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ment, ne sont plus de notre siècle. Notre soif d'indépendance, nos théories de liberté des passions, seraient des dissolvants continuels de ces édifices sans fondements. A peine nos éloquents prédicateurs d'unité harmonienne auraient-ils construit leurs établissements gigantesques, que des schismes, des divisions infinies éclateraient entre les membres de l'association. Edifier une société sans religion, dit Plutarque, c'est vouloir bâtir une maison en l'air.

Or, ce ne sont pas de véritables religions, ces assemblages de dogmes plus ou moins ingénieux, qui ont pour origine, non pas une tradition ou une révélation divine, mais une invention récente et tout humaine. Ces cosmogonies imaginaires sont à la religion ce que le roman est à l'histoire.

Une création sociale et religieuse faite au fond d'un cabinet par un savant ou même par un homme de génie, n'a d'autre valeur qu'une valeur littéraire. C'est un poëme plus ou moins bien ordonné, plus ou moins séduisant par la beauté de la forme. Ce n'est pas une réalité pratique et sérieuse.

Il y a eu des associations de famille instituées, et longtemps maintenues: mais aucune en dehors de l'idée chrétienne.

La plus célèbre est celle des frères Moraves: parmi eux, il y a des célibataires, considérés comme s'élevant au plus haut degré de perfection: puis, des familles conservant leur unité distincte dans le sein de l'association générale. Mais tous croient à la divinité de JésusChrist tous admettent le péché originel (1), la nécessité de l'esprit d'abnégation et de pénitence, le devoir et le mérite de la lutte contre les passions; tous reconnaissent une autorité forte et se soumettent à une discipline sévère.

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Au reste, les frères Moraves n'aspirent pas à refondre sur leur patron l'humanité tout entière: leur plus grande ambition serait de maintenir et de multiplier leurs petites communautés, au sein des grandes sociétés politiques actuellement existantes. Mais leur nombre a plutôt diminué qu'augmenté depuis un demi-siècle.

Ajoutons enfin que les frères Moraves se sont principalement recrutés parmi les paysans des contrées les plus reculées de l'Allema❤ gne, et qu'ils apportaient dans l'association cette simplicité primitive des peuples naissants, qui offre moins de résistance à des organisations à priori.

Un autre essai non moins fameux, qui est arrivé également à l'état d'exécution et de réalisation pratique, ce sont les Réductions du Paraguay. Ces associations, que les Jésuites avaient fait accepter par la

(1) Ils admettent le besoin du baptême pour la régénération de l'homme; procédant primitivement des hussites, ils communient sous les deux espèces, et se croient ravis an ciel quand ils ont reçu l'Eucharistie. Vers la fin du dix-septième siècle, le comte de Zuizendorf leur donna des terres et des forêts, et procura à cette secte, en s'y affiliant, un développement momentané assez considérable. (BERGIER, Dictionn, théolog., au mot HERNUTES.) Il sont soumis à un noviciat et font des vœux.

persuasion seule à de pauvres sauvages, pour les élever par degrés jusqu'à la civilisation, ont été en général appréciées comme elles devaient l'être. Cependant, quelques écrivains du dix-huitième siècle les ont décriées, comme des tentatives de théocratie, comme des preuves d'une ambition temporelle insatiable de la part des disciples de saint Ignace. « Les accusations faites sur ce point contre les Jésuia tes, dit l'abbé Gioberti, sont d'autant plus singulières et amusantes a (piacevoli), que les philosophes de qui elles partent n'ont jamais a su civiliser, je ne dirai pas une race ou une nation, mais même a une tribu ou une famille; et aujourd'hui, les superbes dépositaires « de la civilisation moderne, après avoir détruit les missions, loin a de pouvoir policer et éclairer des peuples sauvages ou incultes, a n'ont su que les enfoncer dans de plus épaisses ténèbres comme « ceux de la péninsule indienne, ou procéder avec une froide cruauté « à leur extinction graduelle, ainsi qu'on l'a fait dans cette partie de « l'Amérique, où les hommes se vantent d'offrir dans leurs constia tutions le plus exquis modèle de la liberté (1). Le fait est que jus« qu'à présent les missionnaires ont été les seuls civilisateurs des << Barbares, et il ne saurait en être autrement : car eux seuls peu« vent insinuer dans les âmes la parole régénératrice avec cette in⚫ fatigable patience, cette suave onction, cette sage indulgence, cette « prévoyance pénétrante, cette charité pleine de sollicitude, d'ar• deur et d'héroïsme qui ne se trouvent guère en dehors du sacera doce catholique.

