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Cette réforme, nécessaire à la salubrité de ces établissements, es aussi conforme à l'intérêt bien entendu de la charité.

Il était urgent de porter remède à l'encombrement des deux hospi ces dont il s'agit. Ces immenses agglomérations d'hommes et de fem mes, d'une santé déjà ruinée, offraient un aliment trop naturel au épidémies dont elles devenaient parfois les plus redoutables foyers On sait que le choléra, l'année dernière, a enlevé de huit à neu cents personnes à la Salpêtrière, dans les seules sections des indi gentes.

La diminution des lits permettra de prendre les mesures hygiéni ques que réclament Bicêtre et la Salpêtrière, et d'y donner notam ment aux dortoirs l'air et l'espace dont ils ont besoin.

Avec le prix de l'entretien des 800 lits supprimés, 850 vieillards e infirmes pourront être secourus à domicile. On laissera ainsi dan leurs familles ceux que le dénuement seul et la nécessité en auraien arrachés, et qui ne les eussent quittées qu'avec larmes.

Les secours annuels sont fixés à 253 francs pour les hommes, à 19 pour les femmes. Ils seront payés par mois et distribués, durant le diverses saisons de l'année, proportionnellement à l'intensité des be soins auxquels ils doivent subvenir. Ainsi les sommes seront plus for tes pendant les mois d'hiver, parce qu'alors il faut se chauffer, ter du bois, des vêtements, etc., etc.; elles seront moins fortes pen dant les mois d'été, époque où les frais de chauffage disparaissent e où la cherté des aliments diminue.

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Les conditions exigées pour l'obtention de ces secours, seront à pe près les mêmes que pour l'entrée dans les hospices. Il faudra tou jours être âgé de 75 ans, être inscrit depuis deux ans au bureau d bienfaisance, et justifier de dix ans de domicile dans la ville de Paris Ces conditions sont bien sévères, et cependant combien les remplis sent qui ne peuvent encore être placés dans les refuges consacrés la vieillesse et à l'infirmité!

Il faudra, en outre, autant que possible, prouver qu'on peut viv en famille.

Un des grands inconvénients des hospices, si nécessaires qu'i soient dans beaucoup de cas, c'est souvent de priver de vieux père de vieilles mères, non-seulement des soins auxquels ils ont droit la part de leurs enfants, mais aussi de la tendresse que l'absen diminue et qui les consolait au foyer domestique. C'est aussi de fa voriser la négligence et l'égoïsme de ceux qui, placés eux-mêm dans des conditions très-précaires, ne voient plus dans leurs paren qu'un fardeau et ne cherchent qu'à s'en débarrasser comme d'u poids dont ils seraient accablés.

Il est bien entendu que les secours seraient retranchés à ceux q s'en rendraient indignes, ou auxquels ils ne profiteraient point par que leurs familles les détourneraient de leur destination.

Il y a là, en effet, un abus qui non-seulement est probable, mais jusqu'à un certain point inévitable. Nous dirons tout à l'heure comment on pourrait le prévenir ou y remédier en partie. Mais à préEssent il faut remarquer d'abord que, sous une autre forme, il existe aussi dans les hôpitaux où le service est payé, et dont les employés, quoique très-légitimement salariés, n'ont pas cependant plus de droit aux libéralités publiques que les parents des malheureux.

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Allons plus loin. Il est bon aussi que la présence du vieux père dans la famille, au lieu d'y être seulement une charge comme aujourd'hui, y devienne d'autant plus un objet de vénération et de soins, qu'elle y attirera les bienfaits de la charité comme les bénédictions du ciel.

Que si, cependant, cét abus ou tout autre devenait excessif, la cessation absolue ou la suspension temporaire des sommes allouées serait un châtiment efficace pour les coupables. Et quant à ceux qui seraient victimes d'une rapacité odieuse, des places leur devraient être réservées de préférence dans les établissements actuels; car il ne s'agit nullement de fermer les portes des hospices à ceux dont ils sont le seul et nécessaire asile.

Mais dans un temps où les droits, les sentiments et les liens du sang sont journellement et systématiquement attaqués, il importe de ne rien faire qui puisse leur porter atteinte, de saisir au contraire toutes les occasions possibles de les resserrer et de restreindre dans de justes limites les institutions dont l'influence et l'esprit tendraient

à les relâcher.

Nous suivrons donc avec intérêt l'expérience qui va être tentée. Puisse-t-elle réussir! nous aimons à le croire, elle amènerait d'autres réformes et d'autres améliorations non moins souhaitables dans le domaine de l'assistance publique.

