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Si ces majorités venaient à être déplacées, bien des choses seraient remises en question et pourraient compromettre l'ordre nouveau. ESPAGNE.-Le comte de La Vega del Pozo, vient d'être nommé ambassadeur en Sardaigne.

-La misère est toujours croissante dans plusieurs des provinces de l'Espagne. Il est déplorable de voir un pays si fertile et qu'une administration bienfaisante et forte rendrait si heureux, désolé par la famine, parce qu'au lieu de se préoccuper du bien-être des popu-lations on se concentre dans des questions de crises ministérielles, sous lesquelles il n'est pas difficile de reconnaître de mesquines personnalités.

Chronique et Faits divers.

M. le général Changarnier, accompagné du général Perrot, commandant supé-rieur des gardes nationales, et de ses aides-de-camp, s'est rendu hier, à une heure, au Champ-de-Mars, où se trouvait rangée en bataille une partie des troupes de la division Guillabert, de l'armée de Paris.

La 1re brigade, sous les ordres du général François, se composait des 5o léger et 25 de ligne; et la 2o brigade, sous les ordres du général Forey, des 58° et 61° de ligne.

Le 5o régiment de hussards, qui vient d'arriver pour tenir garnison à l'EcoleMilitaire, était présent.

Le général en chef a passé devant le front des troupes et s'est arrêté longtemps pour des questions de détail. Il a fait manœuvrer le 5o hussards, et le défilé s'est effectué avec une remarquable précision.

M. le général Changarnier a passé ensuite la revue d'un escadron de la garde républicaine et d'un escadron du 1er de lanciers, qui se trouvaient sur le terrain pour faire la police du Champ-de-Mars.

-Le procureur de la République a fait saisir aujourd'hui à la poste et dans ses bureaux le journal la Voix du Peuple, à raison de la publication d'une Pétition aux membres de l'Assemblée législative, et sous la triple inculpation d'excitation à la haine et au mépris du gouvernement de la République, d'attaque contre les droits de l'autorité et de l'Assemblée nationale, et de provocation à la désobéissance aux lois. Les poursuites sont également dirigées contre les signataires de cette pétition.

Une feuille de Bruges dit pouvoir assurer que le R. P. de Ravignan prêchera à la cathédrale le 14 de ce mois. Cette nouvelle ne peut être sans intérêt pour nous, puisque la santé de l'illustre prédicateur l'avait empêché de monter en chaire au jour fixé.

Nous empruntons à l'Evénement les lignes suivantes, dont nous lui laissons la responsabilité :

Il n'est bruit, depuis quelques jours, que de la conclusion des arrangements projetés depuis longtemps pour la fusion des intérêts et des droits de la maison de Bourbon. On attribue à deux des ministres de Louis-Philippe dans le cabinet du 28 octobre l'honneur d'avoir mené à fin ces négociations dont, à ce qu'on assure, les moindres détails ont été communiqués à l'Elysée, il y a quelques jours, par un personnage très-connu.

Aujourd'hui, on disait que des lettres de Londres annonçaient une prochaine

réunion, soit en Allemagne, soit en Italie, du duc de Bordeaux et du comte de Paris. ›

— L'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres a procédé hier au remplacement de M. Edouard Biot. Après trois tours de scrutin, M. Vincent a été élu par 23 voix sur 57 votants.

-

Le savant Gay-Lussac vient de mourir. Ses obsèques ont eu lieu à l'église Saint-Médard. On y remarquait, outre une voiture de M. le Président de la République avec un de ses aides-de-camp, des députations de tous les corps savants et de l'Ecole polytechnique.

Les dépêches de M. le gouverneur du Sénégal, datées des 4 et 16 mars, viennent de parvenir à M. le ministre de la marine et des colonies.

Elles annoncent la conclusion favorable du différend survenu entre la colonie et les maures Trarzas, et la complète cessation des hostilités partielles qui étaient du fait de quelques tribus isolées et indisciplinées. Les pillards ont été partout repoussées, avec perte, des environs de Saint-Louis et des bords du fleuve, par la garnison aidée des Laptots sénégalais.

Ces agressions ont, d'ailleurs, été désavouées par le chef des Trarzas, qui, dans une entrevue avec le gouverneur, a donné des explications satisfaisantes et des gages de conciliation pour l'avenir.

La pacification du bas Sénégal, succédant à celle du Fonta et du pays de Galam, a rendu toute sécurité aux opérations de la traite des gommes sur les escales du fleuve.

Le gouvernement donne la plus entière approbation à la conduite éclairée et mesurée avec laquelle M. le capitaine de vaisseau Boudin a honorablement prévenu un conflit qui pouvait amener une longue perturbation dans les affaires commerciales de la colonie.

VARIÉTÉS.

DES AVEUGLES, par P. A. DUFAU, directeur de l'Institution nationale des Aveugles de Paris. - Ouvrage couronné par l'Académie française.

