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clerc tomba dans ses bras percé de dix-sept balles. M. Leclerc alla chercher son second fils, âgé de 18 ans, lui remit le fusil de son frère et revint devant la barricade.

Nous savons que le nom de M. Leclerc a été accueilli avec une grande faveur au sein de la population parisienne, de la garde nationale et de l'Assemblée législative. L'élection de M. Leclerc serait une réponse à la glorification de l'insurrection que le socialisme a cherchée dans l'élection de M. de Flotte. On nous assure qu'elle est reçue avec une égale sympathie dans les diverses nuances du parti modéré. >>

Les socialistes voteront pour M. Eugène Sue avec le plus grand ensemble. Le parti modéré donnera-t-il seul l'exemple de la discorde et de l'indiscipline?

Il importe qu'une prompte décision soit prise.

La nomination de l'auteur du Juif errant et du Berger de Kravan serait une honte à laquelle, nous l'espérons, les honnêtes ne se résigneront pas.

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La séance est ouverte à deux heures et demie.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du budget.
On revient aux chapitres réservés du budge

M. BERRYER, rapporteur, explique que le vote de la loi sur l'enseignement a amene des modifications dans le budget. Sur les modifications proposées par le ministre lé commission propose de laisser à 8,000 fr. le chiffre actuel du traitement du recteur de Paris et de diviser en trois classes au lieu de cinq les recteurs auxquels seraient accordés des traitements de 6,000 fr. pour 18 d'entr'eux, de 5,000 fr. pour 24 et de 4,500 fr. pour 43.

La commission qui place les recteurs actuellement existants dans la première classe, propose de fixer les classes, non pas d'après les localités, mais d'après les mérites et les services des recteurs.

Quant aux inspecteurs, la commission en accepte quatre à Paris, avec un traitement de 4,000 fr., et vingt seulement au lieu de quarante-trois qui existent maintenant pour les départements, avec nn traitement de 3,000 fr.

Les secrétaires d'académie sont divisés par la commission ainsi qu'il suit : à Paris, 1, avec un traitement de 2,400 fr.; dans les départements, 18, avec un traitement de 2,000 fr., 24 avec traitement de 1,800 fr., et 43 avec un traitement de 1,500 fr.

Enfin la commission propose une allocation de 1,000 fr. pour les frais de bureau de chacun des 86 rectorats, et adopte le chiffre de 68,800 fr. demandé par la commission pour les frais de tonrnée.

M. RAUDOT demande l'impression des propositions de la commission.

M. LE PRÉSIDENT. Vous les trouverez dans le Moniteur. Alors nous ajournons à demain le vote des divers chapitres.

M. BERRYER. Nous ne vous proposons pas de réduire, dans le chapitre XVI, le chiffre du traitement des inspecteurs de l'instruction primaire; nous vous proposons seulement de modifier ainsi la proportion des diverses classes d'inspecteurs :

20 de première classe (au lieu de 32), 40 de deuxième classe, 50 de troisième classe, 60 de quatrième classe (au lieu de 70), et 130 de cinquième classe (au lieu de 170). Les traitements seront les mêmes; le total général subira seulement une faible réduction.

Relativemens aux frais de tournée, nous avons maintenu le chiffre de 6,000 fr. pour

les inspecteurs supérieurs; quant aux autres, nous avons réduit le chiffre de 800 fr. à 600. Le total se trouve ainsi réduit de 292,000 fr. à 217,000.

Nous avons rejeté le crédit porté pour frais de déplacement.

En résumé, nous vous proposons de réduire à 683,200 fr. le crédit total de 854,000 fr. demandé pour le chapitre XXI.

Nous maintenons au chapitre XVII le chiffre de 30,000 fr. demandé pour encourager les auteurs de livres utiles à l'iustruction primaire.

Enfin, il y a au chapitre 9 du ministère des cultes un crédit de 10 mille francs attribué aux dépenses des cultes en Algérie.

Votre commission a consenti à vous proposer de ne voter ce crédit qu'à la condition que les 10 mille francs seront diminués au budget de la guerre.

M. LE PRÉSIDENT. Je ne mets aux voix que cette dernière proposition, les autres étant réservées.

Le crédit est adopté.

L'Assemblée revient à la discussion du budget de l'intérieur.

