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en défiant le bon sens, que l'instruction publique pouvait et devait rester absolument telle qu'elle était sortie de la pensée impériale en 1808. De telle sorte aussi que les catholiques, à la rigueur, et au risque de n'aboutir qu'au maintien du statu quo, auraient pu réclamer, de leur côté, la suppression immédiate et complète de toute l'organisation universitaire, puisqu'elle est tout à fait en dehors du texte constitutionnel.

La constitution belge ne prête pas, elle, à des prétentions si contradictoires.

Voici son article 17:

« L'ENSEIGNEMENT EST LIBRE.

« Toute mesure PRÉVENTIVE est interdite;

« LA RÉPRESSION des délits n'est réglée que par la loi. »

Et, ce n'est qu'après avoir ainsi garanti la liberté par trois disposi tions spéciales que l'article 17 arrive à l'instruction publique ; et encore ne l'admet-il que comme un complément à l'enseignement libre ! De plus, pour prévenir tout abus, il ajoute comme restriction:

L'instruction publique, donnée aux frais de l'Etat, sera également réglée par la loi. »

Ainsi, d'une part, la constitution belge ne nie pas le droit et même le devoir de l'Etat d'établir, en tant qu'il serait besoin, une instruction publique aux frais du budget; mais, d'autre part, elle suppose que la nécessité ou l'utilité de l'instruction publique sera justifiée par l'insuffisance de l'enseignement libre, et surtout qu'elle ne pourra jamais nuire à cet enseignement.

Ainsi, rien de plus clair, en Belgique, que la Constitution; rien aussi de plus conforme à ses prescriptions et à son esprit que les faits, la législation, la conduite officielle du gouvernement belge jusqu'à ce jour.

Aussitôt après la constitution promulguée, le pays s'est couvert

d'établissements libres.

Puis, lorsque la législature fit les lois de 1835 sur l'Enseignement supérieur et de 1842 sur l'enseignement primaire, qu'arriva-t-il?

Dans l'enseignement supérieur, bien loin d'agrandir la part de l'Etat, elle SUPPRIMA une des trois universités alors existantes, et elle abandonna à la concurrence les deux villes les plus favorables à ses progrès, la capitale et Louvain.

Quoique la loi de 1835 ait été signée par M. le comte de Theux, certes les soi-disant libéraux n'ont pas à s'en plaindre. Si les professeurs sont au moins aussi distingués, si les études sont manifestement plus fortes à Louvain qu'à Liége, à Gand et à Bruxelles, le faux libéralisme n'en possède pas moins trois universités contre une, et il a enelevé par elles près de la moitié de la jeunesse à la saine et tutélaire direction de l'Eglise.

Passons à la loi de 1842 sur l'enseignement primaire; loi à laquelle M. Nothomb a attaché son nom; loi de transaction s'il en fut; prépa

rée, rédigée et votée sous l'empire d'une pensée de conciliation entre tous les partis modérés, et appliquée jusqu'ici avec le concours et à la satisfaction mutuelle de l'Eglise et de l'Etat.

Après avoir démontré qu'au degré supérieur la loi et le gouvernement ont accordé à l'enseignement libre non-seulement tolérance loyale, mais aide et protection (spécialement par les dispositions relatives au jury d'examen, aux bourses, aux concours), le vénérable auteur de l'écrit dont nous parlions plus haut, ajoute :

L'enseignement primaire a été traité sur le même pied. Le gouvernement a fait alliance avec la liberté; il a été poli envers elle. La loi, qui organisa les écoles primaires, parut si franche et si loyale que plusieurs établissements libres n'éprouvèrent aucune répugnance à s'enrôler sous la bannière du gouvernement qui n'était point pour eux un joug, mais un secours. Plusieurs ÉCOLES LIBRES OBTIENNENT ENCORE JOURNELLEMENT DES SUBSIDES DE L'ETAT. L'esprit de nos institutions est donc PARFAITEMENT RESPECTÉ vis-à-vis des écoles primaires comme des établissements d'instruction supérieure. >>

On n'a pas enfin attendu, en Belgique, jusqu'en 1850 pour s'occuper de l'enseignement secondaire et moyen. Les catholiques et leurs adversaires ont eu plusieurs fois l'occasion d'exprimer leurs opinions et de faire connaître à ce sujet leurs vues, leurs vœux et leurs plans.

Il est curieux d'en recueillir le témoignage.

III.

M. Rogier n'est pas un homme d'Etat improvisé. Il est ministre au jourd'hui, mais il était ministre aussi en 1834 et en 1840; et le projet qu'il présente en ce moment n'est pas le premier qu'il ait signé c'est le troisième.

Le premier, celui de 1834, partait de ce principe, que l'instruction publique est chose essentiellement municipale.

