Page images
PDF
EPUB

[ocr errors]

Toutefois, nous nous permettrons quelques observations sur ce grand coup d'Etat. Nous ignorons si l'ordonnance citée par les grands hommes de Fribourg existe dans les archives cantonales; elle n'est, peut-être, qu'un fantôme créé par la démocratique imagination de leur historien-chancelier Berchtold, qui a enfanté bien d'autres excentricités. Laissons donc là ce document. Mais ce que nous savons, c'est que l'usage des billets de Pâques a été maintenu et sanctionné par l'autorité ecclésiastique, et qu'elle seule pouvait légitimement le supprimer. La confession pascale étant une institution toute religieuse, un devoir tout religieux, l'autorité religieuse a seule le droit d'en surveiller l'accomplissement par les fidèles; elle peut donc établir un contrôle, et un contrôle conforme aux règles de sa sagesse. Depuis bientôt deux siècles que les billets de Pâques existent, ils ont bien moins troublé le canton que le radicalisme ne l'a fait en quelques mois. Admettons que le gouvernement de 1657 les ait établis; ce serait là un abus de pouvoir, une immixtion blàmable de l'autorité séculière en matière religieuse. Mais les fautes du gouvernement de 1657 autorisent-elles les monstrueuses aberrations du gouvernement de 1850? Que les hommes d'aujourd'hui enlèvent la poutre de leur œil, avant d'arracher la paille de l'œil des hommes d'autrefois. Medice, cura teipsum.

De mémoire d'homme, nul ne s'est plaint de contrainte. Le billet de Pâques fait preuve de l'accomplissement du devoir pascal; voilà tout. S'il gêne quelques chrétiens, il ne gène que ceux que le devoir gêne; et ceux qui secouent le joug du devoir, ont cessé, en effet, d'être chrétiens. Eh! citoyens gouvernants de Fribourg, puisque vous ne voulez point de contrainte, supprimez l'enfer, supprimez les jugements de Dieu! Gardez, pour vous, la liberté d'être sans foi, sans loi, sans religion, sans mœurs et sans justice; le public connaît votre amour pour cette liberté. Mais les catholiques de Fribourg veulent être et rester catholiques; toujours ils professeront, comme dogme et comme devoir, la divine institution de la confession sacramentelle, quoi que vous fassiez, d'ailleurs, pour l'ébranler.

Les pharisiens fribourgeois affectent une grande sollicitude pour la dignité du culte catholique. Mais eux, qui ont perdu la foi et le sens catholique, qui haïssent le ministère, les devoirs de la vie catholique, comment osent-ils prononcer officiellement sur ce qui contribue, ou non, à la dignité du culte catholique? Que bien plutôt ils se préoccupent de la dignité de leur propre conduite... Qu'ils sachent, au reste, que les catholiques fribourgeois ne reconnaissent, en matière de culte, comme en toute autre matière religieuse, d'autre autorité que celle des chefs hiérarchiques, le Souverain-Pontife et leur Evêque.

Les gouvernants de Fribourg voient, dans les billets de Pâques prescrits par l'ordonnance de 1657, une intervention non justifiée du pouvoir civil en matière religieuse. Nous leur demanderons, à

[ocr errors]

notre tour, si le pouvoir peut jamais intervenir légitimement en matière religieuse? - Depuis qu'ils se sont imposés par la force à notre canton, combien de fois n'ont-ils pas envahi le sanctuaire? Ils ont supprimé les corporations religieuses, pillé les couvents, porté une main sacrilége sur leur Evêque et sur plusieurs prêtres, destitué des curés, supprimé le séminaire et les études sacrées, aboli presque toutes les fêtes, mis des entraves insurmontables à l'administration canonique du diocèse, etc. Comment pourront-ils, eux-mêmes, justifier de semblables forfaits? O hypocrites!

Si l'usage des billets les scandalise, à cause de la commination des peines civiles qui y est annexée, qu'ils suppriment cette clause pénale; nous reconnaissons au pouvoir civil le droit de supprimer les peines civiles, mais non celui de supprimer ce qui a été sanctionné par l'autorité ecclésiastique, ni de défendre aux curés de recueillir les billets de Pâques. Les curés ont reçu, de l'Eglise, le droit de rappeler aux fidèles leurs devoirs religieux et de voir s'ils les remplissent ils doivent donc la vigilance pastorale à tous leurs paroissiens, gouvernants et gouvernés. Devant Dieu et devant l'Eglise, les gouvernants ne sont que de simples fidèles.