M. BERRYER propose de voter sous le numéro 1 bis un crédit de 25,000 fr. pour les employés hors cadre pendant l'année 1850.

Le crédit est adopté.

M. LE PRÉSIDENT. Nous revenons au chapitre 3. Dépenses secrètes ordinaires de sûreté générales 832,000 fr.

M. MORELLET. Messieurs, il s'agit ici d'une question de moralité publique.
Une voix M. Favre a dit cela l'autre jour. (On rit.)

Chap. 8. Dépenses générales du personnel des gardes nationales, 180,000 fr. La commission propose de réduire à 112,000 fr.

M. SAUTEYRA. Messieurs, dans ce chapitre est compris le traitement du commandant supérieur des gardes nationales de la Seine, qui cumule et qui est représentant; ce traitement est de 30,000 fr.; j'en demande la suppression. (Ah! ah!)

M. BERRYER, rapporteur. Messieurs, ce que vous venez d'entendre renferme trois erreurs. (Rires.)

D'abord la somme allouée au commandant des gardes nationales de la Seine n'est pas de 30,000 fr., mais de 20,000 fr. seulement, puisque la ville de Paris a pris à sa charge un tiers du traitement. (Oh! oh!)

En second lieu, ce n'est point un membre de cette Assemblée qui commande en chef les gardes nationales de la Seine; il n'y a donc pas de cumul. (Nouvelle hilarité.)

Enfin, ma troisième observation, c'est que le préopinant se trompe quand il dit qu'il n'y a pas eu de crédit voté pour cet objet en 1849; ce crédit fut voté par une loi spéciale. (Hilarité générale.)

Après ces trois erreurs, qui sont incontestables, je pense que M. Sauteyra ne persistéra pas. (Nouveaux rires.)

M. SAUTEYRA à la tribune. (Oh! oh! Assez! Vous n'êtes pas encore convaincu?) Je suis fâché de citer des noms propres, mais il me semble qne celui qui commande la garde nationale de la Seine est bien le général Changarnier...

Une voix M. le général Perrot est commandant en chef des gardes nationales de la Seine.

Chp. 20. Subvention aux théâtres nationaux, 1,273,000 fr.

M. RAUDOT propose une réduction de 274,000 fr.

Une voix Demandez la suppression totale.

M. RAUDOT soutient que l'Etat ne doit pas subventionner les théâtres de Paris plus qu'il ne subventionne les théâtres de Bordeaux ou de Rouen. (Interruption.)

L'argent fourni par tous les contribuables doit être dépensé dans l'intérêt de tous et non pas seulement dans l'intérêt des Parisiens.

M. NOEL PARFAIT. Est-ce qu'il n'y a que des Parisiens à Paris?

Une voix Ah! l'auteur de la Juive de Constantine va défendre les intérêts de l'art. Une autre voix : C'est du désintéressement. (Rires.)

M. RAUDOT. On parle des intérêts de l'art? Est-ce un bon moyen de protéger l'art que de donner de l'argent aux théâtres? Non, cela encourage les théâtres à l'indolence, cela les porte à s'endormir sur l'oreiller de la subvention. (Rires.) Je lis dans une bro

chure : « Voyez ce que produit l'intervention de l'Etat dans l'éducation artistique; voyez ce que produisent nos écoles de peinture et de sculpture; voyez ce que produit lə Conservatoire de musique et de déclamation, depuis que l'Etat s'est chargé de l'éducation dramatique. Combien avons-nous cu de Comtat et de Fleury? Meyerbeer vient d'Allemagne, Rossini d'Italie. Il faut laisser les artistes à l'inspiration de leur génie et de la liberté!

Voix: Quel est l'auteur de la brochure?

N. RAUDOT, lisant. L'artiste se révèle lui-même si on lui donne la liberlé et le soleil.

Il ne faut pas faire d'artistes de par la loi! Ce serait un nouveau droit au travail que nous établirions au préjudice de l'Etat.

Voix L'auteur! l'auteur!

M. RAUDOT. C'est moi! (Rire général.)

En résumé, je propose de laisser à Paris le soin de subventionner ses théâtres comme Rouen, comme Bordeaux, comme Marseille subventionnent les leurs !

