Page images
PDF
EPUB

canon trouvé en mer près de Calais. Cet article me paraît, d'après une table du Magasin pittoresque, avoir été reproduit, texte et planche, dans le tome IV, p. 199, de ce Recueil. M. Puiseux, qui souligne le plomb que jetaient les canons portatifs de Jean de Vienne, verra qu'il ne peut s'en appuyer; car le vieux canon dont il s'agit, et qui n'était pas fait pour être employé comme mousquet, était encore chargé, et c'est un boulet de plomb qu'on y trouva.

Je montrerai aussi que je ne suis pas seul de mon bord. Dans son livre sur Jacques Coeur, p. 442, M. le baron Trouvé dit : « Les canons furent d'abord de fer.

« On donna ce nom, dans les premiers temps, non<< seulement aux grandes pièces d'artillerie, mais encore « aux armes à feu d'un petit calibre que l'on pouvait « porter et remuer avec la main, tels que les crapaudeaux « et les couleuvrines. Il y en avait, au rapport de Juvénal « des Ursins, 4,000 dans l'armée du duc d'Orléans, << sous Charles VI. >>

Je laisse de côté une erreur de M. Trouvé, qui lui est commune avec M. Puiseux : l'armée en question est celle du duc de Bourgogne et non celle du duc d'Orléans. Ce qui importe ici, ce sont les mots : « qu'on peut porter et remuer avec la main. » L'auteur ne dit pas : qu'on peut décharger en la portant. Il comprend donc comme moi l'expression canon à main.

Si le mousquet primitif eût été connu en 1358, il ne lui aurait pas fallu cent ans pour se perfectionner et devenir usuel, et je ne lirais pas dans une Notice du Musée d'artillerie, imprimée en 1833: «...Les poitrinals à mèche, ce qu'il y a de plus ancien dans les armes à feu portatives, remontent en France au règne de Louis XI. >>

Eug. DE SAINTE-BEUVE.

Pierre tombale d'un abbé de Jumiéges au XIII' siècle, retrouvée à Caudebec par M. le docteur E, Guéroult.

L'un de nos savants confrères, M. le docteur Ernest Guéroult, de Caudebec, avait bien voulu, il y a quelque temps, nous communiquer des notes relatives à la célèbre abbaye de Jumiéges, qu'il avait prises sur les manuscrits de la collection Gaignières, à la Bibliothèque nationale. Nous aurions eu le plus vif désir de publier ces notes, si l'auteur avait pu, en dérobant quelques loisirs à ses graves occupations professionnelles, leur faire subir un classement méthodique. Nous y avons remarqué surtout des listes d'abbés et une série d'inscriptions tumulaires et d'épitaphes qui présenteraient un véritable intérêt historique, si on les comparait aux documents analogues qui se trouvent dans les recueils connus des archéologues normands. Ne pouvant, quant à présent, donner aux laborieuses recherches de M. le docteur Guéroult la place qu'elles mériteraient d'occuper, nous voulons du moins en faire connaître un curieux fragment à nos lecteurs.

Parmi les épitaphes reproduites dans celui des volumes de Gaignières qui a pour titre, Abbayes de France Chartularium monasterii Gemmeticensis, se trouve celle de Jean du Tot, abbé de Jumiéges, inhumé vers la fin du XIIIe siècle dans la chapelle SteMarie :

EPITAPHIUM JOHANNIS DU TOT QUIESCENTIS IN CAPELLA SANCTÆ

MARIE.

Hic jacet ille bonus celi terre que (sic) colonus, abbas Johannes du Tot, curis exemit: Deus quem morte redemit, collocet in celis (sic); prudens fuit atque fidelis.

M. le docteur Guéroult, en entrant dans la maison de l'un de ses malades, à Caudebec, remarqua que l'une des marches de l'escalier était formée d'une pierre tombale. Il fut très-surpris, en déchiffrant l'inscription qui y était gravée, de retrouver celle que nous venons de transcrire. Voici, au surplus, comment notre savant confrère raconte sa découverte :

[ocr errors]

« Dans l'escalier d'une maison située à Caudebec-enCaux, route d'Yvetot, nos 25 et 27, le hasard m'a fait rencontrer (en 1859) la même épitaphe, gravée en lettres capitales du XIIIe siècle, sur le linteau d'une pierre tombale de liais formant les marches dudit escalier.

[ocr errors]

L'inscription tumulaire se compose de quatre vers léonins, dont quelques mots sont frustres et illisibles.