M. Rogier disait donc « qu'en laissant à la commune la libre direc tion de ses établissements, on stimulerait le zèle de l'autorité locale et que seule elle aurait l'honneur de ses succès et la responsabilit de ses faules. Quant à la part du gouvernement, elle devait s borner, selon lui, « au pouvoir de fonder et de diriger TROIS ATHÉ NÉES MODÈLES. »

Ainsi nul ne songeait alors à créer une écrasante concurrenc contre la liberté et contre le clergé. Le petit nombre des établisse ments de l'Etat devait seulement servir d'exemple, de type facul tatif aux autres écoles. On n'avouait qu'un but tenir élevé niveau des études, augmenter et rehausser l'honneur des lettres couronner ainsi un large système d'instruction, vraiment libre vraiment nationale.

Et cependant, il y avait alors une opposition; mais laquelle? No pas celle des libéraux; ils ne trouvaient pas la part de l'Etat tro

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petite mais celle des catholiques qui déclaraient cette part trop grande.

Question de plus ou de moins après tout; question comparativement minime et sur laquelle on verra combien les catholiques ont cédé plus tard! Mais ce n'était pas la seule, assurément, qui les effrayânt! lly avait un autre point qui les frappait bien davantage. Ils ne croyaient pas que les garanties religieuses fussent suffisantes dans ce plan d'une instruction publique, qui n'existait pas encore, qu'ils avaient le droit de régler, et que l'on ne pouvait fonder sans leur assentiment.

Chose remarquable! C'est aussi SUR CE POINT, qu'en 1840, lors de la constitution d'un ministère soi-disant libéral, les chefs actuels de la majorité, MM. Rogier, Lebeau, Leclercq et Liedts, sentaient la nécessité de donner satisfaction aux catholiques. Le ministère promettait alors à ceux-ci d'améliorer le projet de loi de 1834, en accordant moins d'action au Pouvoir ET PLUS DE GARANTIES RELIGIEUSES AUX FAMILLES.

M. Liedts fit donc, au nom du cabinet, la profession de foi suivante:

Nous déclarons que LA LOI, tout en respectant la plus entière liberté d'instruction, doit donner aux pères de famille LA PLUS COMPLÈTE GARANTIE D'UNE ÉDUCATION MORALE Et religieuse. ›

MM. Lebeau et Rogier corroboraient ces déclarations dans les termes les plus explicites.

Laissons enfin la parole à l'un des orateurs les plus éminents du libéralisme belge, l'un des ministres de l'époque, à M. Leclercq :

Je pense, et mes collègues pensent comme moi, disait-il en 1841, que quand il s'agit de la jeunesse, l'instruction ne doit pas étre séparée de l'éducation; nous persons qu'il n'y a pas d'éducation SANS QUE L'ON DONNE UNE DIRECTION RELIGIEUSE, sans que l'on inspire des habitudes religiouses à la jeunesse, sans qu'on Jui donne une instruction religieuse. Nous pensons que pour tout ce qui regarde la religion dans l'éducation, il faut faire, PAR LA LOI, aux ministres du culte, ne PART D'INTERVENTION proportionnée à l'importance de la religion. »

Ainsi, selon M. Leclercq, selon tous ses collègues qui PENSAIENT COMME LUI, Sous la constitution belge, sous le régime de la séparation de l'Eglise et de l'Etat, en vertu des principes de la liberté religieuse :

1' L'enseignement public ne pouvait être organisé pour la jeunesse, sans une DIRECTION RELIGIEUSE, SANS DES HABITUDES RELIGIEUSES, SANS UNE ÉDUCATION RELIGIEUSE;

2o L'enseignement RELIGIEUX, ainsi compris, ne devait et ne pouvait être donné que par des MINISTRES DU CULTE;

3o Cette intervention des ministres du culte ne devait pas être FACULTATIVE OU ADMINISTRATIVE, mais LÉGALE, mais OBLIGATOIRE; 4 En un mot, la RELIGION devait avoir dans l'instruction publique

une part, et une part PROPORTIONNÉE A L'IMPORTANCE MÊME qu'elle a dans l'éducation.

Inutile de dire que les catholiques belges furent toujours conséquents avec eux-mêmes, et qu'en 1846, en présence des plus graves difficultés, le projet de transaction proposé par M. de Theux et accepté par toute la partie modérée et raisonnable du parlement, sauvegardait ces principes. On portait le nombre des Athénées de 3 à 10; c'était beaucoup, c'était trop! Mais, d'une part, les droits des communes comme ceux des individus restaient saufs; et d'un autre côté et surtout M. de Theux maintenait et confirmait énergiquement la part légitime et incontestable du sacerdoce :

1° Par l'obligation LEGALE de l'enseignement religieux, réservé aux ministres du culte professé par la majorité des élèves;

