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la souveraineté temporelle des Pontifes romains s'élevât dans le monde comme une institution européenne, universelle, catholique en un mot, en sorte que Rome devînt, selon l'expression de l'illustre Archevêque de Cambrai, la commune patrie de tous les chrétiens, et que tous les chrétiens puissent se dire les concitoyens de Rome. »

Mgr l'Evêque de GAP rappelle la voie douloureuse que Pie IX a dû traverser avant de remonter sur ce trône d'où il avait déjà répandu tant de bienfaits sur ses peuples :

<< Pendant dix-sept mois, notre bien-aimé Pontife a bu jusqu'à la lie le calice amer de l'ingratitude; il a pu contempler les ravages causés dans ces esprits déjà malades par les doctrines subversives de tout ordre et de toute liberté; il a pu entendre tomber une à une les sages et libérales institutions dont il avait doté un peuple trop faible pour les porter, trop lâche pour les défendre; il a vu mettre au ban de l'opinion publique, dénaturés et travestis, ses actes les plus généreux, ses pensées les plus pures; il a vu la ruine et la dévastation de sa capitale, l'assassinat de ses plus fidèles sujets; et, durant les longs jours de l'exil, chaque flot qui venait battre les murailles de son palais de Gaéte apportait à son oreille et à son cœur une nouvelle plainte, de nouvelles larmes de cet Etat romain, livré en proie à l'anarchie et à la misère. Qui pourrait dire, N. T. C. F., ce que son âme magnanime a souffert à ces tristes et lamentables spectacles! >> Mgr l'Evêque de MONTPELLIER s'écrie, dans le même sentiment : «Certes, elles n'ont pas manqué les tempêtes à ces deux années qui prennent fin, et le calme et la joie viennent bien après de pareils orages, après de si poignantes douleurs! Tout a été vu dans cette tourmente, et le serviteur a trouvé, le long de la route de son Calvaire, tout ce que le Maître avait trouvé le premier le long du chemin qui le menait au sien ! »>

En présence de ce déplorable spectacle, l'espérance chrétienne n'a cependant pas failli, et Mgr l'Evêque du Puy le rappelle avec bonheur :

«Quand nous vous racontions, Nos très-chers Frères, il y a environ dix-huit mois, les tribulations du Souverain-Pontife, et que nous vous demandions vos prières pour ce Père bien-aimé, nous avions la ferme confiance que Dieu ne délaisserait pas son Eglise, et qu'il rendrait à son Chef visible une indépendance qui est indispensable à l'exercice de son autorité sur tous les membres de la famille chrétienne. Cette con¡fiance, fondée sur les leçons de l'histoire, et bien plus encore sur les promesses du Fils de Dieu, n'a pas été trompée : le Saint-Père vient de rentrer dans ses états, et les colines de la ville éternelle ont renvoyé jusqu'à nous les acclamations et les élans d'amour qui ont accueilli sur son passage et à son entrée dans Rome le Pontife immortel qui ramène dans le cœur de son peuple l'espérance et la joie, et qui vient de l'exil avec le désir de réparer les ruines amoncelées autour de lui par la tyrannie et l'impiété. » Mgr l'Evêque de BEAUVAIS redit à son tour quelles étaient alors les espérances des ennemis de l'Eglise, les craintes mêmes de quelquesuns de ses enfants. Il montre combien les unes et les autres étaient vaines :

«Certes, à nos yeux, aux yeux de tous ceux qui ont étudié les desseins de la Providence dans les événements du passé, ces conjectures et ces prophéties étaient plus que téméraires. Mais pourtant combien ne pouvaient-elles pas paraître fondées, au moment où elles retentissaient autour de nous ! Les Romains, tels que nous pouvions les apercevoir à distance, se montraient si légers, si peu courageux, si ingrats: quel espoir y avait-il qu'ils comprissent jamais leurs véritables intérêts et qu'ils acceptassent la domination pacifique de leur auguste prince? Le mouvement, qui entraînait les populations italiennes à la poursuite de formes gouvernementales que le Pape ne pouvait adopter, était si violent et semblait si unanime; les vues des cabinets européens étaient si différentes et en apparence si inconciliables; le principe politique qui a prévalu en

France était lui-même, du moins on le disait, si opposé à toute intervention directe et efficace en faveur du Roi-Pontife: comment croire à une restauration que tant d'obstacles empêchaient et paraissaient rendre impossible?

