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SAMEDI 27 AVRIL 1850..

L'AMI DE LA RELIGION.

(N°:030)

Election du 28 avril.

LECLERC

CANDIDAT DE L'ordre.
Avis important.

M. Fernand Foy s'est désisté de sa candidature.

M. Leclerc est le senl candidat de l'Union électorale.

Tout bulletin de vote contenant un autre nom que celui de M. Leclerc est une manoeuvre électorale ayant pour but de désunir les électeurs amis de l'ordre. L'Union électorale invite instamment ses adhérents à employer tous leurs efforts pour le succès de la candidature de M. Leclerc.

Paris, le 24 avril 1850.

Les membres du bureau du comité central,
MM. DUPÉRIER, présiden: ;

TARBÉ DES SABLONS, vice-président ;

HIP. BONTEMPS, Cosse, A. GODART, LABBÉ, LAMOU-
ROUX, PIAT, SENAC, DESCHAMPS, assesseurs;

HUILLIER, J. DE WAILLY, ANDRIOSCHE, TRON

CHON, secrétaires ;

CASIMIR BLONDEL, trésorier,

Nouvelles de Rome.

(Correspondance particulière de l'AMI DE LA RELIGION.)

Rome, 17 avril 1850. Ilya en ce moment réception par le Saint-Père de tous les officiers de l'armée; le cardinal Dupont y assiste.

Demain, vers quatre heures, le Pape donnera la bénédiction à l'armée sur la place Saint-Pierre; on a renoncé au projet de faire cette cérémonie dans la cour du Belvédère, l'une des cours intérieures du palais. De cette manière il y aura plus de solennité. Le Saint-Père ne paraîtra pas à la loggia, il a voulu que tout fût préparé exprès pour ses chers enfants français, et on a élevé au pied de l'escalier qui va à l'église une tribune dans laquelle il se placera. On ne peut plus entrer dans les boutiques des marchands de chapelets, elles sont assiégées par nos soldats qui font leurs provisions pour la bénédiction

de demain.

La visite faite par Pie IX, avant-hier, à l'hôpital de Saint-André, a élé au cœur de nos soldats. Personne ne s'y attendait, on avait même répandu le bruit qu'il ne voulait pas quitter le Vatican; les romains ont vu avec reconnaissance qu'il écartait toute défiance, et qu'il traversait toute la ville pour consacrer sa première sortie à SainteL'Ami de la Religion. Tome CXLVII.

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Marie-Majeure, et notre armée est dans la joie d'avoir été honorée de sa première visite.

Le Saint-Père n'avait fait connaître son projet à personne, pas même aux Prélats de sa suite: ce n'est qu'en sortant de Sainte-MarieMajeure, qu'il a ordonné qu'on le conduisît à l'hôpital Saint-André; si on eût su ses intentions, le général en chef et son étal-major eussent été là pour le recevoir; mais le Pape n'aurait pas vu à loisir, comme il le voulait, les malades. En s'y prenant comme il l'a fait, il a pu se consacrer entièrement à eux; l'aumônier lui-même était absent, ainsi que les Sœurs de charité; le Saint-Père n'a été reçu que par l'agent comptable M. Billecoq et un commis des vivres M. We

ber.

Dès qu'on a su dans l'hôpital l'arrivée du Saint-Père, il a été impossible de retenir au lit tous ceux à qui leur force permettait de se lever. On cite même un pauvre soldat, qui dans sa précipitation était accouru dans le costume le plus léger possible, et que ses camarades ont obligé à se couvrir d'une manière un peu plus chaude. Le Saint-Père s'est fait conduire immédiatement dans les salles, il s'est arrêté au lit de ceux qui étaient couchés, a adressé à chacun d'eux, en français, des paroles affectueuses et consolantes, et leur a donné des chapelets et de petits crucifix. En sortant il a trouvé les convalescents dans la cour, tous se sont mis à genoux en l'apercevant et il leur a donné aussi des chapelets et des médailles, et en même temps il leur a permis de lui baiser la main.