« Et parmi les divers ordres de missionnaires, aucun ne montra < plus de longanimité, de douceur, d'habileté, et n'opéra plus de « fruits à cet égard que celui des Jésuites. Un seul d'entre eux, Fran<< çois Xavier, fit beaucoup plus en peu d'années pour les malheureux « habitants du Malabar que la fameuse compagnie des Indes en l'es pace de deux siècles. Et dans le Paraguay, les disciples d'Ignace • donnèrent au monde le spectacle inouï d'une multitude sauvage, « changée comme par enchantement en une société d'hommes poa licés, au moyen d'une discipline paternelle, il est vrai, mais mi« nntieuse, assidue, scrupuleuse et forte comme celle au moyen de • laquelle Lycurgue faisait l'éducation virile des durs et indociles ⚫ habitants de la Laconie. Si, au lieu d'interrompre cette entreprise, a ceux qui avaient le pouvoir l'avaient favorisée, étendue et accrue, a la race cuivrée des Américains serait aujourd'hui élevée au même • degré de noblesse et de fécondité que la race blanche, tandis qu'au << contraire il n'en survit que quelques misérables vestiges, au grand « désespoir des vrais philanthropes et à l'éternelle honte des Euro• péens (2). »

Čes Réductions du Paraguay, auxquelles tous les publicistes raisonnables ont rendu une éclatante justice, devaient, dans le vaste plan (1) Les Etats-Unis.

(2) Il Primato, de Gioberti, tom. II, édition de Lausanne, p. 236-237.

de leurs fondateurs, embrasser la totalité des sociétés indiennes de l'Amérique. Mais ce genre d'associations n'est évidemment applicable qu'à l'enfance sociale des peuples.

Depuis la Révolution française, toutes les associations furent détruites, par ceux mêmes qui avaient proclamé les principes d'égalité, de fraternité, de solidarité, et qui avaient triomphé au nom de ces principes. Par eux, s'était opérée la destruction d'un vieil édifice; ils manquaient, pour en construire un nouveau, du seul ciment solide et durable, la religion.

ALBERT DU BOYs, ancien magistrat.

(La suite à un prochain numéro.)

Les grands problèmes de l'éducation se posent successivement devant toutes les assemblées de l'Europe. Ces jours derniers, le Parlement anglais a dû s'en occuper. Le comte d'Arundel et Surrey, l'un des membres catholiques les plus éminents de la Chambre des Communes, a pris la parole. Nous rendrons compte de cette remarquable discussion.

Nouvelles Religieuses.

VOYAGE DU SAINT-PÈRE.

Voici comment le journal officiel de Naples raconte la séparation du Pape et du roi:

A peine Sa Sainteté, le roi et le duc de Calabre furent-ils descendus de voiture, que les deux derniers se jetèrent aux pieds du Souverain-Pontife pour les lui baiser dévotement. Alors S. M., toujours à genoux, lui demanda sa bénédiction: Oui, dit le Saint-Père, je vous bénis; je bénis votre famille; je bénis vo« tre royaume; je bénis votre peuple. Je ne saurais que vous dire pour exprimer « ma reconnaissance de l'hospitalité que vous m'avez donnée. Je n'ai rien fait, répondit le roi, qu'accomplir le devoir d'un chrétien. Oui, reprit Pie IX d'une voix émue, votre affection filiale a été grande et sincère. » Puis il releva le roi, le pressa sur son cœur en l'embrassant tendrement, et remonta dans sa voiture, où la famille royale et la suite vinrent lui baiser les pieds.

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ITALIE.

