ARTICLE UNIQUE. Les mariages religieux contractés dans les colonies françaises, antérieurement à la promulgation du décret d'abolition de l'esclavage, par des personnes alors non libres, sont déclarés valoir dès l'origine, comme s'ils avaient été célébrés devant un officier de l'Etat civil, et produire les mêmes effets. Ces mariages seront inscrits sans frais sur le registre des actes de l'Etat civil de la commune où il ont été célébrés religieusement, à la diligence du procureur de la République ou à la requête des parties. La commission du budget s'est constituée aujourd'hui ; elle a nommé M. Berryer président, M. Gouin vice-président, et MM. MathieuBodet et de Goulard secrétaires. Les socialistes de Saône-et-Loire. Les pérégrinations des candidats socialistes dans le département de Saône-etLoire sont loin d'avoir produit les effets que ces messieurs en attendaient. Les populations des campagnes commencent à apprécier à sa juste valeur le mérite des promesses dont on les a bercées. A Charolles, la vigoureuse action de l'autorité a su faire rentrer les socialistes dans le respect de la loi, et l'exemple du sous-préfet a été fermement suivi par tous les maires des communes où les candidats se sont montrés. A Paray, les prédicateurs rouges ont senti le terrain manquer sous leurs pieds; ils ont quitté la ville sans oser s'exposer à l'accueil peu sympathique que leur préparaient les ouvriers. A Saint-Christophe, une réunion était annoncée, mais elle n'a pas eu lieu faute d'auditeurs. Deux ou tro paysans, que la curiosité ait attirés, allendaient l'heure de la représentation. Elle sonna, et le citoyen Dain parut à la fenêtre du cabaret, où il était descendu avec ses amis, et annonça qu'il n'y aurait pas de séance. Même désappointement à Saint-Yan. A Marcigny, les candidats, voyant que leurs déclamations ordinaires étaient trop usées pour qu'elles passent être renouvelées avec succès, ont donné un autre cours à leur imagination. Ils ont présenté aux cultivateurs la réjouissante perspective d’un ruisseau de vin de Champagne et de l'indemnité du milliard s'ils votaient pour leur liste. Inutile de dire que l'appåt était par trop grossier. Le bon sens des paysans en a fait prompte justice. A Tournus, malgré l'animation des discours , les attaques contre l'autorité et tous les lieux communs réchauffés, la séance a été bonne encore pour l'ordre, car on a vu le citoyen Boysset, le président du club et le seul oraleur de nos représentants, ne pas même pouvoir achever un discours. Malheureusement les réunions socialistes ne provoquent pas seulement des scènes burlesques; elles occasionnent le plus souvent des dangers pour la paix publique, et, sans la fermeté et l'énergie des autorités locales, on aurait eu à déplorer de graves désordres sur plus d'un point du département. A Verdun, de tristes déclamations ont eu lieu en pleine place publique, et assurément l'autorité locale n'aurait pas dû les tolérer là plus qu'ailleurs. De coupables excitations et l'oubli de toutes les règles ont eu lieu aussi à Digoin. Enfin, mardi, à Cursery, les démagogues de la localité s'étaient rassemblés pour entendre les candidats. En l'absence du maire et de son adjoint, le souspréfet de Louhans se rendit lui-même à la réunion. M. Esquiros avait à peine commencé son allocution, que déjà il avait dépassé de bien loin les limites dans lesquelles la loi renferme les orateurs. M. Houssart fit immédiatement inviter le président du bureau à rappeler M. Esquiros à la discussion pure et simple des titres des candidats. Ce n'était pas là évidemment le but de la réunion. Aussi, soit qu'il ne se fût pas préparé à présenter à ses auditeurs les titres de ses amis à la confiance des électeurs, soit que ce sujet ne lui eût pas fourni assez de matières, M. Esquiros descendit de son estrade en protestant contre la présence, parfaitement légale