Il est parmi les infortunés peu d'êtres qui aient à notre compassion des titres aussi légitimes que les aveugles de naissance, ces pri sonniers dans l'univers, comme le disait d'une manière si saisissante et si mélancolique un d'eux, le docteur Blacklock. Subissant jusqu'à leur dernière heure cette captivité sans espérance qui les suit par tout, plongés dans des ténèbres infranchissables auxquelles les con damne la nature et dont l'homme ne peut les délivrer, ils sont dans une dépendance continuelle de tout ce qui les entoure, ils viventiso lés au milieu de ce monde qu'ils n'ont jamais vu, et que jamais ils

ne verront.

Toutefois ces malheureux, comme tous ceux qui souffrent, ont du attendre, pour que la société s'occupât de leur sort, l'avènement de cette religion d'où date toute vertu comme toute vérité. Quand eut cessé le chaos qui suivit les invasions des Barbares, et qui dura pendant la première moitié du moyen âge, ce fut un saint, et un saint

français, saint Louis, qui fonda pour les aveugles le premier établissement spécial, l'hospice des Quinze-Vingts, et ce fut le chef de la chrétienté, Clément IV, qui, par une bulle de 1265, se chargea de recommander cette pieuse fondation à l'attention et à l'imitation du monde chrétien.

Malheureusement, depuis lors, malgré les efforts tentés, la progression dans les secours n'a pas été suffisante pour atteindre le niveau des besoins. Le croirait-on? aujourd'hui, à notre époque de chiffres, de tableaux et de statistiques, on ne sait même pas encore quel est en France le nombre des aveugles. Des recensements faits à plusieurs reprises sur le même sujet dans les pays voisins, tels que la Prusse et la Belgique, et des documents partiels recueillis dans quelques-uns de nos départements, notamment dans celui de la Seine-Inférieure, on peut conclure d'une manière fort probable que le nombre des aveugles dans notre pays ne doit pas être moindre de 26,000. Eh bien, sur ces 26,000 on instruit moins de 200 enfants, et on secourt environ 800 adultes.

L'établissement des Quinze-Vingts, détourné de sa destination primitive, a cessé d'être un hospice pour devenir un asile ouvert à des ménages dont l'un des époux au moins est privé de la vue. La France possède une seule de ces maisons, où les aveugles trouvent un travail approprié à leurs facultés, et qui sont répandues en assez grand nombre dans quelques états de l'Europe. Elle a été fondée en 1841, et, il y a deux ans, elle n'occupait que 13 ouvriers. Enfin, l'Institution des aveugles, dont le fondateur fut Valentin Haüy, et qui fut érigée en institution nationale en l'an III, donne une instruction générale et une instruction professionnelle à 170 élèves. Deux maisons semblables existent à Lille, renfermant environ 25 enfants, et une à Rodez.

En présence du bien qui s'opère d'une manière merveilleuse mais trop restreinte, et de l'étendue du bien qui reste à accomplir, un homme qui vit depuis longues années au milieu des aveugles, M. Dufau, directeur de l'institution de Paris, s'est senti pressé d'élever la voix en leur faveur. « Faire bien connaître la position anormale de « l'aveugle, dit-il en exposant lui-même le but de son livre, prou« ver son droit à devenir un objet de bienfaisance sociale quand se « joint à son infirmité, comme il arrive si fréquemment, l'indigen«ce; montrer enfin comment le fardeau qui se trouve imposé de la « sorte à la communauté peut être presque entièrement annulé par un « système d'éducation spéciale et d'établissements bien entendus, voilà « ce que je me suis proposé dans cet écrit. » Le problème qu'il se pose consiste à replacer dans la vie commune des êtres pour qui cette vie semblait impossible. La solution est précédée de ce qui doit naturellement la préparer, c'est-à-dire d'une étude complète, intéressante, instructive sur les aveugles considérés dans leur état physique, moral et intellectuel, et d'un exposé des méthodes successive

ment employées et actuellement en usage dans les divers établissements consacrés aux aveugles en Europe et en Amérique.

La conclusion à laquelle arrive l'auteur est celle-ci : Les aveugles sont victimes du préjugé qu'on ne peut les instruire et qu'ils ne peuvent tirer aucun parti réel de leur travail. Le meilleur moyen de leur venir en aide, serait de les soumettre, relativement à certains points qu'il indique, à l'éducation commune, et d'ouvrir, pour compléter seulement cette éducation, quelques établissements spéciaux dans les principales cités (1).

