Page images
PDF
EPUB

pleurez-vous? Est-ce donc un si grand mal de mourir? Je ne redoute pas la mort. Sans doute, j'ai beaucoup à craindre de la justice de Dieu, mais j'espère tout de sa bonté! » Avant de communier, M. de Courson voulut adresser encore quelques mols à la communauté représentée par MM. les directeurs de Saint-Sulpice et par quelques séminaristes. Ses paroles, toujours empreintes de tant de bonté et de douceur, touchèrent bien profondément, en ce moment suprême, le cœur de ceux qui assistaient à cette douloureuse scène, lorsqu'ils l'entendirent demander pardon à tous des scandales qu'il avait pu leur donner, et exprimer sa tendre affection pour ses enfants.

Le danger n'était pas aussi immédiat qu'on l'avait cru d'abord; Dieu voulait préparer M. de Courson, par la patience à supporter les ennuis d'une longue maladie, aux douleurs qui consommèrent son sacrifice.

Les derniers jours de la vie de M. de Courson mirent en quelque sorte à nu le fond de son cœur si plein de tendresse, de bonté et d'exquise délicatesse.

Il était sans cesse occupé de ses amis. Il leur faisait écrire pour les remercier de leur affection, pour les assurer de la sienne. Dès qu'un de ses confrères entrait dans sa chambre, il lui tendait la main et exprimait sa joie de le voir. Aux médecins qui le soignaient, il témoignait tant de bonté et de reconnaissance, que ces messieurs avaient conçu pour leur malade un attachement plein de vénération. L'un d'eux, voulant récompenser le plus jeune de ses fils, enfant de quatorze ans, de sa bonne conduite, le conduisit auprès du lit du vénérable Supérieur pour qu'il le bénît.

Comme M. de Courson, après avoir embrassé l'enfant étendait sur lui la main, le père se jeta aussi à genoux disant qu'il espérait bien que la bénédiction serait pour tous les deux.

[ocr errors]

Pendant deux ou trois jours, il y eut une sorte d'amélioration dans l'état de M. de Courson. On crut un moment que Dieu avait exaucé les ferventes prières faites à son intention dans plusieurs communautés, à Paris, à Nantes et dans d'autres villes de France. Mais Dieu avait d'autres desseins sur cette âme qui lui appartenait tout entière depuis si longtemps. Le mieux qui s'était manifesté fut de bien courte durée. La faiblesse du malade s'accroissait de minute en minute : des symptômes très-graves se manifestaient. A la suite d'une dernière consultation, M. de Courson fit approcher de son lit le docteur C... et lui demanda à l'oreille : « Dois-je mourir cette nuit? »—M. C... lui répondit avec une vive émotion : « Cela est possible, mais cela n'est pas certain. »- Aussitôt le malade se prépara à une mort prochaine, et son esprit s'éleva à une hauteur de méditation qui pénétra d'admiration tous les assistants. Ce fut dans ce moment que jaillit, toute brûlante, du cœur du vénérable Supérieur, une prière qui s'est gravée dans plus d'une mémoire, et dans laquelle ce père plein de

[ocr errors]

tendresse invoquait pour ses enfants le secours et l'assistance de Dieu. Il lui demandait, entre autres grâces, de conserver la Compagnie de Saint-Sulpice dans sa simplicité, d'éloigner à jamais d'elle l'amour des nouveautés, de la maintenir toujours dans un esprit de dépendance et d'obéissance filiale pour notre Saint-Père le Pape, et pour les Evêques. Il exprima de nouveau son attachement pour toutes les communautés religieuses, et spécialement pour les membres de la Compagnie de Jésus, a ces vrais serviteurs de Dieu qu'il faut beaucoup honorer. >>