M. LE PRÉSIDENT. On a demandé le scrutin de division sur l'amendement.

M. Baroche, ministre de l'intérieur, monte à la tribune; il y est précédé par M. Berryer.

M. PARFAIT. M. de Lamartine veut parler.

M. BERRYER. Je prends la párole avant l'orateur illustre qui vient de nous ètre annoncé (Rires) pour soumettre à l'Assemblée des observations financières et toutes matérielles.

La commission du budget a maintenu le chiffre total demandé par le gouvernement. Nons nous trouvions en présence d'engagements pris avec certains théâtres par le gouvernement et sanctionnés par les Assemblées...

Voici le résultat du scrutin sur la subvention des théâtres :

Votans

Majorité absolue
Bulletins blancs

Bulletins bleus

L'Assemblée n'a pas adopté l'amendement.

618

310

228

390

M. GUSTAVE DE BEAUMONT dépose le rapport de la commission chargée d'examiner le projet de loi relatif à une demande de crédit destiné à l'entretien de l'armée ex. péditionnaire de la Méditerranée.

L'Assemblée renvoie à la commission la subvention du Théâtre-Italien.

Chap. 25. Secours à des personnes dans l'indigence et qui ont des droits à la bienveillance du gouvernement, frais de rapatriement de Français indigents, etc., 717,000 fr.

H, BERRYER présente d'excellentes observations sur l'inconvenance d'avoir dans le budget un chapitre spécial sous l'intitulé de secours aux condamnés politiques.

Une réduction de 300,000 fr. sur l'article spécial à ces condamnés politiques est proposée par M. Morin (de la Dròme) et adoptée.

Ce vote jette une certaine émotion dans l'Assemblée. Des cris partent du sommet de la Montagne; des interpellations sont adressées au président par MM. Baudin, Miot, Valentin et autres.

M. LE PRÉSIDENT, se tournant vers ces citoyens : Que voulez-vous... Ce n'est pas moi qui ai voté... Prenez-vous-en à l'Assemblée. (On rit.)

A la Montagne: Très-bien! très-bien! nous verrons la suite!

M. LE PRÉSIDENT. A demain... Nous nous occuperons des combattants de Juillet et de Février. (Bruit.)

La séance est levée à six heures et demie.

Chronique et Faits divers.

Le Président de la République est parti aujourd'hui pour Saint-Germain pour passer une revue.

L'inauguration du chemin du Nord (section de Saint-Quentin), aura définitivement lieu dans les premiers jours de mai prochain.

Le gros lot de la loterie des Artistes a été gagné par M. Marel, curé de Lisle (Vaucluse), qui a donné ordre de le vendre et d'en convertir en rentes sur l'Etat le produit, qu'il consacre aux indigents de sa commune.

-

Une trombe a éclaté lundi, 8 avril, à cinq heures du soir, sur le hameau de Fay, canton d'Oisemont (Somme). Elle a enlevé une grange appartenant à MM. de Fontenille, et des bâtiments appartenant à MM. Sagniez frères, ainsi que plusieurs arbres. Elle a commencé ses ravages à Fresneville, et dans la distance de deux kilomètres, de Fresneville à Fay, elle a renversé la plupart des arbres qui étaient sur son passage.

-M. Antonin Crespel de La Touche, frère du regrettable représentant de ce nom, vient d'être élu membre du conseil-général du département du Morbihan. M. Crespel de La Touche a obtenu 1,613 voix sur 1,628 votants.

-Les presses françaises qui donnent du travail, conséquemment du pain, à plus de cent mille ouvriers, ont imprimé dans les trois premiers mois de 1850, savoir ouvrages écrits en toutes langues mortes ou vivantes, 1,876; estampes, gravures, etc., 113; musique, 68, total, 2,057 ouvrages.

-

- M, Burdel, cultivateur et ancien notaire à Perthes (Seine-et-Marne), est capitaine d'une compagnie de pompiers. Il s'est servi, de la manière la plus utile, du cadre fourni par sa compagnie, pour créer une association mutuelle de secours par le travail. Il a fait un règlement qui, outre les articles relatifs au service de la garde nationale et des pompes, comprend les obligations d'assistance réciproque que se doivent les soldats de cette compagnie, en cas de maladie ou d'accident.