Nouvelles Religieuses.

[ocr errors]

DIOCÈSE DE TOULOUSE. Mgr l'Archevêque de Toulouse vient de publier une circulaire dans laquelle il ordonne des prières pour la S. Congrégation appelée à se prononcer sur la canonisation de la Vénérable Germaine Cousin.

DIOCÈSE DE NANTES.- La semaine dernière, une cérémonie très-intéressante a eu lieu à la prison de Nantes.

Piusieurs détenus avaient prié M. l'abbé Duquesnay de venir donner aux pauvres prisonniers quelques paroles d'encouragement et de consolation religieuse. M. l'abbé Duquesnay avait accueilli avee empressement cette demande; et, malgré les fatigues de la prédication de ces derniers temps, il a tenu parole.

Samedi donc, la chapelle de l'établissement avait été disposée pour cette petite fête par les soins de M. l'aumônier des prisons et des dignes Sœurs de Saint-Vincent-de-Paul. Le préfet, le procureur de la République et les autres membres du conseil de surveillance des prisons assistaient à cette touchante solennité.

Après le sermon, les détenus ont demandé à exprimer à M. Duquesnay leur profonde gratitude. Tous ont été rangés en cercle dans la grande cour de la maison, et M. Duquesnay leur a adressé, dans un langage plein de force et d'affectneuse sympathie, quelques derniers conseils; avant de se retirer, il a cordialement embrassé, au nom de tous, les deux détenus qui avaient pris l'initiative d'une démarche près de lui.

DIOCÈSE DE CAMBRAI. - On lit dans la Liberté de Lille?

«Avant-hier, 1er avril, un religieux de l'ordre des Capucins, est arrivé à Lille par le convoi de Paris, à trois heures de l'après-midi; son intention était de faire visite à un ecclésiastique de notre ville avant de continuer son voyage en Belgique; mais ayant oublié l'adresse de la personne, il demanda à un des nombreux gamins qui se trouvent toujours dans la gare, de le conduire à l'église la plus voisine; le gamin crut devoir le diriger, on ne sait trop pourquoi, vers

Saint-Sauveur; mais il n'y parvint que suivi d'une foule nombreuse, dont la curiosité avait été excitée par son costume. Il entra dans une chapelle où il se mit en prières; et c'est ici que commence le plus déplorable scandale, car l'église fut bientôt envahie, et le pauvre religieux se trouva en butte aux invectives de tous genres. Des hommes, la casquette sur la tête, sans respect pour le lieu saint, criaient A bas le jésuite! A bas le Rodin ! Les femmes mêmes se mirent de la partie; c'est à peine, enfin, si M. le doyen de Saint-Sauveur put parvenir à faire cesser cet odieux scandale; plus tard les mêmes scènes se renouvelèrent lorsque le religieux quitta le presbytère; et bien qu'on ait eu la précaution de lui faire prendre le rempart pour ne pas repasser dans la rue Saint-Sauveur, il fut bientôt suivi d'une cohue qui ne cessa de l'accompagner en chantant soit la Marseillaise, soit la complainte du Juif-Errant, et en le conspuant de mille lazzis plus grossiers les uns que les autres.

Ce religieux, qui vient de traverser toute la France, disait, les larmes aux yeux, qu'il ne comprenait rien à la manière dont on agissait à Lille.

«Nous nous en étonnons moins que lui: n'est-ce pas là le résultat de ce que les grands prôneurs de liberté et de fraternité enseignent journellement à ce peuple qu'ils ont perverti, au point de faire douter aux étrangers s'ils se trouvent parmi des sauvages ou dans une ville civilisée ?>

DIOCÈSE DE ROUEN.- Un vol audacieux et sacrilége a été commis dans l'église de Longueil (arrondissement de Dieppe), pendant la nuit du 28 au 29 mars dernier.