« C'étaient là les tristes prévisions de ceux qui ne demandaient les secrets de l'avenir qu'aux calculs de la sagesse hnmaine; et bien des chrétiens, au cœur faible et timide, se prenaient eux-mêmes à trembler en présence de cette grande épreuve, et ils se défendaient mal contre le doute et la défiance, et ils oubliaient, dans leur déplorable anxiété, de lever les mains vers Celui qui commande aux vents de s'apaiser et qui sait affermir les flots sous les pas de Pierre, du Chef de son Eglise.

<< Mais que Dieu réservait une belle et magnifique surprise à ces craintes, à ces doutes et à ces témérités hautaines!.. Où sont, à l'heure qu'il est, les obstacles et les impossibilités? Que deviennent en ce moment tant de prédictions impies sur la déchéance de la Papauté?.. Le Pape est à Rome, le Pape est au Vatican, et il y règne dans la plénitude de sa double souveraineté spirituelle et temporelle.>>

Mgr l'Evêque d'AJACCIO exprime avec la même effusion une semblable allégresse et il y joint ces sages avertissements :

«Que la joie cependant ne nous enivre pas, au point de ne pas voir que nous voguons toujours sur une mer orageuse. Songeons que les nuages sont toujours amoncelés au fond de l'horizon, et que la tempête qu'il a plu à Dieu de dissiper, si son bras ne continuait de nous protéger, pourrait bien, de rechef, éclater sur nos têtes. N'oublions pas que le calme ne sera parfait, l'avenir plein de sécurité pour tous, que lorsque les passions qui ont soulevé les flots, s'apaiseront elles-mêmes; lorsque tant d'enfants, séduits et égarés, qui ont, sans le savoir, déchiré le flanc qui les a portés, reviendront pleinement de leurs erreurs passées, et qu'au lieu de conjurer contre leur mère, ils formeront, par leur attachement et leur docilité, sa consolation la plus douce et sa plus riche couronne. »>

Il appartenait à Mgr l'Evêque d'ANGERS de réclamer, au nom de son pieux diocèse et de la noble province d'Anjou, une part spéciale dans la gloire d'une entreprise dont la décision a été due à M. de Falloux et l'exécution à M. le général Oudinot :

«Nos cœurs saignent encore, dit le vénérable Prélat, au souvenir des outrages auxquels Pie IX fut exposé jusque dans son propre palais. Nous le suivions avec anxiété lorsqu'il se dérobait par la fuite et cherchait le salut sur une terre étrangère. Nos vœux l'accompagnaient; nos cœurs l'appelaient, car un moment, vous le savez, nous eûmes l'espérance de voir l'illustre exilé demander un asile à notre France. Une autre contrée plus heureuse devait avoir l'honneur de lui offrir l'hospitalité; mais une tâche non moins noble fut réservée à notre chère patrie, celle de lui offrir son dévouement et son bras; et ce fut un des enfants de notre Anjou, de cette terre de la fidélité et de la foi, qui défendit la sainte cause de la papauté et lui prêta l'appui de son talent; comme aussi plus tard ce fut le brave capitaine que la confiance de notre département appela toujours à le représenter, qui reçut l'insigne et honorable mission de guider nos phalanges sous les murs de la ville éternelle. Ne convenait-il pas, en effet, qu'au pays qui porta si longtemps le nom de royaume très-chrétien, fût réservé le privilége de consolider l'œuvre des Pepin et des Charlemagne ; et la statue du grand empereur, veillant à la garde du temple sous le pérystile de la basilique de Saint-Pierre, ne se sera-t-elle pas ranimée en voyant encore les généreux enfants de la France payer au Père commun leur dette de foi et d'amour? »

Nous regrettons que l'espace nous manque pour citer également plusieurs des circulaires, par lesquelles d'autres Evêques ont ordonné des Te Deum, pour ce grand et à jamais mémorable événement. Qu'il nous soit permis seulement de signaler les lettres de Mgr l'Archevêque de ROUEN, de NN. SS. les Evêques de BAYEUX, de FRÉJUS, de LIMOGES, etc., etc.

Nous devons faire remarquer d'une façon toute particulière l'importante appréciation que Mgr l'Archevêque de Paris a tracée de la loi sur l'enseignement, dans le préambule des statuts de l'œuvre dont nous avons donné connaissance avant-hier. Cette appréciation a, dans la bouche du vénérable Prélat, une haute gravité : elle est de tout point conforme à ce que nous avons toujours pensé et dit nousmêmes, à la suite des plus éminents défenseurs du projet au sein de l'Assemblée nationale :

• Nous n'avons cessé, pendant vingt ans, de demander la liberté d'enseignement. Nous étions persuadés, et nous le sommes encore, que, sans ce remède, il n'y avait nul espoir de sauver ce pays.

