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hous-mêmes le moindre effort pour en sortir; en sorte que le démon st appelé par Jésus-Christ: le prince du monde (1). »

Telle est la doctrine catholique, développée depuis les temps aposoliques par les plus beaux génies qu'ait vus le monde; et c'est en 'appuyant sur l'autorité de saint Justin, de Tertullien, d'Origène, de aint Grégoire de Naziance, de Lactance, de saint Jérôme, de saint mbroise et de saint Augustin, que Bossuet disait, dans son magnique langage:

« On pourrait demander si Dieu conserve le même pouvoir aux nges déserteurs et condamnés. Mais saint Paul a décidé la question, rsque pour exciter les fidèles à résister vigoureusement à la tentaon, il les avertit que nous n'avons pas à lutter contre la chair et le ing, mais contre des princes et des puissances, qu'il appelle encore, cause de leur origine, des vertus des cieux (2), après même qu'ils 1 ont été précipités, pour nous montrer qu'ils conservent encore ans leur supplice la puissance comme le nom qu'ils avaient par ur nature....

... Ainsi l'intelligence leur est demeurée aussi perçante et aussi ublime que jamais; et la force de leur volonté à mouvoir les corps, ar cette même raison leur est restée comme des débris de leur efoyable naufrage..... Ainsi, tous les avantages naturels sont deleurés aux démons pour leur supplice. Dieu leur a tout changé en al, et leur noblesse naturelle se tournant en faste, leur intelligence n finesse et en artifice, et leur volonté en partialité et en jalousie, s sont devenus superbes, trompeurs et envieux, et réduits par leur aisère au triste et noir emploi de tenter les hommes: ne leur resant plus au lieu de la félicité dont ils jouissaient dans leur origine, que le plaisir obscur et malin que peuvent trouver des coupables à e faire des complices, et des malheureux à se donner des companons de leur disgrâce.... Et leur pouvoir sur les hommes, loin de iminuer, s'est plutôt accru dans la suite par le péché qui nous a aits leurs esclaves (3). D

Tels sont, nous le répétons, les enseignements de la tradition chréienne. Et cette histoire de la chute originelle des anges rebelles, qui lous a été révélée dans plusieurs pages de l'Ancien et du NouveauTestament, se retrouve chez les Perses (4), en Egypte (5), dans l'Inle (6), au Japon (7), chez les Chinois (8), parmi les Mongols (9), sur

(1) Ibid., XII, 31; XIV, 30; XVI, 11.

(2) Ephes., VI, 11, 12.

(3) Bossuet, cinquième Elévation, loc. cit.

(4) Expos. du syst. theol. des Perses, Anquetil, Mém. ac. des inscript., t. LXIX,

p. 184.

(5) Plut. De Is. et Osir.

(6) Maurice, Hist. de l'Indoustan, t. I, ch. 11.

(7) Noël, Cosmogonie du Japon.

(8) Ann. de Phil., t. XVI, p. 355.

(9) Benj. Bergman.

le continent américain (1). «Concordance merveilleuse, s'écrie le grand Cuvier, car est-il possible qu'un simple hasard puisse amener un résultat si frappant? »

Nous savons bien qu'on a souvent prétendu en Allemagne et en Angleterre, dans le siècle dernier, que les Hébreux n'avaient aucune idée des démons avant d'avoir fréquenté les Chaldéens. Mais cette assertion tombe devant un fait incontestable : c'est que les livres de Moïse, celui de Job, ceux des Rois, ont été écrits longtemps avant que les Juifs aient été en contact avec les Chaldéens. Ainsi donc, M. Villemain était, à son insu, en dehors de la vérité chrétienne, lorsqu'il écrivait, il y a quelque vingt-deux ou vingt-trois ans, les paroles que voici :

« La foi des Samaritains était altérée par le mélange des croyances orientales. Les dogmes simples de Zoroastre, transmis de proche en proche, défigurés par l'ignorance de leurs derniers sectateurs, étaient devenus une nouvelle idolâtrie. Les génies remplaçaient les dieux....; le dévot oriental se croyait sans cesse en leur pouvoir, les redoutait partout, les sentait, les souffrait en lui-même : de là cô possessions si communes dans l'histoire de cette époque..... Cette superstition rendait fou..... Ainsi, ajoute M. Villemain, dans la purete même du déïsme judaïque germant, à cette époque, une croyance qui, mal comprise, ramenait le polythéisme» (2).

