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ÉDIFICES PUBLICS.

L

Halles.

Es halles du XIIIe siècle offrent la même disposition que celles

du XIIe. Voici le pignon de la grande halle de St Pierre-surDive, qui ressemble à une vaste grange et n'en diffère que par une largeur plus considérable.

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Trois portes ogivales correspondent aux trois nefs, abritées par le même toit; deux fenêtres tréflées au sommet surmontent la porte centrale, par laquelle pouvaient entrer des charrettes chargées de marchandises; deux contreforts indiquent la largeur de la nef centrale et divisent cette façade en trois travées: cette halle est d'une très-grande dimen

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sion et sert non-seulement pour le blé, mais pour l'étalage des marchandises de toute espèce, les jours de foire et de marché. Mais on ne peut faire remonter au XIIIe siècle que la partie reproduite dans l'esquisse précédente, des réparations considérables ayant eu lieu à diverses époques dans les autres parties. Cette halle est établie sur une place où les moines de St-Pierre percevaient des droits et avaient aussi des hangars pour les bouchers.

La halle de Cheux, qui était située au milieu du bourg de ce nom, dans le Calvados, et qui appartenait aux moines de l'abbaye de StÉtienne de Caen, paraissait aussi dater du XIIIe siècle : c'était un bâtiment moins grand, mais disposé comme celui de St-Pierre et garni de contreforts, que l'on a démoli, il y a peu d'années. J'en connais d'autres à peu près semblables.

Grandes salles des palais et des hôpitaux.

Α

u XIIIe siècle, les salles des hôpitaux et des palais offraient beaucoup de ressemblance avec celles du XIIe que j'ai décrites sommairement, pages 189 et suivantes.

Salle de l'hospice de Bayeux.-Nous avions, il y a quelques années, un exemple remarquable de ce genre d'édifices dans la grande salle de l'hospice de Bayeux, qui avait été reconstruite par Robert des Ablèges, évêque de cette ville, vers 1210.

Elle était voûtée comme celle de l'hospice de Caen, et à peu près de même forme, quoique beaucoup moins grande. Le bâtiment qui la renfermait se terminait aussi par un gable élevé, du côté de la rue ; je regrette de n'avoir pas dessiné ce monument, dont il n'existe, je crois, aucune esquisse: il a été détruit en 1823.

SALLE DE L'HOSPICE DE CHARTRES. A Chartres, la salle de l'HôtelDieu, près de la cathédrale, dite salle des fièvreux, offre les mêmes dispositions que celles dont je viens de parler: elle est divisée longitudinalement par des colonnes, et au bout de la salle, vers l'est, il y avait un autel où l'on disait la messe pour les malades; elle remonte évidemment au XIIIe siècle.

SALLE DE L'HOSPICE DE TONNERE. La grande salle de l'hospice de Tonnerre est terminée par une chapelle qui servait autrefois aux malades: cette salle, d'une largeur considérable, est éclairée par des fenêtres en lancettes, et les corniches extérieures ont encore des mo

dillons bourguignons de transition dont les dents de scie, du XIIIe siècle, peuvent être considérées comme l'équivalent ou comme le relatif synchronique. Cette salle date de la fin du XIIIe siècle, car la fondatrice, Marguerite de Bourgogne, belle-sœur de saint Louis, mourut en 1298. Les lits des malades étaient rangés sur deux files le long des murs ; il restait au centre une nef ou une grande allée vide.

Jamais il n'y a eu de voûte en pierre, mais bien un lambris cintré en bois, avec des poutres détachées traversant d'un mur à l'autre et qui portent des ferrements verticaux, suivant le système que nous voyons dans beaucoup d'anciennes salles et souvent dans nos églises rurales. M. Le Maître, membre de la Société française d'archéologie, a constaté que les chevrons, d'un seul morceau, ont 62 pieds de longueur ; il croit que ces boiseries datent de la construction de l'hospice, ce qui n'aurait rien d'impossible, cependant je les crois plutôt du XVe siècle. Le pavé de l'édifice a été exhaussé de 1 mètre, je ne sais à quelle époque, ce qui modifie les proportions de cette salle et lui fait perdre une partie de son élégance, en diminuant de 4 mètre la hauteur des

murs.

-

HOSPICES DE GAND. — La porte d'entrée de l'hospice des malades à Gand, d'une forme élégante, est soutenue au milieu par une forte colonne que surmonte une statue de la Vierge, à laquelle cet édifice fut consacré. Une grande fenêtre, flanquée de deux autres fort élancées, occupe la partie supérieure du gable principal. A droite et à gauche de la porte d'entrée se trouve une suite de petites arcades en tiers-point, soutenues par des colonnes très-sveltes dans le style du XIIIe siècle, dont la base repose sur un banc de pierre.

L'hospice des vieillards, tout près de celui des malades, a conservé un réfectoire du XIVe siècle ou de la fin du XIIIe, aux deux extrémités duquel on voit des peintures murales anciennes : l'une représentant le couronnement de la Vierge, l'autre un saint Christophe. Les colonnes qui garnissent les murs supportent une voûte ogivale en charpente, garnie de bardeaux consolidés par des arceaux en bois saillants, absolument comme les arceaux en pierre du même temps. Il est probable que bien des voûtes furent faites de la sorte et n'ont été qu'assez tard remplacées par des voûtes en pierre.