Un mot seulement des conditions qui nous paraissent indispensables à son succès. Pour atteindre le bon résultat qu'on se propose et pour éviter les inconvénients que nous avons déjà signalés, notamment pour la surveillance, la distribution et l'allocation des fonds ou des secours en nature dans les familles, l'administration a besoin de coopérateurs nombreux et divers. C'est un point dont nous craignons qu'elle ne se soit pas assez préoccupée.

Il y a en effet des détails qui sortent tout-à-fait de la compétence des bureaux et auxquels la bienfaisance publique ne s'entendra jamais. Supposons le cas le plus fréquent et le plus excusable. On craindra, par exemple, que l'argent donné pour le vieillard ou l'infirme ne soit dépensé pour la layette ou la nourriture de l'enfant qui va naître. Qu'on ait soin alors de n'accorder que des bons de soupe, de bois, de viande; d'apporter une couverture, des vêtements, etc., etc., en un mot, ce que réclament les besoins pressants du malheureux qui a droit à la subvention. Mais c'est une sollicitude de tous les ins

tants qui, pour être efficace et non vexatoire, doit s'exercer très-pe administrativement et avec les ménagements du dévouement per sonnel dans ce qu'il a de plus intelligent et de plus délicat.

L'administration compte beaucoup sur les bureaux de bienfa sance. Pour les formalités d'abord, c'est tout naturel. Nous compre nons aussi qu'elle fasse, dans la distribution et la gestion des somm dont elle dispose, une grande part à une institution qui a un carac tère public et officiel. C'est son droit, et nous ne nous plaignons pa qu'elle en use. Mais nous doutons fort que les bureaux de bienfai sance, réduits à eux seuls, suffisent à leur tâche. Il faut qu'à leu tour ils appellent à leur aide les lumières, le zèle, le concours de bienfaisance privée, des associations religieuses, du sacerdoce chré tien.

Quoi qu'il en soit, indépendamment même de tout appel public voici une carrière de plus ouverte à la charité catholique. Nou n'avons pas besoin d'attirer sur ce point l'attention de nos prêtres € de nos Sœurs, des conférences de Saint-Vincent-de-Paul, des dame qui se chargent de la visite des pauvres, du soin des malades, etc Leur vigilance et leur dévouement préviennent et devancent tout exhortation.

Nous constatons seulement qu'un actif et bienfaisant patronag sera plus nécessaire que jamais à ces 850 vieillards et infirmes qui au lieu d'être casernés dans des hospices éloignés, vont rester désor mais dans leurs familles, dans leurs paroisses, dans les quartier qu'ils habitent et où ils sont connus. Ils demeurent ainsi à la porté de leurs protecteurs actuels; et ceux-ci devront penser que leur zèl doit remplacer à l'avenir l'intervention, si souvent efficace, des au môniers dans les établissements publics.

La religion et le salut des malheureux ne doivent pas perdre, mai gagner à la plus grande liberté qui leur sera laissée. Le bien qu'o leur fera, rejaillira tout autour d'eux. Les bénédictions et l'exempl des parents réagiront sur leurs enfants, et ainsi on verra s'accroit les consolants effets et les grâces abondantes de cette assistance sp rituelle, plus indispensable et plus précieuse encore, au milieu de misères et des souffrances humaines, que l'assistance matérielle, r clamée par les besoins du corps et les faiblesses de la nature! CHARLES DE RIANCEY.

BOURSE DU 6 AVRIL,

Le 5 p. 100, 89 30 à 89 60. - Le 3 p. 100, 55 45 à 55 70. — Actions de Banque, 2,167 50. Obligations de la Ville, 1,272 50.- Nouvelles Oblig tions, 1,151 25.5 p. 100 belge, 98 314. Emprunt romain, 78 514.

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L'un des Propriétaires-Gérants, CHARLES DE RIANCEY.

Paris, imp. BAILLY, DIVRY et Comp., place Sorbonne, 2,

LUNDI 8 AVRIL 1830.

(No 5011.)

L'AMI DE LA RELIGION.

Des luttes nouvelles en Belgique.

Projet de loi sur l'enseignement moyen. - Rapport de la section

centrale.

Note de M. de Decker.

-

Des VICES RADICAUX

du Projet de loi de M. Rogier (1).

I.

La Belgique, par la communauté des croyances, de la langue et des mœurs, a toujours eu droit à l'affection particulière de la France.. Les luttes glorieuses qu'elle a soutenues pour l'Eglise, le repos honorable qu'elle semblait avoir conquis, étaient encore des titres à notre admiration comme à nos sympathies. Aujourd'hui notre sollicitude doit être plus que jamais réveillée par ses dangers, et par les malheurs qui la menacent.