Après cela, le bon Supérieur fit des recommandations spéciales au sujet de quelques souvenirs qu'il voulait laisser à des parents ou à des amis, et il témoigna le désir de voir tous ses confrères du séminaire de Paris réunis auprès de lui afin de leur adresser ses derniers sadieux. Ce fut pour tous un spectacle bien touchant. Transporté dans un fauteuil en face de la statue de la sainte Vierge et du cœur de M. Olier, M. de Courson reçut des mains de M. Carbon l'absolution et l'inclulgence plénière in articulo mortis; puis, ayant baisé le cœur de M. Olier, il récita la prière: 0 Jesu vivens in Maria! pour la communauté, et il bénit tous les directeurs présents ainsi que tous les séminaires de province. Il semblait que Dieu n'entretenait quelques restes de vie dans le corps brisé du vénérable prêtre que pour l'édification de ses enfants et l'accroissement de ses mérites. Il souffrait des douleurs indicibles, mais c'était avec un calme, une sérénité dont on ne se peut faire une idée. Il avait fait mettre son chapelet autour de son cou avec son scapulaire et une croix; et, malgré l'altération profonde de ses traits contractés par d'intolérables souffrances, je ne sais quoi de souriant rayonnait dans son regard, et son visage s'était empreint d'une expression de béatitude qui a fait l'admiration de tous ceux qui l'ont approché. Dans le cours de la journée, au milieu des angoisses de son agonie, M. de Courson sut encore trouver quelque force pour consoler les uns et adresser de sages avis aux autres. Faisant approcher l'un de ses parents agenouillé auprès de son lit, il l'exhorta à vivre toujours en bon chrétien et à placer en Dieu toute sa confiance : « Ne craignez rien, lui dit-il, servez Dieu et Dieu vous « bénira!»

Un séminariste que le bon Supérieur avait connu tout jeune, s'étant approché pour aider à soutenir le malade qui souffrait en ce moment d'atroces douleurs : « Cher enfant, lui dit M. de Courson, vous avez un bon cœur, mais prenez garde à votre tête. »

Jusqu'au dernier moment, cet excellent père se préoccupait de l'avenir de ses enfants bien-aimés!

Le soir, les douleurs devinrent plus vives que jamais. Elles arrachaient au malade des cris involontaires. Mais bientôt, maître de lui-même, il s'écriait : « Mon Dieu ! que mon agonie se prolonge autant que vous voudrez; j'accepte tout de votre main, j'en ai mérité bien davantage. »

Les crises se succédèrent rapidement jusqu'à neuf heures du matin. Quelques instants après, le vénérable Supérieur essaya de faire le signe de la croix, et appliqua ses lèvres sur le crucifix. Les crises cessèrent en ce moment. Le pieux malade ferma doucement les yeux et inclina un peu la tête : il avait cessé de vivre!

L'annonce de cette mort fut accueillie non-seulement à Saint-Sulpice, mais dans tout le clergé de Paris avec une douleur profonde. Mgr l'Archevêque de Paris, qui avait visité plusieurs fois M. de Courson pendant sa maladie, s'empressa de venir prier auprès de ses dépouilles mortelles.

Les obsèques se firent le surlendemain à la chapelle du séminaire. On y remarquait les Evêques de Meaux et d'Orléans, les vicaires-généraux du diocèse, les supérieurs de toutes les communautés ecclésiastiques et religieuses, le P. provincial des Jésuites, le R. P. Lacordaire, prieur des Dominicains, le vénérable M. Langlois, supérieur du séminaire des Missions-Etrangères, etc. La messe finie et l'absoute faite, le corps fut porté processionnellement à Issy et déposé au cimetière de Notre-Dame-de-Lorette aux pieds de M. Duclaux, où M. de Courson avait désigné sa place, pour témoigner de son respect filial et de sa tendre reconnaissance pour l'homme qui l'avait admis au séminaire et dans la Compagnie de Saint-Sulpice.

Le cœur du vénérable Supérieur, demandé avec instance par Messieurs les ecclésiastiques du séminaire de Nantes, a été transporté dans cet établissement, auquel le saint abbé de Courson avait consacré, on le peut dire, et son dévouement et sa vie. A l'arrivée de ces restes précieux, Mgr Jacquemet, ce pieux Evêque si bien fait pour comprendre l'âme de M. de Courson, adressa au clergé de son diocèse cette lettre qui a paru aux Bretons la plus touchante des oraisons funèbres :

« L'Eglise de Nantes est en deuil. Nous pleurons, avec la Société de SaintSulpice qui nous est tous les jours plus chère, M. Louis DE COURSON, son supérieur-général, et, depuis vingt-sept ans, vicaire général de ce diocèse. Vous pleurez tous, avec moi, un ami d'un conseil sûr, de l'affection la plus tendre, du dévouement le plus généreux. Pour le plus grand nombre d'entre vous, comme pour moi, son souvenir se rattache aux jours bénis de notre séminaire, au berceau de notre sacerdoce; et, depuis cette époque, aucun de nous ne l'a revu sans sentir se resserrer encore les liens qui nous unissaient à lui.