Le factionnaire qui était de garde, retenu par la consigne n'avait pu quitter son poste comme ses camarades et n'avait rien reçu; en voyant passer le Pape, il n'a pu se retenir et on me dit qu'il s'est écrié : « Mon Saint-Père, si c'était un effet de votre égard, j'ai une mère qui serait bien heureuse, elle aussi, d'avoir un chapelet. » Le Saint-Père le lui a promis et déjà il lui en a envoyé pour lui et pour toute sa famille.

La rue était pleine de romains quand le Saint-Père est sorti; tous demandaient sa bénédiction; le Saint-Père s'est appuyé d'une main sur l'épaule de l'agent comptable, de l'autre sur celle du prélat qui l'accompagnait, et il les a tous admis au baisement du pied. Voilà cette population que l'on disait si hostile au Saint-Père, ces témoignages de magnanime confiance la remplissent de reconnais

sance.

Quant à nos soldats, leur vénération et leur amour n'ont pas de limites, et les esprits-forts eux-mêmes ne peuvent s'empêcher de dire « Non, le Saint-Père n'est pas un homme comme tous les au

tres. »

Nous lisons dans le Journal de Rome que le prince et la princesse Borghese ont donné à Rome une fête magnifique en l'honneur du

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retour du Souverain-Pontife. Toute la diplomatie, les généraux et officiers supérieurs des troupes françaises s'y trouvaient réunis.

Nous empruntons au Journal des Débats la correspondance suivante, qui nous paraît du plus attachant intérêt :

<< Depuis quatre jours on commence à retrouver Rome. La rentrée du pape lui a rendu la vie; les figures se raniment comme les rues, comme les promenades, comme les églises; c'est une espèce de renaissance. Sans doute les difficultés subsistent toujours; elles sont au fond de cette agitation un peu superficielle; mais, quant à présent, elles restent enfermées dans le monde officiel, elles ne paraissent pas au dehors; elles laissent la place à la réjouissance publique, à l'air de fête dont cette pauvre ville avait été privée pendant si longtemps et qu'elle semble aspirer en ce moment avec l'ardeur de la faim et de la soif. Les illuminations si brillantes dont je vous ai déjà parlé, et qui avaient célébré le premier jour du retour du Pape, se sont continuées pendant les deux jours suivants.

Le dimanche, elles ont été encore plus éblouissantes et aussi universelles ; la promenade du Corso a été plus animée qu'on ne l'avait vue depuis lon temps; Rome semblait se reconnaître elle-même dans ses anciens habits de fête. Je sais bien que ce n'est pas tout; je sais bien que les lampions s'éteignent, que les feux d'artifice ne laissent que de la fumée, mais enfin la seule vue de la transformation opérée dans Rome par la présence du Pape prouve au moins que Rome a besoin du Pape pour être quelque chose, pour être autre chose qu'un Musée ou un tombeau.

On a remarqué une différence caractéristique entre l'accueil fait l'autre jour au Saint-Père et celui qu'il recevait autrefois, dans le temps de sa plus grande popularité. Cette fois, l'ovation a été aussi générale, mais en même temps plus contenue, pour ainsi dire plus digne. Cette différence se signalait jusque dans les cris. On criait beaucoup plus : « Vive le Pape! Vive le Saint-Père ! » que «< Vive Pie IX! On sait très-bien aujourd'hui qu'aux yeux et dans la pensée du parti révolutionnaire en Italie, les triomphes populaires décernés au Pape pendant les premiers temps de son règne, étaient souvent des démonstrations d'opposition; que dans sa bouche, le cri de Viva Pio nono!» était devenu une espèce de cri de ralliement, une sorte de protestation contre la papauté elle-même.

Viva Pio! c'était quelque chose comme le cri de: Vive la ligue! dans nos émeutes. On montait des processions avec flambeaux; on organisait ce qu'on appelait des dimostrazioni in piazza; le tribun du Transtevère montait derrière la voiture du Pape, et agitait au-dessus de sa tête un grand drapeau tricolore; on sait où ont mené toutes ces démonstrations. Celles de vendredi dernier étaient moins bruyantes, mais moins chauffées et plus sincères.