SALLE DES ÉTATS, A BLOIS.-La grande salle des États, à Blois, dont la construction remonte au XIIIe siècle, offre deux nefs séparées par un rang de piliers supportant des arcades.

C

Beffrois et hôtels-de-ville.

'EST, assez généralement, au règne de Louis VI que l'on fait remonter les premières chartes de communes accordées aux villes de France; il est cependant probable qu'avant cette époque quelques villes jouissaient par l'usage, sinon par concession, d'un gouvernement municipal (1).

Noyon, St-Quentin, Laon et Amiens paraissent avoir été les premières qui reçurent leur émancipation des mains du prince. Sous Louis VII et surtout sous Philippe-Auguste, les principales villes qui faisaient partie des domaines de la couronne, furent successivement admises à jouir des mêmes priviléges. Cet exemple fut suivi par les barons, de sorte qu'à la fin du XIIIe siècle, l'établissement des communes était devenu général en France (2); alors les villes eurent un sceau particulier, une cloche pour assembler les bourgeois, et une tour ou beffroi. Ce beffroi renfermait la cloche pour convoquer les bourgeois (3); il servait d'observatoire pour veiller à la sûreté de la ville, et quelquefois de prison.

Il représentait en quelque sorte, pour la commune, le donjon de

l'habitation féodale des barons.

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Le beffroi étant un des attributs des communes la suppression d'une commune entraînait la suppression de son beffroi : ainsi nous voyons Henri, roi des Romains, ordonner, en 1226, d'ôter la grande cloche et de démolir le beffroi de la ville de Cambrai, à laquelle il avait retiré le titre de commune pour punir les habitants de leur rébellion (4).

En 1331, les ordonnances par lesquelles Philippe VI règle l'administration de la ville de Laon, dont il avait supprimé la commune,

(1) Hallam, L'Europe au moyen-âge, t. 1er.

(2) Id., Ibid., P 352.

(3) Les cloches étaient un attribut du beffroi et des communes. Lors de l'institution de la commune de Compiègue, le roi donna des lettres particulières pour autoriser les habitants à sonner les cloches du beffroi, en cas de meurtre ou d'incendie. (Voir les Ordonnances des rois de France, t. II, p. 79.)

(4) Definiendo quod campana seu campanæ et campanile, quod Bierefrois dicitur, et communia quam pacem nominant, vel quocumque alio nomine pallietur, in eadem civitate tollantur et destruantur. (Miræus, Oper. Diplom. nova collectio, t. IV, cap. XLII, p. 540.)

portent que les cloches qui sont de la commune jadis de Laon, les deux qui sont à la tour que l'on suelt dire le beffroi soient appliquées à notre profit, et défendons que ladite tour ne soit jamais appelée beffroi (1).

Les hôtels-de-ville furent assez ordinairement, au XIIIe siècle et au XIV, établis sur les portes de ville. La cloche du beffroi se trouvait elle-même dans une tour construite à cet effet, au-dessus des voûtes du portail, ou dans une des deux tours qui flanquaient cette entrée : il nous reste très-peu de beffrois de cette époque.

HÔTEL-DE-VILLE ET BEFFROI DE BORDEAUX. - On voit encore quelques parties de celui de Bordeaux, qui fut construit en 1246. Il fait corps avec les murs d'enceinte; mais on ne doit rapporter au XIIIe siècle que les parties basses de cette espèce de tour, à peu près jusqu'au cadran de l'horloge; la partie supérieure paraît du XVe siècle, peutêtre même du XVIe

HOTEL-DE-VIlle et beffrOI DE CAEN. -La ville de Caen fut affranchie par Jean-sans-Terre, le 17 juin 1203; l'hôtel-de-ville et le beffroi furent établis sur le pont St-Pierre et s'appelèrent le Chastelet (2). La reconstruction de cette tour eut lieu au XIVe siècle, et depuis longtemps elle n'existe plus.

HOTEL-DE-VILLE D'Ypres.

L'hôtel-de-ville d'Ypres est, je crois, le plus complet que je puisse citer dans le Nord. J'en donne le dessin à la page suivante. Quoiqu'il n'ait été terminé que dans le XIVe siècle, la plus grande partie pourtant appartient au XIIIe.

Ponts.

I

Lest à regretter que l'on n'ait pas assez étudié les anciens ponts qui existent sur beaucoup de nos rivières, car un certain nombre remontent au XIIIe siècle, sinon dans leur entier au moins en partie M. F. de Verneilh a fait sur ce sujet un mémoire curieux que nous sommes heureux de signaler, et dans lequel il cite plusieurs ponts qui doivent remonter à ce siècle dans le Limousin et le Périgord. Nous avons visité avec M. Des Moulins un de ces ponts,

(1) Ordonnances des rois de France, t. II, p. 79.

(2) L'abbé De La Rue, Essais historiques sur la ville de Caen, t. I, p. 127.

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