L'Ani de la Religion a dénoncé et suivi avec un soin scrupuleux les détestables projets qui vont, en cette contrée, porter de mortelles atteintes à la foi et à la liberté.

Certes, nous n'aurions pas cru que les vrais principes en matière d'enseignement pussent être si audacieusement méconnus et attaqués dans un pays qui a vu échouer avec tant d'éclat les coupables et téméraires tentatives de Joseph II en 1789, et de Guillaume Ier avant

1830.

C'est cependant cette expérience insensée de l'empereur d'Autriche et du roi de Hollande, qu'on est encore sur le point de renouveler dans cette Belgique, où le libre enseignement est une des origines et des sources de l'indépendance, une gloire traditionnelle et l'un des

caractères de la nationalité..

Et dans quelles circonstances? A côté de nous, à nos portes, en 1850, au moment où la France vient de condamner enfin ce système de monopole et d'athéisme pratique qu'elle a si déplorablement enraciné chez elle et inauguré dans le monde !

Et cette incroyable entreprise, préméditée et préparée par des politiques rétrogrades, jaloux de l'Église, uniquement préoccupés d'exagérer les attributions du pouvoir civil, elle réussira peut-être par l'appui des factions les plus acharnées contre l'ordre public. Car, tandis qu'en France, tous ceux qui sentent le besoin de défendre et de raffermir la société, se sont réunis dans un même camp, la chambre des Représentants de Bruxelles voit les parlementaires donner la main aux révolutionnaires; et cette coalition, sortie des clubs et do(1) A Gand, chez Van Hifte; à Bruxelles, chez Périchon. La 4o édition de cet excellent opuscule est déjà presque épuisée.

L'Ami de la Religion. Tome CXLVII.

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minée par les clubs, forme une majorité qui ne s'arrêtera pas sar doute devant la justice, puisqu'elle a le nombre pour elle!

Il est vrai que les catholiques résistent avec énergie. L'opinion pu blique s'émeut. Des élections partielles auront lieu au mois de juin Changeront-elles les forces proportionnelles des partis? Nous l'espé rons; le ministère le craint, c'est précisément pourquoi il se hâte. La section centrale, ou, comme nous dirions ici, la commission fait son rapport; le jour est fixé pour le débat public.

Nous avons sous les yeux le texte et l'exposé des motifs du projet mi nistériel, le travail de M. Dequesne, rapporteur de la section cen trale, une note substantielle et énergique de M. de Decker, les feuilles les plus importantes de Belgique, notamment l'excellent Journal de Bruxelles; enfin et pour nous guider au milieu de ces documents de précieuses correspondances et une admirable publication sur la quelle nous devrons particulièrement insister et qui a pour titre LES VICES RADICAUX DU PROJET DE LOI SUR L'ENSEIGNEMENT MOYEN Disons sur-le-champ que cet écrit est un chef-d'œuvre de contro verse. Rien de plus clair, de plus concluant, de plus décisif. O l'attribue, à Bruxelles, à l'un des membres de l'illustre épiscopat Belgique. Quoique notre respect ne nous permette point de percer le voile de l'anonyme, nous n'en doutons point pour notre part. La hauteur du point de vue, l'élévation des sentiments, la dignité du langage, la force des raisons, l'expérience profonde du sujet, l'autorité de la critique en révèlent à chaque page, à chaque ligne, le vénérable auteur.

Avec ces matériaux et ces lumières, résumons rapidement le phases antérieures et les termes actuels d'une question qui n'a ja mais eu plus d'intérêt, d'un côté comme de l'autre de la frontière.

II.

Les rapports de l'Eglise et de l'Etat ne sont pas les mêmes e Belgique et en France. Ici le concordat, là le principe et le fait de l séparation.

La constitution belge de 1830, quoique monarchique ou plutô parce qu'elle est monarchique, est infiniment plus libérale que notr Constitution républicaine de 1848. Jamais le droit commun n'a él plus largement établi en Europe; nulle part les mesures préventive et les précautions restrictives à l'égard de la liberté n'ont été plu solennellement et plus formellement abandonnées.

Enfin, l'article 17, sur l'enseignement, est bien différent de l'art. de notre loi fondamentale.

Notre Constitution, en proclamant que l'enseignement est libre, bien soin de subordonner la pratique et l'exercice de la liberté à d conditions qui la limitent très-étroitement.

Quant à l'instruction publique, silence complet. De sorte que, n guère encore, il nous a été donné de voir des universitaires souteni

de

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