Cette opinion de M. Villemain, que la possession est un délire de l'imagination, une sorte de maladie mentale, se fait jour dans plusieurs autres passages de son ouvrage. Ainsi, à la page 107, il qualifie l'histoire de saint Antoine, écrite par saint Athanase, « de monument singulier d'élévation d'esprit et de crédulité, » parce que ce grand homme raconte les luttes corps à corps qu'eut à soutenir le picux ermite contre le démon, et qui le laissaient accablé de contusions et de blessures. Ces luttes, ces tentations, ces possessions, M. Villemain, à l'exemple de certains médecins matérialistes de ce temps-ci, les explique par des causes toutes naturelles, les retours de la nature, la puissance d'une imagination austère, mais brûlante, etc., et il en arrive à tracer ces lignes qu'il effacera, nous en sommes convaincu, lorsqu'il sera amené, un peu plus tard, à faire de son ouvrage une révision complète : « Antoine.... habitait la nuit un tombeau. Là, durant sa veille pénitente, il luttait corps à corps con. tre plusieurs démons, sans doute comme l'enthousiaste Luther imagina qu'il disputait toute une nuit contre Satan lui-même dont il croyait entendre la voix dans les doutes de sa conscience » (3).

Le livre de M. Villemain fourmille d'assertions de ce genre. Pour lui, de très-grands saints vénérés par l'Eglise ne sont pas à l'abri de

(1) Humboldt, Vue des Cordilières, t. I, p. 237.

(2) Villemain, Tableau de l'Eloquence ehrétienne, p. 55-56.

(3) Loc. cit., p. 108.

tout reproche de superstition, ou du moins de manie mélancolique. Les extases, les manies mélancoliques, transformées en préten dues possessions, remplissent l'histoire de cette époque; ainsi, de cette rude école du désert, il sortait des grands hommes et des fous (1).»> M. Villemain affirme que c'était le jugement même des contemporains, et, par une de ces contradictions si familières aux hommes le notre temps, l'auteur qui, si souvent, a manifesté une admiration, xagérée peut-être, pour les solitaires de Port-Royal, semble prenre parti pour les railleurs de la vie monastique au quatrième siècle t contre l'illustre saint Chrysostôme lui-même, le panégyriste des oines!

Ailleurs (2), l'écrivain nous montre saint Hilarion retiré près des ébris d'un temple antique et croyant entendre, la nuit, dans le urmure des vents engouffrés sous les voûtes en ruines, les voix es démons et leurs clameurs pour interrompre sa prière !

Parlant de saint Epiphane, p. 276 de son ouvrage, M. Villemain exprime ainsi :

« On lui attribuait aussi de miraculeux exorcismes qui semblent effet d'une grande puissance morale exercée sur les âmes par l'ascenant d'une foi vive et d'une extrême douceur (3). »

On le voit donc, du livre de M. Villemain ressort celte conséquen,qui est, certainement, en opposition avec les convictions actuelles l'auteur, savoir, que, raisonnablement, il faudrait supprimer tout côlé surnaturel du christianisme !

Nous avons fait connaître plus haut les enseignements du chrisanisme sur la chute originelle de l'homme devenu, par le péché, fant du diable et esclave de celui que Notre-Seigneur lui-même aplle le prince du monde.

Or, que M. Villemain me permette de le lui faire observer, entre s enseignements chrétiens et l'opinion par lui émise au début de n livre. (4), que les possessions si communes dans l'histoire de cette oque ont pris leur source dans je ne sais quelle idolâtrie orientale, n'y a pas de conciliation possible. C'est à Jésus-Christ lui-même le s'attaquent ceux qui nient la réalité des possessions, car notre din Maître a lui-même chassé des démons.

«Le bruit des miracles bienfaisants de Jésus-Christ s'étant répandans toute la Syrie, dit l'évangéliste saint Matthieu, on lui ameait toutes sortes de malades: ceux qui avaient des maladies de lanleur, les frénétiques, ceux qui AVAIENT DES DÉMONS: variis lanoribus, tormentis comprehensos, ET QUI DÆMONIA HABEBANT (5). » Il résulte invinciblement de ce passage:

1° Que l'état de possession était publiquement avéré;

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2° Qu'il était distinct des autres états avec lesquels on aurait pu le confondre.

Cette notoriété, cette distinction, ressortent d'une foule d'autres passages des Evangiles (1), Or, nous en appelons à tout homme de bon sens, les Evangélistes auraient-ils tenu ce langage si, autour d'eux, l'état de possession n'eût été un fait avéré?

Jésus-Christ avait délégué à ses disciples son pouvoir sur les démons. Les Apôtres, leurs Actes en font foi à chaque page, — usèrent souvent de ce pouvoir. Or, à moins de soutenir que tous ces livres, les plus véridiques qui soient au monde, ne sont qu'un tissu de fables et d'absurdités, il faut bien admettre la certitude de l'état de possession.

