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En réponse aux discours qui ont été prononcés par M. Salles, adjoint au maire, et par M. Trescaze, président de la commission, élue par les fondateurs, Mgr a adressé à la foule quelques paroles touchantes, pleines d'onction, et qui ont été accueillies avec une picuse reconnaissance.

PORTICI. — Un officier de l'escadre française mouillée dans la rade de Naples, écrit la lettre suivante :

« Nous primes le chemin de Portici. Avant midi, nous mettions pied à terre au palais. Nous y attendîmes l'amiral et l'ambassadeur, puis on nous conduisit dans un grand salon ou nous restâmes encore près d'un quart d'heure. Alors un monsignore, vêtu de violet, vint prendre nos deux grands personnages, sans doute pour que l'ambassadeur présentât l'amiral au Saint-Père. Ils passèrent dans une autre salle, dont la porte se referma sur eux, mais elle s'ouvrit enfin et nous fumes admis à notre tour.

<< Le spectacle était saisissant par sa simplicité autant que par sa grandeur : un seul meuble dans cette vaste salle, une table sur laquelle était un crucifix dont la croix était simplement de bois noir, et, appuyé contre cette table, le vicaire de Jésus-Christ, seul, n'ayant pas même auprès de lui un de ses cardinaux. Il n'y a pas, je crois, de pompe royale qui eût pu nous impressionner autant que cette majesté solitaire, qui resplendissait d'autant plus qu'elle repoussait tout ornement. La soutane blanche de Pie IX le grandissait bien plus que ne l'eût fait la pourpre royale, et il n'y a pas de couronne qui l'eût mieux paré que sa petite calotte.

Le chef de l'Eglise était donc là devant nous, plein de mansuétude et de bonté, nous regardant de l'œil le plus paternel qu'il soit possible d'imaginer, et nous accueillant avec un demi-sourire qui semblait appeler à lui tous les cœurs.

L'amiral nous présenta au Pontife, en ajoutant qu'il aurait été heureux d'avoir à lui faire cortège à son retour dans ses Etats. Le Saint-Père répondit en italien par quelques mots agréables pour notre marine, disant que depuis son arrivée à Gačte il avait vu beaucoup d'officiers français, et que c'était pour lui une grande consolation d'avoir reconnu que la foi subsistait encore autant parmi

nous.....

⚫ Cela dit, les trois aumôniers de l'escadre vinrent, après la triple génuflexion d'usage, baiser successivement la mule rouge et brodée d'or que portait le SaintPère. Pendant cette cérémonie, Pie IX disait tout naïvement: Ah! celui-ci, je « le connais; celui-là, je ne m'en souviens guère; quant à l'autre, je ne l'ai jamais vu, je crois. » Il s'agissait de notre abbé, qui est tout nouveau dans l'escadre.

Nous étions trop nombreux et la présentation avait un caractère trop cérémonieux pour que le Pape se laissât aller à causer un peu avec nous, comme il l'a fait avec d'autres visiteurs.

L'audience terminée, il s'agissait de prendre congé. L'ambassadeur et l'amiral ont seuls baisé la main du Pape ; j'aurais donné je ne sais quoi pour pouvoir en faire autant...

« Le mouvement du départ a commencé. Le Saint-Père n'a eu qu'à reculer de quelques pas pour se trouver sur le seuil de l'appartement voisin, qui est, je le suppose, son oratoire; nous avons également reculé, sur toute la longueur de la salle, dans l'attitude d'un profond salut, jusqu'à ce que nous fussions arrivés à la porte par laquelle nous étions entrés. Alors, le Pape, par un léger mouvement, un simple pas de côté, s'est trouvé dans l'autre pièce, et nous avons pu nous retourner et sortir à la manière ordinaire.