du reste, de l'autorité. Aucun des assistants ne prit la parole, et la séance fut levée au milieu de cris séditieux et de quelques scènes de violence. Le bon esprit de la généralité de la population et la présence de deux compagnies de passage du 15° léger ont imposé, avec la ferme attitude de l'autorité, aux perturbateurs. Mais le préfet, informé de ces faits, a dû immédiatement prendre un arrêté pour interdire toute réunion socialiste dans l'arrondissement de Louhans. Une seroblable mesure avait été rendue nécessaire dans les cantons de Cluny et de Saint-Gengoux, où les discours les plus violents avaient été prononcés. Nous ne saurions trop nous féliciter de celte ferme application de la loi du 19 juin 1849. Chacun sait d'ailleurs que la liste socialiste est depuis longtemps arrêtée et publiée. Ce n'est donc plus pour une discussion électorale que les agents de désordre se réunissent. Leur but est de réveiller des passions, de répandre leurs funestes doctrines, d'égarer la conscience publique. En présence de ces dangers, l'autorité doit user de ses droits dans toute leur étendue. Elle l'a fait jusqu'ici, et les bons citoyens sont autorisés à compter qu'elle agira toujours aixsi à l'avenir. Bulletin de la politique étrangère. ITALIE. - On écrit de Florence, à la date du 21 : « La presse toscane est depuis quelques jours en grand émoi. Comme l'opposition devenait de plus en plus agressive, le gouvernement vient de prendre une mesure légale, mais rigoureuse, qui va compromettre l'existence des journaux mal assis. Une loi de 1815, non abolie, a décidé que le timbre des journaux serait de 2 el de 4 quattrini par numéro. Cette loi n'élait plus observée. On tolérait que le timbre fùt seulement d'un quattrino. Une circulaire ministérielle a récemment prévenu les journaux que désormais chaque feuille serait timbrée conformément à la loi de 1815. « Indignation des journaux, réunion, projet de protestation renouvelée de la fameuse protestation rédigée en juillet 1830 par les journalistes de Paris. Quelqu'un ayant fait observer que la mesure était parfaitement légale, on a décidé qu'on ne protesterait pas, mais que dans une humble supplique adressée au grand-duc, on implorerait le maintien de sa tolérance. L'avis a été adopté. On a fait la supplique, que les journalistes les plus violents se sont empressés de signer. « Un de nos journaux annonce que la Russie a refusé son inter vention officieuse, qu'on réclamait pour l'apaisement de la querelle que lord Palmerston a fait surgir entre la Toscane et l'Angleterre. Cette intervention n'a pas été refusée, par la raison bien simple qu'elle n'a pas été demandée. « Notre gouvernement, que l'on accuse d'être rétrograde, vient de refuser au roi dc Naples l'expulsion des réfugiés napolitains et siciliens qui sont ici. Ce refus esi, aux yeux de bien des gens, une grosse faute, mais ce devrait être au moins un titre à la reconnaissance du parti démocratique. Il n'en est rien. Messieurs les démagogues trouvent toujours qu'on n'en fait pas assez pour eux. Demain leurs journaux recommenceront leurs attaques contre la politique oppressive de l'infâme Léopold ! >> PIEMONT. — Le ministre de l'intérieur a annoncé à la chambre des députés l'arrivée prochaine de la légion italienne commandée par le colonel Monti de Brescia, qui a combattu pour la cause des Hongrois. Cette légion irait tenir garnison en Sardaigne. Le général romain Guseppe Gallelli a demandé au roi l'autorisation de fonder dans la même ile une colonie d'émigrés et a sollicité les fonds nécessaires au premier établissement. Quand le Piémont, sous la possession de l'invasion française, se transforma en République cisalpine, c'est en Sardaigne que la famille royale trouva un asile inviolable; la fidélité des insulaires ne Lunas un instant ébranlée. Avec les mesures qu'on propose, où ira donc le roi de