Après être entrés dans l'église en brisant une partie du vitrail, les malfaiteurs (ils étaient nécessairement plusieurs) ont tenté d'abord de forcer le tabernacle, mais ne pouvant y parvenir qu'en faisant un grand bruit parce qu'il était adossé à une boiserie du chœur, ils jugèrent convenable de l'enlever de sa base et de le déposer sur les dalles de l'église. Là, ils en brisèrent la porte en éclats et se saisirent de l'ostensoir qui contenait des hosties consacrées, puis ils furent à l'un des troncs qui renfermait une somme de 24 à 50 francs, mais ils ne purent parvenir à le forcer, surpris qu'ils furent sans doute, par l'arrivée du jour : car une femme qui occupe une maison voisine de l'église les entendit vers cinq heures du matin; malheureusement elle attribua le bruit qui arrivait jusqu'à elle aux travaux d'un menuisier occupé dans la nef depuis quelques jours.

Par hasard, le tabernacle de la chapelle ardente du Jeudi-Saint était resté ouvert, il renfermait les autres vases sacrés.

Fort heureusement l'idée ne vint point à ces malfaiteurs de s'approcher de cette chapelle où le lendemain tout a été retrouvé intact.

La justice, qui s'est transportée sur les lieux, a cru devoir décerner des mandats d'arrestation contre deux individus que certains indices semblaient dénoncer comme les auteurs du crime.

De son côté, Mgr l'Archevêque de Rouen a envoyé à Longueil M. l'abbé Surgis, vicaire-général, pour informer sur la profanation et pour réconcilier l'église. C'est le jour de Pâques même que cette douloureuse cérémonie a eu lieu. Pendant cette belle journée consacrée à des chants de joie dans toutes les églises chrétiennes, la pauvre église de Longueil a été tendue de noir en signe de deuil et d'expiation.

13

ESPAGNE. Suivant la pieuse coutume des rois d'Espagne, la reine, après l'adoration de la Croix, a commué la peine de mort en celle des galères perpétuelles, pour un certain Vincente Marcos, en jugement au tribunal de Madrid pour cause d'homicide.

BOHÈME. — Il n'y a pas longtemps encore que beaucoup de villes d'Italie et d'Allemagne chassaient de leurs murs les Jésuites et les Liguoriens. On eût pu croire que c'en était fait, et que l'esprit anti-religieux allait se répandre et dominer partout; tout le contraire est arrivé. Les religieux émigrés ont porté à d'autres contrées la lumière que rejetait leur patrie; d'autres ont lutté contre le mal, et leur persévérance a porté ses fruits.

En Bohême, où le parti anti-jésuitique et anti-liguorien a toujours été ardent et fort, les choses ont pris une tournure inespérée. Dans le mois d'août 1849, le euré de Ketzelsdorf, voulant solenniser la fête de sainte Philomène, pour qui il professe une dévotion particulière, résolut d'y préparer ses paroissiens par une retraite. Quelques ecclésiastiques séculiers et des Liguoriens dispersés répondirent à son appel, et une mission en forme fut donnée, c'était la première de- ́ puis soixante-dix ans ; elle fut comme un signal pour les catholiques. De toute part, dans le diocèse de Kaniggratz, on demande les missionnaires. En sept endroits ils répandent les fruits de leurs pieux exercices, jusqu'à ce que l'hiver les force à interrompre leurs travaux. Le 9 mars, jour consacré aux saints Cyrille et Méthodius, apôtres des Slaves, les missions recommencèrent à Slaupich, paroisse catholique de la langue czèque, et le 22, à Wittingan, diocèse de Budovisse, soixante-quinze ans après que, suivant les traditions du pays, les PP. Jésuites en avaient donné une; le samedi In albis, elle s'ouvrira à Sainte-Maria Schnee (Sainte-Marie-des-Neiges), et continuera consécutivement dans douze paroisses jusqu'à l'entrée de l'hiver, L'Archevêque de Prague va suivre l'impulsion donnée, et opposer ce moyen de salut à la secte politico-religieuse des Hussites.

L'empereur Ferdinand Ier vient d'acheter, près de Sainte-Marie-des-Neiges, une maison qu'il offre en asile aux Liguoriens dispersés, et où il désire qu'on établisse un noviciat pour les missions.