Eh bien! ce que nous avons demandé avec tant d'instances et durant si longtemps, VIENT DE NOUS ÊTRE ACCORDÉ. Une loi, qui n'est pas parfaite sans doute, nous donne au moins cette faculté, qui est ESSENTIELLE ET QUI EST AU FOND PRESQUE TOUTE LA LIBERTÉ QUE NOUS DEMANDONS, de fonder des écoles et de les diriger, sans qu'une volonté arbitraire et toute-puissante puisse désormais paralyser nos efforts. »

En rapprochant ces graves paroles de la cession faite à Mgr l'Evêque de Nantes du collége d'Ancenis; en constatant les efforts nombreux qui sont déjà consacrés à la fondation, au maintien, au développement d'établissements d'instruction libre et chrétienne, nous ne pouvons que nous confirmer dans la pensée du bien réel et pratique qui sortira de cette loi tant attaquée, si les catholiques, si l'Eglise veulent bien accorder à l'ordre social l'appui et le concours qui sont réclamés d'eux.

A la suite de ces faits, nous ajouterons, à titre de contraste, les réflexions dont l'Univers a cru bon de faire précéder la lettre de Mgr l'Archevêque de Paris :

« La loi organique de l'enseignement est destinée, selon toutes les apparences, à FAIRE BEAUCOUP DE MAL: que les catholiques, secondant les efforts des Evêques, fassent du moins tout le bien que cette loi n'empêche pas.

Toujours le même système et le même esprit !

Mgr Bruno Valayer vient de mourir à Avignon, à l'âge de 85 ans sept mois. Il avait été d'abord curé de Valréas, sa patrie; puis appelé à Paris, il fut nommé chanoine de la métropole. Il était depuis longtemps curé de Saint-Thomas d'Aquin, lorsqu'il fut promu, en 1852, à l'évêché de Verdun. Son âge déjà avancé et ses infirmités ne lui permirent pas de siéger longtemps dans sa ville épiscopale : il donna sa démission, et le gouvernement l'admit au rang des chanoines-évêques de Saint-Denis. Il se retira à Avignon au sein de sa famille. Ses vertus, ses mœurs douces et paisibles, son affabilité, sa charité, lui avaient concilié tous les cœurs. Mardi dernier, un nombreux cortége, à la tête duquel marchait Mgr Debelay, assisté de son clergé, accompagnait à la métropole les dépouilles mortelles du vénéré prélat. Après la messe, que Mgr l'Archevêque a célébrée lui-même, le corps a été transporté, selon les désirs du défunt, au cimetière de Montfavet.

Demain mercredi, un service sera célébré pour le repos de son âme à NotreDame, et vendredi à Saint-Thomas d'Aquin, son ancienne paroisse.

Nouvelles Religieuses.

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DIOCESE DE ROUEN. Le 29 avril dernier, Mgr l'Évêque de Bayeux a consacré l'autel de marbre de la nouvelle église du Pollet de Dieppe; une foule nombreuse et recueillie assistait à cette pieuse cérémonie. Mgr l'Evêque de Bayeux est dans les environs de Dieppe depuis le 25 avril. Il est venu dans sa famille respirer l'air natal nécessaire à sa santé.

Le même jour, Mgr Blanquart de Bailleul, Archevêque de Rouen, administrait le sacrement de confirmation dans l'église des Ventes-Saint-Remy, près Neufchâtel. C'est la seconde fois depuis un an que Mgr visite cette charmante petite église, bâtie en style roman au milieu des forêts. C'est un petit chef-d'œuvre de bon goût et d'art chrétien qui fait autant d'honneur à M. Barthélemy, architecte de la cathédrale de Rouen, que sa belle église de Bon-Secours. Cette construction élégante et gracieuse n'a coûté que 28,000 fr., et les donations de cette somme ont été quêtées sou à sou par M. l'abbé Valois, l'excellent curé de cette population de bûcherons et de charbonniers. M. le baron d'Haussez, ancien ministre de la marine et l'un des principaux bienfaiteurs de cette église, assistait à cette fête des champs, qui a rempli toutes les âmes des plus douces consolations.

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PIEMONT. On lit dans le Cattolico, qu'à Gênes, depuis la promulgation de la loi Siccardi, on a mis au théâtre des pièces obscènes où le clergé et la religion sont exposés au mépris du public. On a semé, on commence à recueillir les fruits.