2o Par le concert LÉGALEMENT indispensable du gouvernement et des autorités ecclésiastiques;

3° Par la présence d'un Ecclésiastique dans le conseil supérieur. Voilà des faits certains, évidents, clairs comme le soleil. Ils établissent de la manière la plus irrefragable la tradition comme les droits des catholiques belges, qui combattent et qui repoussent aujourd'hui le projet de M. Rogier, non-seulement parce que le projet de 1880 est bien plus menaçant pour la liberté que ceux de 1834 et de 1840, mais aussi, mais principalement, mais par dessus tout, parce qu'il offre encore moins de garanties à la religion, et ne lui réserve aucune place dans cette entreprise d'instruction publique organisée par l'Etat, réglée par la loi et payée par une nation, dont la constitution proclame la liberté des cultes, et dont les consciences professent presque unanimement la foi catholique!

De tels faits peuvent être médités utilement, non-seulement en Belgique, mais en France. En France ils sont trop peu connus. Et chez nos voisins ils suffiraient à la condamnation du projet actuel; car il est lui-même la contre-partie, la contradiction formelle, avouée, systématique de tout ce qui existe dans ce pays, constitution, lois, mœurs, depuis que le royaume de Belgique a été inscrit au nombre des Etats, sur la carte politique de l'Europe.

(La fin à un prochain numéro.

La loyale et généreuse conduite de M. Jules de Lasteyrie a été profondément appréciée par la droite. Il a été unanimement décidé que M. de Lasteyrie serait de nouveau porté à la vice-présidence, et il est à espérer que les autres nuances de la majorité suivront cet exemple.

Nous empruntons à une correspondance de Paris, publiée par les journaux de province, l'article suivant que nous livrons anx tristes réflexions de nos abonnés :

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all faut vivre dans des circonstances aussi extraordinaires que celles que nous traversons pour voir une assemblée française acclamant l'éloge de la confession. Quand M. Berryer a parlé, avec un accent admirable, de cette disposition qui porte à s'agenouiller devant le prêtre, à venir lui dire sa vie tout entière,... les applaudissements énergiques de la grande majorité de l'Assemblée ont été un acte public et solennel de foi.

« Pendant que ces paroles ranimaient la croyance dans un grand nombre de cœurs, il y avait, dans un coin obscur de l'Assemblée, à l'extrémité de la Montagne, il y avait un homme dans le cœur duquel les éloquentes paroles de M. Berryer ne ranimaient que le remords. Il est arrivé un moment où ce remords agitait cette âme, c'est quand M. Berryer a parlé des prêtres qui supportaient impafiemment le joug de l'Eglise et qui sont sortis violemment de son sein... Un homme petit, maigre, l'air misérable, le dos voûté, la tête grisonnante, les yeux caves, hagards, jamais fixés en face, la figure livide, s'est levé de ce coin obscur de l'Assemblée et, malgré les efforts de ses voisins, a quitté la salle, emportant une poignée de main de M. Pierre Leroux. Vous avez nommé cet homme, c'est M. l'abbé de Lamennais.>>

Retour du Pape à Rome.

Le gouvernement a reçu de M. le contre-amiral Tréhouart la dépêche télégraphique suivante :

<< Civita-Vecchia, le 5 avril. Je reçois à l'instant de M. de Rayneval et du commandant du Vauban la nouvelle que le Pape est parti de Portici hier à une heure du soir, pour se rendre à Caserte, et de là à Rome, en voyageant à petites journées. »

Nouvelles Religieuses.

DIOCÈSE DE PARIS. - C'est dimanche prochain 14, dimanche du Bon-Pasteur, qu'aura lieu le sacre de Mgr de Dreux-Brézé, évêque-élu de Moulins. La cérémonie aura lieu à la métropole, et commencera à neuf heures. S. Ex. Mgr Fornari, archevêque de Nicée, nonce apostolique en France, sera le Prélat consécratear. S. Exc. sera assistée de S. Exc. Mgr l'Archevêque de Reims, Primat de la Gaule-Belgique, Légat-né du Saint Siége et de S. G. Mgr l'Archevêque de Ronen, Primat de Normandie. La cérémonie commencera à neuf heures du matin. DIOBESE DE RENNES. On lit dans le Journal de Rennes :

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« Hier matin, la longue rue du faubourg de Brest offrait le plus édifiant spectacle. Le clergé de Saint-Etienne devait la parcourir, suivant l'usage de chaque année, pour porter la communion pascale aux malades et aux infirmes de la paroisse. Tous les habitants de ce quartier populeux, hommes, femmes, enfants étaient animés d'un saint empressement; malgré le mauvais temps, toutes les maisons, sans aucune exception, étaient tendues de draps blancs; des guirlandes de verdure et de fleurs şerpentaient sur ces tapisseries improvisées, le pavé était

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