Piémont, lorsque les germes qu'il laisse répandre dans ses Etats du continent auront porté leurs fruits ? ALLEMAGNE. — S'il faut en croire la correspondance de Francfort, du 22 avril, publiée par le Vapoléon, l'Autriche aurait adressé à tous les cabinets allemands une note par laquelle elle inviterait chacun des membres du corps germanique à nommer un plénipotentiaire à Francfort, afin de délibérer sur la forme à donner au nouvel organe central, les pouvoirs de la commission fédérale actuelle expirant le 1er mai. Il est expressément articulé dans cette note que toute délégation collective de pleins pouvoirs serait regardée comme nulle et non avenue, c'est-à-dire qu'on ne saurait reconnaître à la Prusse le droit de parler, d'agir au nom des Etats formant l'union restreinte d'Erfurth. il est entendu que cette espèce de congrès n'aura exclusivement à s'occuper que du choix d'un pouvoir central, et que la question de réorganisation constitutive de l'Allemagne reslera complélement réservée. Mais ce congrès, une fois réuni, pourra facilement acquérir une importance inattendue, et devenir l'instrument conservateur de la confédération germanique. La réponse du llanovre à cette communication du cabinet de Vienne est du 18 avril. Le gouvernement du roi Ernest-Auguste donne sa pleine et entière approbation aux propositions autrichiennes; il consent même à accorder aux cours de Vienne et de Berlin une certaine prépondérance de voix, laissant percer son peu de penchant pour la prolongation de l'intérim actuel contre laquelle la Bavière, le Wurtemberg et la Saxe ont déjà protesté. ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE. Séance du 29 avril. PRÉSIDENCE DE M. DUPIN. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de budget général des dépenses (exercice 1850.) L'Assemblée revient au budget de la guerre. M. DE LA MORICIÈRE revient sur le vote de samedi, relatif à la gendarmerie mo-bile. La création des cadres de l'armée, dit-il, ne peut être faite qu'en vertu de lois spéciales. Je voudrais donc qu'on donnåt la vie à ce nonveau bataillon, autrement qu'en vertu d'un chiffre. L'article 103 de la Constitution est formel. Ou cet article ne veut rien dire, ou il signifie que les cadres de l'armée doivent rester tels qu'ils sont. Je vous demande donc, pour sauver le principe, de voter cet article qui se trouve dans le projet du ministère : all sera créé un 2e bataillon de gendarmerie mobile. » M. RBRRYER, rapporteur. Cette discussion a été vidée samedi. (Oui! oui.) Il n'y a pas d'autre loi que celle qui porte demande d'ouverture du crédit destiné à la gendarmerie mobile, et à l'égard de la garde républicaine, on n'a pas agi autrement. M. DE LA MORICIÊRE. S'il s'agissait d'un accroissement d'effectif, je comprendrais qu'on procédât par une simple demande d'ouverture de crédits ; mais il s'agit de la créa. tion d'un bataillon nouveau, et cela est bien différent. (Réclamations. C'est décidé ! c'est vote!) L'honorable membre soutient que c'est par erreur que M. Berryer dit qu'on n'a pas procédé autrement pour la formation de la garde républicaine ; puis il ajoute : Si ce corps a été créé sans projet de loi voté, on a eu tort. Si on n'avait tant abusé des interpellations, j'aurais déjà plus d'une fois interpellé le gouvernement sur les modifications illégales, irrégulières, inconstitutionnelles, qu'il a faites dans les cadres de l'armée. (Rumeur. — Approbation à gauche.) La question est bien simple ; je veux constater que pour créer un cadre nouveau, il faut un projet de loi : ce projet de loi a été déposé par le ministre. Je demande que vous votiez comme annexe au budget l'article de ce projet qui est ainsi conçu : «Un 2e bataillon de gendarmerie mobile est créé, » A1. le rapporteur dit : C'est dans le budget. Il y a une note dans le budget, mais les notes du budget ne sont pas des articles de oi, A