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Le Cardinal Cadolini, Archevêque de Ferrare, vient de mourir le

11 de ce mois. DIOCÈSE DE PARIS. Une neuvaine solennelle de prières commence dans l'église de Saint-Merry, en l'honneur de la bienheureuse Marie de l'Incarnation. Mgr Sibour, Archevêque de Paris, donnera le salut solennel à l'occasion de l'ouverture. Le dimanche 28, Mgr le nonce apostolique, Archevêque de Nicée, célébrera, à 8 heures du matin, la sainte messe, à laquelle se fera la communion générale. Tous les jours de la neuvaine, un de MM. les curés de Paris et de la banlieue viendra offrir le saint sacrifice à l'autel de l'illustre carmélite. Tous les soirs, il y aura sermon à sept heures et demie; il sera suivi de la bénédiction du très-Saint-Sacrement. Les prédicateurs sont : MM. Gabriel, Legrand, Duquesnay, Petetot, de Guerry, Martin de Noirlieu. Le 29, M. l'abbé Surat, vicaire-général de Paris, présidera la cérémonie de clôture.

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Nous venons de perdre un de ces hommes dont la vie tout entière se passe dans la pratique du bien. Le R. P. Varin, de la compagnie de Jésus, à 81 ans,

employait encore, il y a quelques jours à peine, ce qui lui restait de vie au service des âmes. Après avoir noblement porté l'épée, il entra dans les ordres, et choisit dans des temps difficiles un ministère qui lui ménageait encore tant de combats et tant d'épreuves. Il fit partie de ces hommes généreux qui, pleins de foi dans l'avenir, espéraient, contre toute espérance, et sous le nom de Pères de la Foi, conservaient à l'Eglise le germe d'un institut qu'elle avait avec regret vu tomber devant les haines antireligieuses du dix-huitième siècle. Depuis lors, il n'a cessé de travailler à la vigne du Seigneur avec un zèle que rien n'a pu ralentir. Sans entrer dans le détail de toutes ses bonnes œuvres, nous nous bornerons à dire qu'en donnant aux Dames du Sacré-Cœur tous les statuts dont l'expérience a sanctionné la profonde sagesse, il a perpétué au delà de sa vie le bien que son ministère infatigable a produit dans les âmes.

DIOCESE DE NANTES. Une pieuse et bien triste cérémonie réunissait, le 18 avril, dans la chapelle du grand séminaire, une partie du clergé du diocèse accouru de tous les points du département, pour payer à une mémoire bien chère un juste tribut de reconnaissance et d'amour.

A dix heures et demie l'office commençait. Tout dans la chapelle était ten lu de deuil, jusqu'aux ornements de l'autel. Partout les lugubres insignes de la mort; l'intérieur n'était éclairé que par des cierges d'honneur et le riche luminaire du sanctuaire. Au milieu s'élevait un catafalque en forme de pyramide quadrangulaire. Au dessus se dressait, soutenu par deux anges, le cœur du saint abbé de Courson. Des inscriptions placées sur les faces de la pyramide rappelaient ses

vertos.

Les absoutes ont été faites, les deux premières par MM. les vicaires-généraux, la troisième par Monseigneur, dans la chapelle des philosophes.

DIOCESE DE LANGRES.

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- Une somme de 876 fr., complément des collectes faites dans le diocèse de Langres pour l'œuvre du denier de saint Pierre, vient d'être versée entre les mains de S. Exc. le Nonce apostolique. Le total de ces collectes s'élève, pour ce diocèse, à la somme de 45,876 fr.

DIOCESE DE BESANÇON. On écrit de Lons-le-Saulnier :

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Pendant que certains hommes, au moyen de dangereuses doctrines, cherchent à soulever les pauvres contre les riches; d'autres, mieux inspirés, se sont occupés la semaine dernière de les soulager, de les consoler, de leur infuser cette force morale qui vient d'en haut et qui nous est transmise par la religion. Pendant les huit jours de la semaine dernière, à l'église des Cordeliers, sous la conduite et la direction de M. l'abbé Pachod, qu'on trouve toujours là où il y a une bonne action à faire, pendant toute la semaine dernière, disions-nous, la religion a rassemblé les indigents de notre ville pour les instruire, pour les consoler et les secourir. Elle les a rassemblés, mais en appelant au milieu d'eux les heureux et les riches de la terre, afin de montrer à ces derniers le spectacle moralisant des misères du pauvre, d'émouvoir leur piété, d'ouvrir leurs cœurs, de délier leur bourse et de leur rappeler que devant Dieu dans le ciel, devant la religion ici-bas, tous les hommes sont égaux; qu'ils ne se distinguent que par leurs œuvres; que le plus élevé n'est point le plus riche, mais le plus vertueux.