«La dalle, haute de 2,50°, large de 1,05, épaisse de 15, se distingue par la richesse de l'ornementation et la pureté de la ciselure.

« Au-dessous d'une double bordure à trèfles incrustés de laques rouges, vertes et bleues, deux anges balançant l'encensoir planent à dextre et à senestre audessus d'une arcade ogivale subtrilobée; celle-ci repose sur des colonnes à chapiteau enlacé de feuillages; elle est décorée au fronton d'une rosace trifoliée, et, sur les côtés, de la rose d'or.

« Un abbé y est représenté en habits de cérémonie, les mains croisées sur la poitrine et les pieds chaussés de sandales. Il porte l'aube frangée de guipures, à manches justes, bracelées de croix de Malte. Le manipule append au bras gauche; l'étole descend jusqu'aux pieds et imprime au personnage un caractère de dignité conforme à ses fonctions..

« Une chasuble ornée est le surtout de ces superbes

attributs du sacerdoce, rehaussés des nuances rouges, vertes et bleues.

« Un treillis carrelé, semé de fleurs de lis et de châteaux armoriés de Castille, remplit le fond de la pierre, dont les parties latérales sont comblées par trois étages d'ogives élancées de style rayonnant.

« La tête de l'abbé est effacée; elle était coiffée d'une mitre courte dont on aperçoit à peine le sommet. « J'ai recueilli de source certaine que ce tombeau, vendu à vil prix en 1793, en l'enclave de l'abbaye de Jumiéges, avait été apporté en entier, la même année, à Caudebec et scié pour établir les marches de l'escalier dérobé où je l'ai découvert.

[ocr errors]

L'empreinte de chacune des tranches de cette magnifique dalle m'a permis de la reconstituer pour en obtenir la photographie.

« Grâce à l'extrême obligeance de M. Lepel-Cointet, l'heureux propriétaire des ruines du monastère Gemmétique, j'ai pu puiser les renseignements suivants dans le précieux nécrologe monastique qu'il conserve si religieusement. Ce manuscrit grand in-4°, relié en basane, est intitulé: « Histoire de l'abbaye royale de « St-Pierre de Jumiéges, contenant ce qui s'y est passé de plus remarquable depuis sa fondation jusqu'au « milieu du XVIIIe siècle, par un Bénédictin anonyme « de la congrégation de St-Maur. 1762. »

« Page 87, on y lit Jean du Tot, 1286, 27° abbé. « A la mort de Robert d'Etlan, qui eut lieu le 18 juillet 1286, Jean du Tot mérita de lui succéder.

«Il était religieux de Jumiéges et avait fait profession entre les mains de Jean de Fors, dont il eut le caractère et les vertus. Son administration fut im

portante plus de vingt associations avec divers monastères, avec celui de St-Wandrille en 1288.

Requête à Philippe le Bel pour la création d'un marché à Jumiéges tous les vendredis. Accordé.

« La guerre menaçait entre les Anglais et les Français les biens sont mis sous la sauvegarde du Saint-Siége. Palais de Latran, 1299.

« Jean du Tot mourut le 20 mars 1299 et non en 1292, comme le relate le Gallia christiana, édit. de 1759, t. XI, p. 197.

« Enterré d'abord dans la chapelle de la Vierge, ses ossements furent transportés avec la pierre de son tombeau dans la partie inférieure du chapitre, pour faire place au mausolée d'Agnès Sorel, dont le cœur et les entrailles furent déposés dans cette chapelle,

[ocr errors]

N.-B. Du Tot (Normandie), seigneurs du Tot, patrons de Barneville-ès-Grez, de St-Ouen, Vassanville : vieux nobles qui ont tenu quatre terres à clocher.

Armes De gueules à 3 têtes de griffon ou d'aigle d'or 2-1, brisé en cœur d'un petit besant d'or.

Preuves de 1668.

Armes du XIIe au XIIIe siècles.

Découverte d'un Columbarium (chambre sépulcrale).

Bien que, depuis le mois d'octobre 1868, M. le général de division Périgot, commandant la province, ait eu la bienveillance de nous autoriser à faire les travaux de découverte que nous lui signalâmes le 22 août 1868, ce n'est que le 10 de ce mois que, grâce aussi à la bienveillance de M. Charon, commandant du génie à Philippeville, nous avons pu commencer et mener à bonne fin la découverte de ce type précieux du passé romain.

« PreviousContinue »