Limbourg, dans le duché de Nassau, a eu aussi la mission pendant dix jours dans la cathédrale de Saint-Georges, magnifique édifice commencé en 864 et terminé en 1134, et qui peut contenir 15,000 personnes. Ce sont les Liguoriens qui l'ont prêchée. C'était un beau champ de travail que cette ville où les apôtres de la liberté ont établi leur siége, où Ronge était accueilli avec enthousiasme, où l'on n'avait que la plus mauvaise opinion des ordres religieux qui en étaient bannis depuis longtemps. Le succès a été prodigieux. Le peuple de quatorze communes du voisinage accourait en foule et montrait une ardeur extraordinaire pour les saints exercices. Des conversions éclatantes ont eu lieu, des Juifs, des protestants ont été ébranlés, et l'Evêque, qui assistait à tous les exercices, s'écria à la fin de la mission: « Je m'attendais à quelque chose de grand, mais ce que je vois surpasse toutes mes espérances! >

Là, comme partout, la persécution a été pour l'Eglise de Dieu une occasion de triomphe.

Séance de l'Assemblée.

C'est pour le public un fort peu intéressant spectacle que le renouvellement du bureau. Les représentants viennent l'un après l'autre, tantôt par groupes serrés, le plus souvent à longs intervalles, dé- • poser dans les urnes placées sur la tribune, à gauche leur bulletin, à droite la boule du contrôle. Et cette procession dure près de deux heures; elle se renouvelle par deux fois heureuse l'assistance qu'on lui ait encore épargné un troisième tour, en faisant voter ensemble pour les vice-présidents et les secrétaires!

Le scrutin n'a eu de résultat que pour le président, les secrétaires et deux vice-présidents. M. Dupin a été élu à plus de 80 voix de majorité, et tout aussitôt il est venu reprendre son fauteuil. Les anciens secrétaires ont tous été réélus. M. Bedeau et M. Daru ont seuls obtenu la majorité pour la vice-présidence. Les autres concurrents sont MM. Benoist-d'Azy, Léon Faucher, de Vatimesnil, Jules de Lasteyrie et Léon de Maleville. Cette dispersion des suffrages est fâcheuse, et il est très-regrettable que la majorité ne se soit pas entendue d'avance.

Au commencement de la séance orale, M. le garde des sceaux a présenté un projet de loi sur la réforme hypothécaire. Depuis cinq mois l'Assemblée est saisie de la question : une commission l'a soigneusement élaborée; son rapport est tout prêt. C'est un procédé assez maladroit au gouvernement d'être venu jeter son projet à la traverse. L'Assemblée a renvoyé ce projet à la même commission.

M. le ministre des finances a ensuite apporté le projet de budget pour 1851. On a voulu connaître les plans de M. Fould, et il a donné lecture de son exposé. Cet exposé voit peut-être les choses trop en beau. Cependant il y a d'excellentes annonces, celle par exemple du dégrèvement de la propriété foncière, par la suppression d'une grande partie des centimes additionnels. Cette pensée a été accueillie avec une juste favcur par l'Assemblée. Le ministre propose des impôts nouveaux ou remaniés sur le plomb de chasse, les sels de soude, les cartes à jouer. Il demande aussi l'aliénation d'une portion des forêts de l'Etat. Cette déclaration a soulevé de vives récriminations.

Puis on a entamé la première délibération de la loi sur la transportation. M. Farconet à ouvert le feu. Il ne manque ni de talent, ni d'habileté. Mais en voulant trop prouver, il s'expose à ne prouver rien.

Il a présenté les îles Marquises, tantôt comme un affreux désert, tantôt comme le repaire de cannibales et d'anthropophages. La gauche, merveilleusement stylée à cette manoeuvre, ne laissait pas échapper une occasion d'applaudir « aux beaux endroits qui méritent des ah! >>

Le rapporteur, M. Rodat a très convenablement réfuté M. Farconet. Il a cite les autorités les plus incontestables pour établir la salubrité du climat : il a défendu l'esprit et les termes généraux de la loi. Et il a trouvé des accents très énergiques et très chaleureux sur les périls de la société et sur la nécessité d'intimider, par avance, les factieux qui se font un jeu sanglant de la paix, de l'ordre et de la vie des citoyens !

La discussion continuera demain.

Outrages au Président de la République.

Le Constitutionnel raconte ce matin, dans de grands détails, des scènes tumul

« PreviousContinue »