore tout. Dans ces rares discours qui forment la gerbe lumineuse de son passé, on ne saurait croire combien il entrait d'éléments, combien de lectures, d'entretiens, de méditations s'y résumaient en éclatante lumière, en mouvements puissants.

Les grands improvisateurs sont de grands condensateurs comme les grands écrivains, les grands poëtes, les grands peintres, les grands compositeurs, comme tous les grands artistes. Chez M. Berryer, ce n'est pas comme en d'autres orateurs, la pensée philosophique, humanitaire, gouvernementale, recevant des ailes par la parole, et s'élançant de la tribune dans tout l'univers. Berryer, ce n'est pas l'orateur attendant les sténographes du Moniteur, enlevant de l'épreuve du soir les scories de l'improvisation du jour; son éloquence n'est pas dans la page, dans la phrase ni dans le mot. Berryer, c'est l'art oratoire fait homme. Lisez-le et

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