Huit jours durant, la retraite religieuse a continué, et dimanche, tous, au nombre de cent cinquante environ, se sont approchés de la sainte Table. Nous nous trompons en disant cent cinquante, car, au milieu de ces indigents de la terre, on voyait un grand nombre de fidèles plus favorisés des biens de la fortune. Les dames de notre ville avaient tenu à honneur de se mêler à ceux que la religion leur ordonne d'aimer comme des membres du Christ et par conséquent comme des frères.

1

< Lundi dernier, ceux pour qui la retraite des huit jours derniers avait été ouverte, ont été réunis à la maison de l'Ermitage. Là, après une messe solennelle d'actions de grâces, un copieux, mais modeste déjeuner, leur a été offert; ceux qui les servaient étaient leurs bienfaiteurs et leurs bienfaitrices.

Plusieurs dames avaient sollicité d'être dans cette circonstance les servantes du pauvre. C'était une chose bien autre qu'un acte de nivellement et d'égalité démocratiques. C'était de l'humilité chrétienne, c'était de l'amour à la place de

l'envie.

Après le dîner, les convives ont emporté chez eux les débris du repas. Ces restes devaient donner le pain du jour à leur famille. »

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Un accident déplorable a bouleversé ce matin toute notre population, au moment où, suivant l'usage, la procession du Saint-Sacrement allait sortir solennellement de toutes les paroisses pour porter le Viatique aux malades. L'affluence était immense, surtout à la métropole : la procession était précédée par un corps de musiciens et accompagnée par un piquet de grenadiers.

« A peine était-elle sortie de l'église, que le ciel se couvrit d'un nuage tellement épais que la ville fut ensevelie dans les ténèbres : la pluie qui commençait à tomber força la procession à rentrer dans l'église; mais tout à coup on entendit un long roulement de tonnerre, suivi d'une violente explosion semblable à celle d'une grosse pièce d'artillerie. C'était la foudre qui tombait sur la tour de la cathédrale, s'introduisant par une des ouvertures du clocher, et signalait ainsi sa terrible présence au sein de l'église.

« Le jeune fils du carillonneur, qui était à quelque distance de son père, n'a éprouvé qu'une forte commotion: le père, qui était suspendu à la sonnerie, a été asphyxié et est tombé, sans vie, du haut du clocher sur les dalles de l'édifice. La foudre, en disparaissant, a mis le feu à la charpente du dôme de la tour; le vent qui soufflait avec violence a activé l'incendie, et tous les efforts de la popuJation n'en ont pu arrêter les progrès. A trois heures, le sacrifice était consommé, le dôme était complétement dévoré, et alors seulement l'on put commencer à prendre des mesures pour arrêter l'incendie au dedans du monument et pour l'empêcher de se répandre au dehors.

« L'église cathédrale de Saragosse était l'un des plus célèbres et des plus remarquables monuments de la capitale de l'Aragon.▸

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BELGIQUE. — BRUGES. Fétes jubilaires du Saint-Sang. Avant 1150, époque où le précieux trésor du sang de notre Sauveur fut apporté à Bruges, la chapelle de Saint-Basile, où se conserve aujourd'hui cette sainte relique, servait depuis le neuvième siècle, de chapelle privée aux comtes de Flandre. Entre autres reliques on y vénérait celle de sainte Barbe, précieusement conservée dans une boîte de cristal taillé, enchâssée dans des ornements ciselés en argent. En 1150, le Saint-Sang devant désormais être conservé seul dans l'antique chapelle, toutes les reliques furent transférées dans les diverses églises de la ville. Celle de sainte Barbe nommément passa plus tard à l'église des PP. Augustins, et en 1810 le P. De San, dernier survivant du couvent de Bruges, en fit don à l'église de SaintJacques aujourd'hui encore on y vénère ces reliques.

Saint Jacques est une des plus anciennes églises de Bruges. En 1240 la juridiction de l'église de Sainte-Walburge, embrassait une fort nombreuse population disséminée sur une grande étendue de terrain, tant à l'intérieur qu'à l'exté- ̧ rieur de la ville. Elle avait à desservir comme paroissiens tous ceux qui habitaien l'endroit connu aujourd'hui sous le nom de Wagelwater le long du canal d'Os

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