droite : L'ordre du jour ! l'ordre du jour! M. D'HAUTPOUL, ministre de la guerre. Messieurs, le rapporteur a parfaitement espliqué la position. Il serait puéril de dire que l'on a voté 1,150,000 francs samedi, pour un but que l'on ne comprenait pas. J'ai déposé, il y a plusieurs mois, un projet de loi, vous le connaissez tous. Quand vous avez voté le crédit, vous saviez ce que vous faisiez. Il serait puéril, je le répète, de prolonger cette discussion. (Très-bien ! Voix nombreuses : L'ordre du jour ! l'ordre du jour! M. CHARRAS demande le rétablisseme de 100,000 fr. supprimés par la commission et destinés à rétribuer les fonctions de commissaires de la République auprès des conseils de guerre. M. BERRYER, rapporteur, maintient l'économie proposée par la commission ; les' : fonctions de commissaire ne sont pas telles que l'on ne pnisse les confier à des officiers détachés de leur corps et par conséquent n'ayant droit à aucunc indemnité. La proposition de M. Charras est rejetée, et le chapitre est adopté avec le chiffre de la commission. Chap. 9. Solde de l'infanterie, 115,087,036 (r. M. LE PRÉSIDENT. La parole est à M. Savatier-Laroche pour développer un amendement qui propose une réduction de 100,000,000 fr. (Rires.) M. SAVATIER-LAROCHE développe longuement celte pensée qu'une armée de 500,000 hommes nous est complétement inutile. Il parle de tout à propos de cette question, et de l'agriculture, et du crédit foncier, et des élections de 1852, et de la Prusse, et du czar Nicolas, qu'il trouve spirituel, et de l'Europe, qui, à son avis, doit devenir républicaine. L'Assemblée le rappelle plusieurs fois à la question. M. DE GRAMMONT. La commission propose le licenciement des guides. Cette snppression est-elle opportune au point de vue du présent et de l'avenir? Je ne le crois pas, et je le prouverai si vous voulez me faire l'honneur de ne pas m'interrompre. (Rires.) Je ne comprends pas que M. le ministre de la guerre ait pu consentir si facilement à la suppression de ce corps, qui a coûté tant de soins et tant d'argent. Une voix : C'est pour cela. M. DE GRAMMONT. M. Savatier-Laroche a dit qu'une coalition étrangère n'était pas à craindre; il a onblié qne l'armée est nécessaire pour tenir en respect la coalition intérieure. (Rires ironiques à gauche.) La coalition du terrorisme contre l'ordre social. (Approbation.) Une voix à gauche : Dites du royalisme. M. DE GRAMMONT. La clef de toutes les économies est là ; nous pourrons faire les suppressions quand nous serons d'accord des deux côtés. (Nouveaux rires à gauche.) L'honorable membre parle des services rendus par les guides et soutient que la suppression de ce corps serait tout à fait inopportune, attendu qu'eux seuls sont aptes à transmettre les ordres militaires qui exigent une parfaite connaissance des lieux. L'orateur termine en rappelant que ce corps a fait preuve du plus grand dévouement pour la cause de l'ordre dans les sanglantes journées de juin. M. BERRYER maintient la réduction et s'appuie de l'autorité de Napoléon qui avait trouvé, après ses batailles retentissantes à jamais dans l'histoire, qu'il pouvait se passer des guides. M. LE GÉNÉRAL D'HAUTPOUL donne son adhésion à la suppression proposée par la commission. M. LE GÉNÉRAL OUDINOT rend hommage au corps des guides, et dit que les officiers de ce corps sont très-intelligents, que ce sont des officiers d'élite, qui, s'ils étaient licenciés, consentiraient à rentrer dans les cadres de l'armée. On a parlé de l'empereur, continue l'honorable membre; on a dit qu'il avait supprimé les guides... Une voix : Nous ne sommes pas à l'empire. (Mouvements divers.) 3. LE GÉNÉRAL OUDINOT, Je sais bien que nous ne sommes pas à l'empire; mais permettez-moi de dire que sous l'empire, il y avait un corps de 400 guides. Ce corps a laissé des souvenirs précieux, et je me rappelle que nous nous honorions |