AMÉRIQUE. On écrit d'Halifax (Nouvelle Ecosse), que le carême a été dans cette ville, plus édifiant que jamais. La foule des fidèles était considérable à la cathédrale où prêchait l'Evêque, Mgr Walsh, et à Saint-Patrick où la station était remplie par le vicaire-général.

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Une confrérie de l'Immaculé cœur de Marie, pour la conversion des pécheurs, vient d'être établie à Météghan. L'Evêque l'a instituée canoniquement et l'a unie à l'archiconfrérie de Notre-Dame-des-Victoires, en vertu des lettres du vénérable abbé Des Genettes.

Dans le même district, le R. M. Mac-Leod a établi une société de Tempérance, qui dès les premiers jours comptait plus de deux cents personnes.

Séance de l'Assemblée.

Encore aujourd'hui les mêmes préoccupations, la même attente et le même retard. Il paraît que la commission des dix-sept a travaillé hier jusque fort avant dans la nuit, et que le résultat de sa conférence ne pourra être remis que demain à l'Assemblée. Plus que jamais nous regrettons ce nouveau délai. Dans un pays si facile à émouvoir, où tout est impression et impression du moment, il est urgent de ne pas laisser se prolonger les anxiétés publiques.

A l'abri de l'inattention que jetait sur l'Assemblée le souci général, le budget des travaux publics a marché. M. Sautayra s'est découragé assez vite. M. Bineau a lutté presqu'en désespéré contre les réductions de la commission. Le son de sa voix, qui sans cesse venait frapper les échos de la salle, nous rappelait les séances de la Constituante

où, assis alors sur les bancs de la commission, il défendait les économies avec un courage d'hercule. Les situations ont changé. L'Assemblée a constamment repoussé les efforts du ministre, et ç'a été pour M. Berryer une occasion nouvelle de développer la merveilleuse souplesse de son talent, et cette présence d'esprit, cette lucidité de termes, qui sont plus remarquables que jamais dans ces questions d'affaires si variées et quelquefois si compliquées.

Au milieu de la séance, sur le rapport de M. Delessert, l'Assemblée a validé l'élection de M. E. Sue à Paris. Il a été constaté que sur 424,000 électeurs inscrits, 250,000 à peine ont pris part à l'élection : quelle déplorable et honteuse indifférence! De plus, il a été établi que M. Sue ne s'appelle pas Eugène, mais Joseph. Tout est d'emprunt dans M. Sue, sa renommée comme son prénom.

M. de Casabianca a déposé, pendant la séance de ce jour, le rapport de la neuvième commission de l'initiative sur la proposition de MM. Pécoul et Bissette, ayant pour objet l'inscription sur les registres de l'état civil des mariages religieux contractés dans les colonies par les personnes non libres avant le décret d'abolition de l'esclavage.

Suivant la commission aucun doute ne peut s'élever sur la validité de ces mariages, quoique célébrés seulement à l'Eglise, aux termes d'une ordonnance de 1685. Le mariage, étant de droit naturel, doit être considéré comme aussi sacré aussi saint et aussi indissoluble entre esclaves qu'entre toutes autres personnes. Il est évident que l'une des conséquences du décret d'abolition de l'esclavage est de faire produire à ces unions tous les effets civils; il est juste dès lors d'en faciliter et d'en assurer la preuve par inscription gratuite sur les registres de l'état civil.

Bulletin de la politique étrangère.

ALLEMAGNE.- La Gazette d'Augsbourg publie la dépêche télégraphique suivante :

Dépêche télégraphique arrivée à Augsbourg, le 2 mai.

«Vienne, le 2 mai. - L'Autriche exige définitivement qu'une assemblée plénière de la Confédération germanique se réunisse à Francfort pour procéder à la révision de la constitution. Les invitations et préparatifs sont déjà faits. »

- Une correspondance de la même feuille annonce d'une manière positive que le congrès des souverains de l'Union (restreinte) s'ouvrira à Gotha le 15 mai. Ce serait la contre-partie de la conférence qui doit avoir lieu le 10 mai à Francfort, sous la direction de l'Autriche. -On parle du comte de Fiquelmont ou du comte de Thun, ministre d'Autriche en Bavière, comme désigné au poste de commissaire autrichien à Francfort, pour présider le congrès des plénipotentiaires. ESPAGNE. On lit dans le Heraldo, de Madrid, du 2 mai:

« Cette nuit, est arrivé à Madrid le courrier porteur de la note de

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