Je l'aimais bien avant de venir parmi vous : mais depuis que j'ai trouvé par tout, dans ce diocèse, les traces de sa salutaire influence; dans tous nos établis sements, des preuves de son admirable sagesse et de sa charitable munificence; dans tous vos cœurs surtout, quelques traits de sa bonté gravés en traits ineffaçables, je l'ai aimé bien plus encore. Mon affection s'était augmentée de toute la reconnaissance que je dois à ceux qui vous font du bien; et maintenant mon âme est triste, parce que nous l'avons perdu. Je sais bien qu'une grande gloire lui est assurée dans le Ciel, que la mort à été pour lui un gain: mais combien il nous était encore nécessaire! et qu'il m'était doux de m'appuyer sur lui pour procurer le salut de mon cher troupeau!

Nous bénirons tous ensemble, Monsieur le curé, la Société de Saint-Sulpice, qui apporte un adoucissement à notre douleur, en nous accordant le cœur de notre vénérable ami; ce cœur qui nous a tant aimés et qui, de loin, tressaillait et battait plus fort, je le sais, au seul souvenir de Nantes; ce cœur dont les dernières pulsations se sont éteintes, la bonne Providence l'a permis, entre les bras et sur le cœur des prêtres nantais qui se sont succédé auprès de lui.

« Je vous appelle, Monsieur le curé, à venir recevoir avec moi et entourer de votre tendre vénération, cette précieuse portion de ses dépouilles mortelles. Le jeudi 18 avril, nous en ferons la translation à la chapelle du séminaire des Philosophes, après un service solennel, qui aura lieu au grand séminaire : et mardi 23, aupt nous célébrerons, dans l'Eglise cathédrale, avec notre chapitre, dont M. de Courson était membre, un autre service, auquel pourront assister ceux d'entre vous que leurs occupations auraient retenus, pendant la semaine précédente.

Tous nous offrirons, pour ce mort bien-aimé, le saint sacrifice de la messe ; et en priant le divin Maître de purifier son âme de ses dernières taches, nous n'oublierons pas de le remercier de toutes les grâces dont il l'avait comblée. Nous méditerons, dans le secret de nos cœurs, ses exemples, ses leçons, ses conseils; et nous aimerons à aller prier dans cette chapelle, qui possèdera déssormais un des riches trésors de notre Eglise.

Les journaux de Nantes ont raconté à la Bretagne la touchante cérémonie de la translation du cœur de M. de Courson au grand séminaire de cette ville. L'une de ces feuilles, l'Hermine, termine Ib ainsi le récit qu'elle fait de cette translation:

[ocr errors]

«Qui a gagné tous les cœurs à M. de Courson?... Est-ce à son anom, à sa fortune, à ses dignités qu'on doit l'attribuer ? L'accident et de la naissance a pu sans doute donner du relief à ses vertus. Mais ace qui a rendu notre aimable et saint prêtre si recommandable, c'est sa bonté d'âme, son inaltérable douceur, sa profonde humilité. C'est par là qu'il s'est montré à nos yeux la vivante image de saint François de Sales. »

le

AURÉLIEN DE COURSON.

On nous a priés d'annoncer dans l'Ami de la Religion la Compagnie générale d'assurances sur la vie, établie à Londres sous le nom de LA CATHOLIQUE, et qui vient de fonder une agence à Paris.

les

La confiance dont veulent bien nous honorer beaucoup de nos abonnés nous imposait uue extrême réserve, et par là même que nous ne cessons de répéter que nous ne prenons en aucune façon la responsabilité des annonces placées sur pages de la couverture de nos numéros, nous ne pouvions nous exposer à donner place dans le corps du journal à une de ces compagnies redoutables à leurs actionnaires, et dont les abus ont dernièrement été signalés au pouvoir législatif. Nous nous sommes donc entourés de précautions, nous avons consulté, et enfin, trouvant parmi les cautions du bon emploi des fonds de la Compagnie le nom vénéré de Mgr Wiseman, vicaire apostolique de Londres, nous avons pris la liberté d'écrire à l'illustre Prélat.