Le Saint-Père a traversé la ville sans escorte, et accompagné seulement de cinq ou six de ses gardes-nobles. A sa sortie de l'hôpital Saint-André, il a été entouré par une population respectueuse et empressée qui est venue, comme autrefois, lui baiser les pieds. En traversant ses appartements, il avait remarqué qu'il n'était environné que de gardes suisses ou romains, les Français occupant seulement les postes extérieurs. Il a voulu que nos soldats vinssent faire le service dans l'intérieur du palais, en disant qu'il voulait avoir les Français autour de lui.

Notre armée se montre très-sensible à toutes ces attentions, et, comme je crois vous l'avoir déjà dit, son attitude est visiblement différente de ce qu'elle était généralement avant la rentrée du Pape. Il y a encore, même pour les plus ndifférents, quelque chose dans l'idée, dans le nom seul du Pape. Le retour de

Pie IX est aussi, il faut le dire, une satisfaction donnée à l'armée, à la France. Ce matin, le Saint-Père a reçu tous les officiers de l'armée française. Le général commandant en chef lui a adressé quelques mots, et le Saint-Père lui a répondu en exprimant toute la reconnaissance qu'il éprouvait pour la généreuse nation française,› qui avait dépensé et son sang et ses trésors pour rétablir l'autorité du chef spirituel du monde catholique, et pour faire triompher les principes qui sont la base de l'ordre social tout entier.

Il a prié le général en chef de transmettre au Président de la République, qu'il allait bientôt revoir, l'expression de toute sa gratitude pour lui et pour la France. Tous les officiers ont ensuite défilé successivement devant le Saint-Père; tous sans exception, hormis, naturellement, les protestants, ont fléchi le genou en passant devant lui et ont baisé son anneau pastoral. Beaucoup avaient les larmes aux yeux; le Pape était lui-même visiblement attendri; et tous ceux qui ont assisté à cette scène en ont rapporté les souvenirs les plus touchants. ▸

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Funérailles de S. Em. Mgr le Cardinal-Archevêque de Cambrai.

Le 23 avril, ont eu lieu à Cambrai les obsèques de S. Em., conformément au programme arrêté par MM. les chanoines capitulaires. La cérémonie, commencée à dix heures, ne s'est terminée qu'à deux heures. Par un bonheur inespéré, il n'est tombé de pluie qu'après l'entrée dans la cathédrale.

Nous ne dirons rien de la composition du cortége, ni de sa marche; tout a été conforme au programme; seulement quatre de NN. SS. les Evèques qui étaient attendus ont fait défaut; une indisposition subite a retenu à Arras Mgr de la Tour-d'Auvergne, qui devait officier. S. Em. a été remplacée par Mgr l'Evêque de Gand, qui, ainsi que Mgr l'Evêque de Soissons, s'était rendu à l'invitation da Chapitre. NN. SS. d'Amiens, de Bruges et de Tournai, pareillement invités, ont été retenus dans leurs diocèses par l'impossibilité d'interrompre leurs tournées de confirmation déjà commencées.

Les coins du poële étaient tenus par M. le lieutenant général commandant la division; par M. Petit, l'un des présidents de la chambre de la cour de Donai, en remplacement de M. le premier président; par M. le procureur-général près ladite cour; et par M. le préfet du département du Nord.

A la suite du cercueil, parmi les autorités et plusieurs membres du conseil général du Nord, on remarquait M. le préfet du Pas-de-Calais.

Plus de quatre cents prêtres, accourus des divers points du diocèse, étaient venus témoigner de leur affection filiale pour le Prélat défunt.

L'attitude de la foule, qui remplissait les rues et garnissait toutes les fenêtres sur le passage du cortége, témoignait des mèmes sentiments.

Après le service, cinq absoutes ont été faites: la première, par Mgr de Carsignies, Evêque de Soissons; la deuxième et la troisième, par MM. Philippe et Bernard, vicaires-généraux capitulaires; la quatrième, par M. le vicaire-général d'Amiens, qui était venu représenter son Evêque; et la cinquième enfin, par Mgr l'Evêque de Gand.