« Ces établissements, dit-il, admettraient le principe de l'externat « et en favoriseraient même le développement. Rendre les aveugles « à la famille et leur offrir simplement un lieu où ils peuvent em«ployer leur temps en commun à des travaux lucratifs, tel est après a tout le but auquel on doit tendre. Là est le moyen d'obtenir le « double avantage de rendre les établissements moins onéreux à la a société qui en supporte le poids, en même temps qu'ils procurent « de meilleures conditions d'existence à ceux qu'on y admet, et qui « sont de la sorte dotés des douceurs du foyer domestique.» « Si « maintenant nous tournons notre attention sur les moyens de réaaliser ces utiles et bienfaisantes institutions, nous verrons qu'elles « n'imposeraient aux localités qu'une charge bien légère et plus que <«< compensée assurément par les avantages qui en résulteraient. D'a« bord, il n'est guère de villes un peu importantes qui n'aient à leur << disposition un local convenable pour cette destination. On peut

calculer ensuite, d'après ce que l'établissement de Paris dépense « en confection de livres, caractères, tableaux, essais divers, etc., <«< tous frais dont les asiles ne seraient pas chargés, combien la dé<«< pense serait faible pour plusieurs départements qui y contribue<raient en commun, soit par la fondation de bourses, soit par une << allocation annuelle ou de toute autre façon. L'Etat pourrait y conacourir pour une portion; mieux serait encore d'appeler les citoyens « à former des associations de bien public, dans le but de fonder de «tels établissements. »

Un semblable vou, il faut l'espérer, se réalisera. Dans notre pays les inspirations généreuses de la charité ne sauraient rester sans écho, et il se trouvera des hommes qui voudront compléter et étendre à un plus grand nombre de ces infortunés le bien que nos aïeux ont été les premiers à leur faire. 0. DUCROS De Sixt.

(1) Un médecin, d'une charité égale à sa science, M. le docteur Ratier, a ouvert à ses frais un asîle et école gratuite pour les pauvres petits aveugles du douzième arrondissement de Paris, sous le nom d'asile Saint-Hilaire, Cet asile peut être aisément imité, et mérite tous les éloges.

L'un des Propriétaires-Gérants, CHARLES DE RIANCEY.

Paris, imp. BAILLY, DIVRY et Comp., place Sorbonne, 2,

MARDI 14 MAI 1850.

(N° :047.);

L'AMI DE LA RELIGION.

De l'élection au conseil de l'instruction publique.

Le Moniteur de ce jour contient un Rapport de M. le ministre de l'instruction publique, au Président de la République, sur l'exécution de l'article 1er de la loi de l'enseignement. Nous reproduisons textuellement cet important document, avec le Règlement d'administration publique dont il est suivi :

La loi organique du 15 mars 1850, relative à l'enseignement, n'est exécutoire qu'à dater du 1er septembre prochain. Mais l'art. 84 de cette loi autorise le gouvernement à convoquer le conseil supérieur de l'instruction publique avant cette époque, s'il le juge nécessaire. Pour que cette faculté ne soit pas illusoire et puisse être exercée en vue d'un besoin donné, il importe de régler dès aujourd'hui le mode de nomination des membres de la haute magistrature préposée par la nouvelle loi à la surveillance de l'enseignement national.

Quoique la loi soit muette à cet égard, j'ai pensé qu'une question aussi grave devait être soumise à l'examen du conseil d'Etat. Il s'agit, en effet, de l'exercice de droits et de l'accomplissement de devoirs tout à fait nouveaux. Les formes d'une élection multiple, qui n'a pas de précédents dans notre législation, et dont les conséquences intéressent à un si haut degré l'éducation de la jeunesse et l'avenir du pays, ne sauraient être entourées de aranties trop sérieuses.

« J'ai l'honneur de soumettre à votre sanction le projet de règlement que le conseil d'Etat a préparé à cet effet, sur mon initiative.

L'examen le plus rapide des dispositions de l'art. 1er de la loi du 15 mars 1850 amène à reconnaître la nécessité de conditions différentes pour les diverses élections que suppose l'organisation définitive du conseil supérieur de l'instruction publique.

« D'un côté, sont des autorités ecclésiastiques préposées à des circonscriptions embrassant tout le territoire de la République, autorités qui n'ont presque jamais été réunies en assemblée générale, trop éloignées les unes des autres pour concerter aisément les choix qu'elles sont appelées à faire, et pour qui, d'ailleurs, la délibération préparatoire sur les formes de cette élection serait, dans l'état de leurs relations actuelles, entièrement impossible.

De l'autre côté, sont des corps dont les membres ont l'habitude de se réunir et de délibérer en commun, et dont l'autorité s'exerce sous la condition de cette réunion même.

De cette diversité profonde dans les situations dérivait la nécessité de règles différentes. S'il était possible de renvoyer aux dispositions de leurs règlements ou usages intérieurs le conseil d'Etat, la cour de cassation et l'Institut habitués à des élections ayant quelque analogie avec celle qui va leur être demandée, il devenait, au contraire, indispensable de prévoir avec détail et presque avec minutie les formes de l'élection des Evêques et des membres des consistoires; non pour imposer des entraves aux autorités religieuses dans l'exercice du droit que la loi nouvelle leur confère, mais pour parer aux conséquences de l'isolement qui ne leur permet pas de suivre à cet égard un règlement délibéré entre elles et L'Ami de la Religion. Tome CXLVII.

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