Nous soumettons respectueusement ces observations à M. Villemain. Certes, ce n'est pas lui qui voudrait jamais admettre qu'en bonne critique, l'auteur même le plus docte et le plus éminent se pût permettre d'accuser de faiblesse d'esprit, d'exaltation ou de monomanie, les écrivains les plus respectables de l'antiquité chrétienne, et d'attribuor foutes choses à des causes naturelles que l'on ne connaît pas, et que l'on ne saurait désigner!

M. Villemain a été couronné, bien jeune encore, par l'illustre Compagnie dont il est aujourd'hui l'une des gloires, pour un Eloge de Montaigne. Or, ce serait faire injure à sa haute intelligence de supposer même qu'il pût aujourd'hui, dans son âge mûr, méconnaitre et les devoirs de la critique et les règles de la raison à ce point de refuser sa créance à des faits appuyés sur les témoignages les plus authentiques, uniquement parce que ces faits sont incompréhensibles. Assurément M. Villemain est de ceux qui croient le plus fermement, avec notre Montaigne, que « c'est une hardiesse dangereuse et de conséquence, oultre l'absurde témérité qu'elle traisne quant à soy, de mespriser ce que nous ne concevons pas; car, après que, selon votre bel entendement, vous aurez establi les limites de la vérité et du mensonge, et qu'il se trouve que vous avez nécessairement à croire des choses où il y a encore plus d'estrangeté qu'en ce que vous niez, vous vous estes déjà obligé de les nier! »

AURÉLIEN DE COURSON. (La suite à un prochain numéro.)

(1) Luc. VI, 17, 18; Matth. XII, 22, 24; VIII, 16, etc.

BOURSE DU 27 MAI.

Le 5 p. 100, 91 05 à 90 90. Le 3 p. 100, 56 50 à 56 45.

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Banque, 2,160 00.- Obligations de la Ville, 1,280 00.- Nouvelles Obligatiens, 1,132 50.5 p. 100 belge, 98 318. Emprunt romain, 79 112.

L'un des Propriétaires-Gérants, CHARLES DE RIANCEY.

Paris, imp. BAILLY, DIVRY et Comp., place Sorbonne, 2.

MERCREDI 29 MAI 1850.

L'AMI DE LA RELIGION.

(N° 5062.)

Mandement de Mgr l'Evêque de Perpignan

A L'OCCASION DU CONCILE PROVINCIAL D'ALBY.

Après avoir annoncé le Concile dont l'indiction est fixée au 23 juin prochain, Mgr l'Evêque de Perpignan invite les fidèles à s'unir par le sentiment et la pensée à ces délibérations solennelles dont ils seront l'objet principal, car leurs intérêts éternels sont « l'unique but « de ces Conciles provinciaux, si fort en usage dans les premiers « âges du christianisme, si fort recommandés par les Souverains« Pontifes et les assemblées œcuméniques; si fort en honneur jadis a dans les Gaules et dont pourtant les gouvernements modernes, depuis bientôt trois siècles, nous ne savons par quelle ombrageuse ◄ susceptibilité, avaient presque arrêté l'interdiction.

• Grâces à Dieu, qui dans sa sagesse a bien voulu briser nos << chaînes et rendre à l'Eglise gallicane cette liberté précieuse.....

« Pendant donc que nous serons réunis en Concile, nos très-chers «Frères, réunissez-vous au pied des autels, implorez sur nous les << dons du Saint-Esprit et obtenez par vos instances réitérées, que « nous en soyons, auprès de vous, les dignes organes. Félicitez-vous « d'être enfants de l'Eglise, rappelez-vous l'assistance qui lui est pro◄ mise jusqu'à la consommation des siècles; comme son divin auteur, elle est la voie, la vérité et la vie. Attachez-vous à Elle par le fonds a de vos entrailles, respectez ses décisions, adoptez ses pratiques, « chérissez ses ministres, croyez à leur dévoûment, laissez-leur exer« cer sur vous une salutaire influence; et en reconnaissance de leurs << bienfaits, donnez-leur la consolation de vous introduire un jour a dans ces pâturages éternels dont l'accès, quoi qu'on en dise, leur « est exclusivement confié. »

Séance de l'Assemblée.

La séance avait commencé d'une façon très-pacifique et même très-ennuyeuse. M. Raudot d'abord, M. Monet ensuite laissaient flotter le débat. La fatigue de l'Assemblée, qui se trahissait par la désertion des bancs, ne semblait guère pouvoir être surmontée. Ce n'a pas été l'avis de M. le général de Lamoricière, et à toute aventure, il s'est hasardé au milieu de la discussion.

Depuis quelques jours, l'honorable général souffrait impatiemment le silence. A son attitude, à ses gestes, on voyait bien qu'il éclaterait lôt ou tard. Il a cru le moment opportun, et, avec une habileté très-consommée, il a ouvert son feu, presque sans paraître y L'Ami de la Religion. Tome CXLVIII.

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