« Il va sans dire que nous n'avons pas vu le Pape sans faire bénir des chapelets et des médailles. »

C'est le 25 mars, que le vice-amiral Parseval était admis avec son état-major en présence du Saint-Père: le 27, Mgr Garibaldi, nonce de sa Sainteté à Naples, alla complimenter le vice-amiral à bord du Friedland, qui en cette circonstance arbora le pavillon pontifical, avec le salut d'usage.

Séance de l'Assemblée.

Le chemin de Paris à Marseille sera-t-il concédé à une seule compagnie ou à deux? Telle est la question qui a occupé toute la séance d'aujourd'hui.

M. Desmaroux a inauguré le débat. Il est un des auteurs de l'amendement en faveur des deux compagnies, et il a défendu avec convenance el avec mérite le système qu'il présentait. M. Vitet, au nom de la commission, a vivement attaqué ce projet. M. Combarel de Leyval a répliqué. M. le ministre des travaux publics et M. Béchard ont également pris la parole.

Ici a commencé une extrême confusion. Des amendements et des sous-amendements étaient en présence; et on cût dit que le gouvernement et la commission, ainsi que les auteurs des propositions diverses, luttaient à qui obtiendrait le vote sans vouloir en déclarer toute la portée ni en accepter toutes les conséquences.

M. Berryer est intervenu dans le débat. Il a très-nettement formulé l'avis de la commission du budget. Deux compagnies, mais facultatives, c'est-à-dire le choix laissé au gouvernement, de sorte qu'il ne soit pas lié si les deux compagnies qui se présentent ne remplissent pas les conditions désirables.

Si l'on avait voté après l'éloquent orateur, son opinion aurait probablement prévalu. Mais M. Bineau, en voulant élucider encore la question, a eu le malheur de la compliquer. Le ministre accepte les deux compagnies, mais à la condition qu'elles seront solidaires. Autant vaudrait dire une seule compagnie.

C'est ce qu'ont fait ressortir les adversaires du gouvernement; et l'Assemblée, longtemps hésitante, a fini par être de leur avis.

Il y aura donc deux compagnies, indépendantes, distinctes. Reste maintenant à les trouver.

La séance a été levée à six heures et demie. La discussion continuera demain.

Bulletin de la politique étrangère.

SUISSE.-M. Fazy, chef du département de police de Genève, ayant refusé d'exécuter les arrêtés du Conseil fédéral concernant l'expulsion des membres de certaines associations d'ouvriers allemands, le Conseil fédéral a décidé de porter plainte auprès du gouvernement de Genève contre un pareil procédé et d'exiger péremp toirement l'exécution de ces arrêtés.

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ROYAUME DES DEUX-SICILES.

Au moment où toutes les monarchies de l'Europe ont été ébranlées par les peuples soulevés au cri de liberté, il est assez curieux de voir le royaume des Deux-Siciles déclarer par pétitions qu'il en a assez de la constitution qu'on lui a donnée et demander le retour à l'ancien régime. Nous avons jusqu'à présent hésité à consigner ce fait auquel nous ne pouvions croire, tant il est extraordinaire au milieu de tout ce qui se passe. Il faut pourtant bien se rendre à l'évidence. Le mouvement est parti de la province de l'Abbruzze-ultra; sa pétition est datée du 13 août 1849; viennent ensuite la Capitanata en septembre, la terre de Labour en octobre, et ainsi des autres.

La réaction est d'autant plus notable, qu'elle se manifeste dans le pays dont le monarque a été le plus violemment attaqué par la presse démagogique et qu'elle a dénoncé comme un tyran, comme le bourreau de ses sujets, etc. La réponse des Napolitains à ces invectives n'a pas besoin de commentaires.

ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE.

Séance du 11 avril.

- PRÉSIDENCE DE M. DARU, VICE-PRÉSIDENT.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion sur le chemin de fer d'Avignon.

MY. COMBAREL de Leyval, DESMAROUX ET RANDOING déposent un amendement pour que le chemin d'Avignon soit concédé à deux compagnies.

