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plus constants et les plus visibles, comme un des ornements les plus remarquables de l'architecture romane secondaire.

Places ordinairement sous la corniche des murs extérieurs, ils remplissent le même office à l'intérieur de quelques édifices (1).

Le plus souvent ces espèces de consoles figurent des têtes d'hommes grotesques et grimaçantes, des têtes d'animaux, des monstres, des griffons, des volutes, des sautoirs, des angles de corniche; on y voit aussi assez souvent des obscénités.

Les corbeaux ont subi, suivant les progrès de l'art, des changements qui peuvent, jusqu'à un certain point, indiquer l'âge auquel ils appartiennent, Les plus anciens (au commencement du XI. siècle) sont très-saillants, tantôt simples et en forme de consoles, comme ceux des églises romanes primitantôt ornés de figures grotesques surmontées immédiatement de la corniche (pl. VIII, fig. 3).

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Les modillons qui supportent des arcades demi-circulaires sont généralement moins anciens que les précédents et leur succèdent parfois dans la deuxième moitié du XI. siècle et au XII. (fig. 4).

Ceux-là sont à leur tour plus vieux que les modillons séparés les uns des autres par de petits arcs trilobés, ou des arcs en ogive (fig. 6), comme on en voit dans le XIIe.

La corniche qui surmonte les modillons est quelquefois toute simple, d'autres fois elle est ornée de zigzags, de billettes de moulures hachées, de dessins en échiquier, de torsades " etc. D'abord très-saillantes comme les plus anciens modillons, les corniches diminuèrent graduellement comme eux vers la fin du XI. siècle.

(1) Les modillons supportant les corniches à l'intérieur sont rares en Normandie, et au contraire extrêmement communs dans le Maine, l'Anjou, le Poitou et plusieurs autres provinces.

Colonnes. Les colonnes offrent un grand nombre de proportions diverses suivant la place qu'elles occupent ; elles sont toujours droites entre la base et le chapiteau, et n'ont jamais de renflement; quelques-unes sont pesantes et courtes, formées d'un gros fût cylindrique (pl. VIII, colonne no. 3); mais l'usage s'introduisit assez genéralement dans le XI. siècle de former les piliers d'un assemblage de demi-colonnes réunies en faisceau (pl. VIII, colonne no. 4). Cette innovation, l'une des plus notables du XI. siècle, et sur laquelle je réclame l'attention (1), me paraît un acheminement très-marqué vers le système nouveau d'architecture que nous verrons prédominer dans la suite; là est renfermé l'un des principaux éléments du style ogival. Du moment que la colonne n'était plus le support réel, mais seulement l'accessoire, l'ornement du support, on put sans inconvénient en varier à l'infini les proportions.

Bientôt des fûts d'une longueur disproportionnée s'élancèrent d'un seul jet depuis le pavé jusqu'aux combles, soit pour aller recevoir les arceaux de la voûte, soit pour diviser les murs par ces lignes perpendiculaires et également espacées, d'un si grand effet dans la perspective d'un édifice.

Chapiteaux. Les chapiteaux les plus simples présentent des faces plates sans ornements; d'autres sont garnies de feuilles ou de cannelures en forme de cône renversé ; un très-grand nombre munis de volutes, affectent la forme corinthienne ou composite: enfin plusieurs portent des têtes grotesques, des serpents enlacés, des chimères et mille autres

(1) Probablement on avait commencé plus anciennement à grouper les colonnes, mais c'est au X1o. siècle surtout que cette combinaison est devenue ordinaire.

figures, créations plus ou moins bizarres de l'imagination du sculpteur.

Les chapiteaux (pl. VII, nos. 7, 9, 11) donneront une idée de la manière dont on traitait ces détails architectoniques.

Fenêtres. Au commencement du XI. siècle, les fenêtres à plein cintre offrent assez ordinairement une archivolte, soit simple, soit ornée des moulures du temps et supportée par deux colonnes, ou par des pieds droits. Leurs proportions varient suivant la grandeur des édifices où elles se trouvent et suivant la place qu'elles y occupent; mais elles sont toujours d'une grandeur moyenne. Je ne pense pas que ces dimensious puissent être d'un grand secours pour la détermination des époques. Lá présence ou l'absence des colonnes ne peut non plus donner beaucoup de lumières sur l'ancienneté relative des fenêtres : je pourrais en citer une quantité considérable des XI. et XII. siecles, qui sont dépourvues de cet ornement, comme dans les IX. et Xo. siècles. C'est le style général de l'architecture, bien plutôt que les caractères souvent trompeurs de quelques détails, qui doit guider dans la recherche de l'époque à laquelle les monuments appartiennent.

En général les fenêtres devinrent fort élégantes dans le XI. siècle et remarquables par la finesse de leurs ornements; celles des étages supérieurs étaient parfois géminées, c'est-à-dire, disposées deux à deux (pl. VIII, fig. 11), et quelquefois encadrées dans un cintre d'un plus grand diamètre (fig. 9.) On voit aussi des fenêtres réunies trois à trois ou triples; celle du milieu, plus haute que les deux autres, est ordinairement seule ouverte, tandis que les deux petites sont bouchées (fig. 10).

Roses. Des ouvertures rondes on en œil-de-bœuf, se voient au XI. siècle (Jumièges, Colleville près Bayeux, etc.), mais très-rarement. Un grand diamètre et des bordures plus

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ornées montrent dans quelques-unes de ces ouvertures une sorte de passage aux belles roses qui, dès la fin du XIIa, siècle, ont été si heureusement employées à la décoration des églises. Une combinaison très - rare, mais qui n'est pas moins intéressante à noter, parce que nous en trouverons plus tard des exemples multipliés, est celle de l'ouverture ronde en œilde-bœuf avec les cintres géminés des fenêtres. Le rond ainsi placé entre deux fenêtres semi-circulaires (pl. VIII, fig. 12), se rencontre dans quelques églises de la fin du XIo, siècle.

Portes. Au commencement du XI. siècle, les portes conservaient encore une grande simplicité. L'archivolte ornée de quelques moulures, mais parfois tout unie, reposait encore assez souvent sur de simples pilastres, et les colonnes, lorsqu'il y en avait, ne se trouvaient qu'au nombre d'une ou deux de chaque côté.

Dans quelques portes de la même époque, les pierres qui forment l'archivolte sont taillées symétriquement de manière à s'emboiter les unes dans les autres, disposition que l'on comprendra facilement en jetant les yeux sur la fig. 10, pl. IX.

Ce fut vers le milieu du XI. siècle que les archivoltes se muliplièrent, qu'elles se chargèrent d'ornements, qu'il fallut par suite proportionner le nombre des colonnes de support à celui des voussures et donner plus d'épaisseur aux parois inté rieures des portes. Quelques-unes, surtout vers le XII. siècle, n'offrent point de colonnes ni de pilastres, et sont ornées depuis le hant jusqu'en bas avec une garniture plus ou moins large de moulures (pl. IX, fig. 5).

De toutes les parties des églises, ce sont les portes qui ont été le plus richement décorées ; souvent elles méritent d'être examinées dans les édifices religieux les plus modestes en apparence. Je vais en citer seulement quelques-unes qui méritent d'être visitées.

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