Voici ce qu'écrit M. Burdel à ce sujet :

<< Dans les campagnes, où tout le monde est cultivateur, où chacun peut faire l'ouvrage de son voisin, si de pareils secours mutuels étaient organisés, ils rendraient de grands services, car vous savez que le travail des champs souvent ne peut se remettre et ne peut se remplacer par de l'argent. Ils sont faciles et possibles, puisque de chaque compagnie de pompiers ou de gardes nationaux ruraux on pourrait faire une société d'associations mutuelles.

«Pour la former, voici mon organisation pour la compagnie de pompiers de Perthes.

« 1o Un contrôle de travail est tenu par le sergent-major comme le contrôle de service. Personne n'a le droit de manquer à l'appel.

2o Un petit règlement imprimé est donné à chaque homme, c'est la loi

commune.

5° Toutes les petites infractions au service sont punies par des amendes, lesquelles avec une cotisation de quelques centimes par mois forment une masse de secours qui, appartenant à la compagnie, n'est plus une aumône, mais bien une propriété commune où chacun a le droit de prendre sans honte et presque sans demander.

4o Un conseil de famille, nommé le 1er janvier de chaque année, dispense les secours et juge les infractions. »

Deux exemples feront voir de quelle nature sont les secours que se donnent entre eux les hommes de la compagnie.

Un des soldats est attaqué d'une fluxion de poitrine, après avoir été faire son service de pompier dans un incendie. On était alors en pleine moisson, époque à

laquelle on ne peut se procurer des ouvriers à prix d'argent dans la commune de Perthes; il avait à moissonner des champs dans deux communes.

En vertu du règlement de la compagnie, vingt hommes inscrits sur le contrôle sont commandés. Ils vont couper les blés de leurs camarades dans une des communes. En quelques heures la moisson est faite. Le lendemain, vingt autres hommes de service vont accomplir la même besogne dans l'autre commune.

Un second fait semblable se passe à l'époque des semences. Jules Germain, revenant de Fontainebleau, est écrasé par sa voiture, et a les cuisses cassées; il a des labours à faire, des blés à semer, des fumiers à conduire, des vendanges à rentrer. Le malheureux est sur son lit de douleur. Le capitaine commande une escouade d'associés, et l'ouvrage est fait en un tour de main.

N'y aurait-il pas moyen, dans nos campagnes surtout, d'imiter ce bel exemple?

Laissons les déclamations à nos adversaires et opposons-leur des actes.

VARIÉTÉS.

Tableau de l'éloquence chrétienne au IV° siècle.
PAR M. VILLEMAIN.

Nouvelle édition, revue et augmentée.

I.

Nous avons fait connaître à nos lecteurs, il y a peu de mois, la remarquable préface dont M. Villemain a enrichi la nouvelle édition de son Tableau sur l'éloquence chrétienne au IV° siècle. Aujourd'hui, nous venons rendre compte de l'ouvrage lui-même.

Ce livre n'est, comme on sait, que le développement d'un Essai publié par l'auteur en 1813, comme introduction à des choix des Oraisons funèbres de Bossuet, Fléchier, Massillon, Bourdaloue, etc., à l'usage des Lycées.

Jusqu'à cette époque, les Pères de l'Eglise n'avaient guère été étudiés un peu sérieusement que par les théologiens ou par des laïques qui s'occupaient d'histoire ecclésiastique. Les grands écrivains du dix-septième siècle, dans leur austérité religieuse, eussent considéré comme une sorte de profanation de chercher dans saint Cyprien, dans saint Jérôme, dans saint Augustin, autre chose que la tradition de la foi chrétienne. Au dix-huitième siècle, quelques professeurs de l'Université, esprits restés sérieux au milieu de la légèreté sceptique de leur temps, ne négligèrent pas complétement cette pieuse littérature. Mais, emprisonnés qu'ils étaient dans leurs traditions jansénistes et dans leurs préjugés classiques poussés parfois jusqu'au paganisme, ils ne comprirent ni les uns ni les autres le parti que tout fidèle-historien, polémiste, littérateur,-pouvait et devait tirer pour la défense de sa foi de ces monuments de l'antiquité chrétienne.

Ce fut M. de Châteaubriand qui, d'abord dans le Génie du Christianisme, puis dans les Martyrs, appela l'attention de ses contemporains sur cette source admirable où puisent aujourd'hui si

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