Sa Grandeur a daigné nous répondre «qu'il est réellement un des patrons d'une Compagnie catholique formée à Londres...; que cette Compagnie compte parmi ses membres ce qu'il y a de plus respectable dans le catholicisme anglais. >>

Ce témoignage nous permet d'annoncer, sans engager imprudemment notre responsabilité, l'établissement de LA CATHOLIQUE en France.

Ce n'est point une opération tontinière où chacun ne peut supputer ses gains que d'après le décès de ses associés, véritables loteries dont l'enjeu est la vie; c'est une assurance mutuelle qui « permet de faire produire à une vie abrégée par les infirmités ou par le temps les mêmes resultats qu'une vie longue et laborieuse eût pu produire. » Ainsi, pour nous expliquer par un exemple, un homme qui peut économiser 500 fr. par an, laissera, après vingt années de privations, 12,500 fr. Mais qui peut répondre de vingt ans ? Que s'il a recours à l'assurance, il verra qu'en commençant à vingt-cinq ans le versement annuel de 530 fr., il garantira à sa famille 25,000 fr., non pas après vingt ans, mais dans l'heure même qui aura succédé au versement de la première prime, si, par une cause quelconque, il venait à succomber si rapidement.

Il est pas inutile de nous étendre sur les avantages que présentent, aux personnes dont le travail est nécessaire à l'existence de toute une famille, ces combinaisons dont les conditions varient suivant l'âge et les résultats qu'on se propose d'obtenir.

Ainsi, l'assurance peut se faire sur deux têtes; on peut, par le versement d'une prime unique, assurer à soi ou à ses héritiers, ou une rente viagère à un âge déterminé, ou une somme convenue à l'époque de son décès en quelque temps qu'il survienne. La prime peut être annuelle, semestrielle, trimestrielle. Elle peut être temporaire, c'est-à-dire se verser pendant un nombre déterminé d'années, après lesquelles le souscripteur, soit qu'il s'agisse d'une rente viagère, soit d'une assurance sur la vie entière, n'a plus aucun versement à faire. Ce mode convient aux hommes occupant des emplois, et qui ont à prévoir la diminution de leurs ressources futures. La prime est encore ascendante, descendante, en sorte que chacun peut la calculer sur l'état probable de ses revenus à telle ou telle époque de sa vie.

Les combinaisons relatives aux rentes viagères nous ont paru particulièrement avantageuses.

L'agence établie à Paris n'est qu'un simple intermédiaire entre les souscripteurs et la Compagnie de Londres. Elle ne reçoit même pas les fonds qui sont déposés chez nos banquiers, et se borne à faire remplir les formalités exigées par les

statuts.

M. Lhuillier de Létang (21, rue Louis-le-Grand), délégué de la Compagnie, a fait paraître un opuscule intitulé: Du bien-être de nos vieux jours et de l'avenit de nos enfants, où il développe les avantages de l'assurance et fait ressortir son côté moral; car si c'est pour l'homme chargé d'une famille un devoir de subvenir à ses besoins, c'en est un aussi de la prémunir contre les chances de misère dont la peut menacer la mort soudaine de celui dont le travail la soutient.

BOURSE DU 10 MAI.

(Voir aux Annonces.)

Le 5 p. 100, 88 85 à 89 25. Le 3 p. 100, 55 10 à 55 50. —Actions de la Banque, 2,070 00. Obligations de la Ville, 1,270 00. - Nouvelles Oblig tions, 1,127 50.5 p. 100 belge, 98 118. Emprunt romain, 79 114.

[ocr errors]

L'un des Propriétaires-Gérants, CHARLES DE RIANCEY.

Paris, imp. BAILLY, Divry et Comp., place Sorbonne, 2.

« PreviousContinue »