M. VITET combat cette combinaison.

M. COMBAREL DE LEYVAL la défend avec une grande énergie.

M. BERRYER. L'amendement vous propose de décider immédiatement que la concession sera divisée en deux adjudications.

La commission vous avait proposé de décider que le gouvernement serait autorisé à concéder le chemin à une ou deux compagnies, et que ces deux compagnies seraient solidaires pour l'exécution du chemin.

Voilà les deux systèmes en présence.

Quels sont les résultats communs, identiques, de l'adjudication commune ou séparée? lei je vais examiner l'intérêt de l'Etat dans toutes les combinaisons. De part et d'autre, dans tous les systèmes que demande-t-on ? On demande une concession de quatre-vingtdix ans, on demande une garantie d'intérêt, on demande...

M. CHARRAS. Ce n'est pas la question.

A droite: Allons donc ! Silence!

M. BERRYER. Laissez-moi donc préciser les choses.

J'ai si bien étudié cette question, qu'on ne peut produire un fait que je n'aie immédiatement une réponse à faire.

En termes généraux, on demande la garantie d'emprunt.

M. DENEYROUSE. Ce n'est pas ça...

Voix nombreuses: Allons donc! Taisez-vous donc ! C'est indécent!

M. BERRYER. On demande, dans tous les cas, dans tous les systèmes, l'abandon des travaux, on demande la possibilité de la constitution par le crédit privé d'un capital de 200 millions... (Bruit.)

Ainsi, sur tous les points, il y aura identité.

Quelles sont les différences? Il n'y en a qu'une. Dans l'hypothèse de deux compagnies, il faudra constituer un capital de 275 millions au lieu de 260, et il en résultera pour l'Etat un préjudice du prélèvement de l'intérêt de 8 pour 100 sur 15 millions et plus. (Interruption à gauche.)

A la Montagne: A la question!

M. BERRYER. J'ai bien peur,que ceux qui m'accusent de ne pas être dans la question ne la comprennent pas. (Très-bien !)

L'amendement, c'est la décision immédiate de cette résolution qu'il faut adjuger à deux compagnies sans laisser au gouvernement la faculté de n'adjuger qu'à une compagnie. Je combats cet amendement, parce que je soutiens qu'il serait contraire aux intérêts de l'Etat.

Si vous adjugez d'abord la partie la plus avantageuse, savez-vous ce que vous deman dera l'adjudicataire de la partie la plus difficile? S'il y a deux compagnies, il faut absolument qu'il y ait lien de solidarité entre elles, ou bien cette augmentation de 15 millions que je signalais tout à l'heure deviendra plus considérable encore.

Certainement vous pouvez faire adjuger le chemin de Lyon dans les conditions que lui fait M. Combarel de Leyval, car la compagnie qui prendrait ce chemin serait dans une situation magnifique.

Mais l'autre adjudication, êtes-vous sûrs de la faire? Je dis qu'il faut, si vous avez deux compagnies, que ces compagnies soient liées entre elles, et qu'elles acceptent les mêmes conditions, si vous ne voulez pas compromettre les intérêts de l'Etat.

Après une réplique de M. Combarel de Leyval et des observations de MM. Vitet et Bineau, l'Assemblée décide qu'il y aura deux compagnies distinctes.

La suite de la discussion est ajournée pour modifier, en conséquence de ce vote, le cabier des charges.

Aujourd'hui, à midi, les troupes de la division Guillabert, composées des brigades Julien, Forey et Canrobert, et de la brigade de cavalerie commandée par le général Reibell, éiaient réunies au Champ-de-Mars.

Les troupes étaient formées sur trois lignes d'infanterie et une ligne de cavalerie.

M. le général Changarnier, accompagné de M. le général Neumayer, commandant la première division militaire et de ses aides de camp, est arrivé le premier sur le terrain.

Le général en chef a passé devant le front des bataillons qui ont exécuté diverses manœuvres sous le commandement du général Guillabert.

A midi et demi, le Président de la République, en uniforme de général de la garde nationale, est arrivé au Champ-de-Mars.