Lorsque les restes mortels de S. Em. le Cardinal Giraud ont été descendus dans le caveau épiscopal situé derrière le chœur, le chapeau rouge, insigne de sa dignité, a été, suivant l'usage, suspendu à la voûte, au-dessus de cette tombe, pour y demeurer jusqu'à ce qu'un autre Cardinal vienne occuper le siége de Cambrai.

Puisse-t-il ramener les vertus du défunt, et en faire jaillir encore les éclats

d'une brillante éloquence, avec l'expression touchante d'une paternelle et sainte sollicitude!

(Correspondance particulière de l'AMI de la Religion.)

On nous écrit de Cambrai :

« Monsieur le Rédacteur,

Je vous aurais bien volontiers envoyé un article pour l'Ami de la Religion dès les premiers jours qui ont suivi la mort de S. Fm. Mgr le Cardinal-Archevêque de Cambrai; mais, occupé à rendre au Prélat tous les devoirs qu'un fils doit au corps inanimé d'un bien-aimé père, je n'ai pu trouver un instant pour vous tracer même quelques lignes. Je savais, d'ailleurs, que vous auriez puisé dans les journaux de la province des détails concernant ses derniers moments, et j'ai cru pouvoir attendre que ses funérailles fussent terminées, pour vous dire ce qu'il y a eu de précieux devant Dieu dans la mort de ce prince de l'Eglise.

Je ne veux point vous parler de la haute renominée du Cardinal Giraud, de son génie administratif, de son zèle, de ses talents, de la perfection qu'il savait imprimer à toutes ses œuvres; le Cardinal est connu et apprécié de l'Eglise entière. Une notice, quelque longue qu'elle fût, ne saurait raconter sa vie à Clermont, à Rodez, à Cambrai : c'est une histoire complète à écrire, et vous pouvez annoncer à ceux qui s'intéressent à cette gloire de l'Eglise de France que le prêtre qui, il y a trois ans, écrivait sous ses auspices la biographie des prêtres célèbres du diocèse de Cambrai, se dispose à retracer la vie si glorieuse et si sainte de ce second Fénelon.

La mort du Cardinal Giraud n'est pas seulement une perte pour le diocèse qu'il administrait si heureusement depuis le mois de février 1842; on peut dire que c'est une véritable catastrophe: pour me servir de l'expression de S. Exc. le Nonce apostolique Mgr Fornari, dans sa lettre à MM. les Vicaires capitulaires, C'est un désastre qui sera ressenti par toute l'Eglise. ›

ly a longtemps que le Prélat po:tait au cœur le germe de la cruelle maladie qui vient de l'enlever à notre amour. Ce germe fut rapidement développé par les incessants travaux auxquels il se livrait, et surtout, peut-être, par son voyage à Gaěte, où son cœur si sensible eut à gémir sur les douleurs de l'illustre Exilé, le grand objet de ses affections d'ici bas. Vers la fin de décembre dernier, cette maladie se déclara dans toute sa force, et dès ce moment elle ne fut plus qu'une longue et douloureuse agonie.

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Ce qu'il a été au milieu de ses douleurs, je puis vous l'exprimer en un seul mot: il a été tel qu'il avait été dans toute sa carrière: parfait dans ses œuvres, il a été parfait dans sa maladie; comme sa vie, sa mort a été sainte! Modèle de bonté, il conserva toujours son affabilité et sa douceur, sa patience ne s'est démentie dans aucun instant; il supporta toutes les opérations jugées nécessaires, prit tous les remèdes prescrits avec la résignation la plus complète. Tout cela me répugne, disait-il, mais tout cela entre dans les vues de la Providence. Je ne fais « rien, disait-il encore, je suis condamné à l'oisiveté; mais je fais beaucoup, parce que je fais la volonté de Dieu.» Sans cesse il avait sur les lèvres des textes sacrés ou des paroles tirées des offices de l'Eglise, par le moyen desquels il s'entretenait avec Jésus souffrant sur la croix dont il a tant contribué à répandre la dévotion, et avec la sainte Vierge pour laquelle il eut toute sa vie un culte d'amour filial. Lorsqu'il fut question de lui administrer les derniers Sacrements, il s'étonna de ce que l'on avait pris quelques détours pour lui suggérer l'idée de

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