Louis-Napoléon a successivement parcouru les rangs et est venu se placer devant le pavillon de l'Horloge de l'Ecole-Militaire.

Le défilé s'est effectué par division avec une précision des plus remarquables. Le Président, avant de se séparer de l'armée, a distribué vingt-cinq décorations de la Légion-d'Honneur, entre autres, la croix de commandeur au colonel Lapeyre, du 41° de ligne; la croix d'officier au commandant du 6e bataillon de chasseurs, et au capitaine Letellier du 2o dragons.

Cette réunion militaire avait attiré une foule considérable, malgré une pluie battante.

ERRATUM.

A la page 149. Ligne 32, au lieu de : punir, lisez : périr.

BOURSE DU 11 AVRIL.

Le 5 p. 100, 89 55 à 89 40. —- Le 3 p. 100, 55 50 à 55 55. · Actions de la Banque, 2,150 00.- Obligations de la Ville, 1,270 00.- Nouvelles Obligatiens, 1,132 50.5 p. 100 belge, 98 718. Emprunt romain, 79 314.

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L'un des Propriétaires-Gérants, CHARLES DE RIANCEY.
Paris, imp. BAILLY, DIVRY et Comp., place Sorbonne, 2.

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SAMEDI 13 AVRIL 1850.

L'AMI DE LA RELIGION.

(N° 5016.)

Des corporations et associations ouvrières.

Histoire des anciennes corporations d'arts et métiers et des confréries religieuses de la ville de Rouen, par M. l'abbé Ouin Lacroix. Une œuvre de longue haleine et d'études sérieuses; un volume de plus de huit cents pages, d'un magnifique format, enrichi de gravures nombreuses; un traité complet, rempli de pièces importantes et inédites, d'annotations curieuses et de recherches savantes; une histoire qui a le double mérite de sauver les débris et les souvenirs les plus précieux du passé, et de fournir pour l'un des problèmes les plus difficiles du présent des enseignements d'une haute portée; c'est là de tout temps un véritable titre d'honneur et d'estime : c'en est un surtout à l'époque où nous sommes, au milieu des tristes préoccupations de la politique, au milieu de l'abandon des graves et consciencieuses élucubrations, dans la pénurie de l'art et à travers les souffrances de toutes les industries qui se rattachent aux conceptions littéraires et scientifiques. Ce livre est celui dont nous voulons essayer de rendre compte. Cet honneur, il appartient à un prêtre. Il s'agit de l'Histoire des anciennes corporations d'arts et métiers et des confréries religieuses de la ville de Rouen, » par M. l'abbé Ouin Lacroix.

Un mot de l'auteur, dont la modestie s'efface entièrement derrière son remarquable ouvrage. M. l'abbé Ouin a passé ses premières années sacerdotales dans les fortes méditations de la science théologique. Il a été reçu docteur à Rome. Depuis, et revenu dans sa province natale, il a débuté, dans le monde des lettres, par une histoire de saint Maclou, qui a justement mérité l'attention des hommes instruits. Aujourd'hui, il offre au public, il dédie aux membres de la Chambre de commerce de l'antique capitale de la Normandie, le résultat des veilles les plus laborieuses, des investigations les plus infatigables, continuées pendant plusieurs années. Les annales générales de la France, les écrits spéciaux consacrés à l'existence religieuse, politique, civile et industrielle de la ville de Rouen, les archives surtout de la municipalité et des départements, ont été heureusement explorés par lui et lui ont fourni des richesses inappréciables. Le sentiment d'un dévouement filial à la gloire de son pays, l'ardent désir de rendre une justice trop souvent refusée aux admirables inspirations de la foi et de la charité chrétienne, un zèle sincère pour les vrais intérêts des populations ouvrières, tels ont été les mobiles, tel est l'esprit de son livre. Voyons comment il a réalisé cet utile et honorable dessein.

L'Ami de la Religion. Tome CXLVII.

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