Page images
PDF
EPUB

réparations toutes parcimonieuses qu'elles sont étaient faites avec soin, avec intelligence, avec esprit de suite et sous une direction convenable; mais loin de là, un déplorable vandalisme préside à leur exécution, à tel point qu'on dirait une sorte de conspiration ourdie contre ce monument, par tous les entrepreneurs qui mettent la main à l'œuvre, et qu'on en vient à regretter les faibles sommes qui lui sont accordées parce qu'elles ne font que hâter sa ruine sous le prétexte menteur de le réparer. Aussi, il y a deux ans, un architecte distingué, M. Charles Questel, chargé par M. le Ministre de l'intérieur d'assigner l'application des derniers fonds alloués écrivait, dans son judicieux rapport, les lignes suivantes: Depuis environ une quinzaine d'années, des « travaux ont été entrepris dans ce monument, mais mal<< heureusement ils ont été si mal exécutés qu'il eût mieux « valu n'y rien faire, dans l'intérêt de l'art et de la solidité. «La première partie de ces travaux, que je n'ose appeler de restauration, ont eu pour objet la reprise des contreforts et arcs-boutants; ce sont surtout ces ouvrages qui ont « été exécutés d'une manière déplorable; certains contreforts, dont les parties supérieures étaient en mauvais état, « furent réparés avec si peu de soin, que les couronne«ments neufs se détachant aujourd'hui de la portion qu'ils « étaient destinés à protéger, menacent le monument et la « sûreté publique.

"

[ocr errors]

« Et plus loin, je rangerai en première ligne, parmi les << travaux à exécuter, la démolition et la reconstruction de << toutes les portions faites, il y a environ quinze ans, à « tous les contreforts et arcs-boutants des faces latérales et << du chœur.

<< Il importe surtout que ces travaux soient bien surveillés, « pour éviter de nouvelles mal-façons; car pour continuer la

<< restauration de la même manière, il vaudrait mieux, dans « l'intérêt du monument, qu'on n'y fit rien. »

(Rapport de M. Questel, du 9 juillet 1844).

La mauvaise direction et le défaut de surveillance dans les travaux, c'est donc là, comme le signale M. Questel, la plaie de notre monument, c'est ce qui active l'intensité du mal dans une effrayante progression et précisément en raison des remèdes appliqués pour l'arrêter, comme ces malades qui auraient mis de longues années à mourir et que l'inexpérience du médecin tue par un traitement contraire. Je ne veux point dérouler le trop long et trop douloureux chapitre des désastres occasionnés par la main des barbares qui ont ainsi consommé les actes du vandalisme le plus révoltant et du plus manifeste gaspillage de fonds. Mais j'ai cru qu'il me serait permis de dénoncer à la Société française pour la conservation des monuments le coupable délaissement dont est victime un précieux monument de l'art, et j'ai pensé que pour notre Société la plus grande preuve de dévoûment à donner aux intérêts de la science archéologique, c'était de tâcher de sauver de la ruine et de l'oubli un des plus beaux fleurons de la couronne.

Il ne faut pas que le dépérissement et la ruine plantent à jamais leur funèbre étendard sur notre monument; et je crois que le seul moyen d'arriver à un résultat efficace à cet égard serait d'obtenir, par un généreux effort, tout à la fois une somme assez importante pour faire face aux ré parations qu'exige l'état de l'édifice, et qu'un architecte préposé à cet effet serait chargé de diriger.

L. ROSTAN,

Inspecteur des Monuments du Var.

Recommandation de l'église de St.-Maximin par la Société française.- La Société a écrit, de Marseille, une

lettre à M. le Ministre pour l'engager à s'intéresser à la continuation des travaux commencés à Saint-Maximin. M. de Caumont demandait particulièrement que M. Rostan fût chargé de la surveillance des travaux. Voici la lettre qu'a reçue la Société en réponse à l'envoi de M. de Caumont.

MONSIEUR LE DIRECTEUR,

« J'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire le 10 septembre dernier, à l'effet de recommander à mon intérêt M. Rostan, antiquaire, et d'obtenir qu'il soit chargé d'inspecter les travaux de restauration de l'église de St.-Maximin (Var).

[ocr errors]

« Je soumettrai votre demande à la commission des monuments historiques en même-temps que la note qui l'accompagne et qui est relative aux travaux de l'église de St.-Maximin. Mais je dois dès à présent répondre aux observations que vous avez cru devoir m'adresser au sujet de la répartition du crédit des monuments historiques. La répartition de ce fonds a toujours été faite d'après un mûr examen de la commission, et tout le monde s'accorde à reconnaître l'esprit d'impartialité et de justice qui a toujours présidé à ses travaux. L'église de St.-Maximin, loin d'avoir été négligée, est un des édifices les plus favorisés sous le rapport des allocations. Une somme de 2,000 francs lui a été accordée sur l'exercice 1846, bien qu'un crédit de 3,000 fr. ouvert sur l'exercice 1845 n'ait pas encore été employé malgré mes invitations et sans qu'aucune observation m'ait été adressée par l'autorité locale au sujet des difficultés d'exécution des travaux dont vous m'entretenez au nom de la Société française. >>

La Société française se plaît à reconnaître que la commission des monuments historiques rend les plus grands

services et qu'elle ne peut accorder de secours suffisants à tous les monuments qui en auraient besoin. Le dévouement de cette commission est aux yeux de la Société française un motif de plus pour la seconder en lui signalant les faits relatifs à St.-Maximin; or, si les sommes accordées étaient insuffisantes, ce qui est bien plus fâcheux, elles ont été dépensées sans aucune surveillance et si mal qu'au bout de QUELQUES ANNÉES IL FAUT DÉMOLIR CE QUI A ÉTÉ FAIT. La Société française a souvent remarqué que les travaux de restauration entrepris sur différents points de la France, ne sont pas assez surveillés. Pourtant, il serait facile, aujourd'hui que les monumentalistes sont très-nombreux, de s'adresser à ceux d'entre eux qui auraient donné des preuves de capacité, afin de suivre les travaux en l'absence des architectes et d'agir conformément à leurs prescriptions: on éviterait ainsi bien des bévues sans qu'il en coutât un sou, car ces hommes dévoués, et qui seraient choisis comme auxiliaires, habiteraient le pays; ils n'auraient pas d'indemnité à demander; et désintéressés qu'ils sont, ils en refuseraient lors même qu'on pourrait leur en offrir.

D. C.

W

EST-IL CONVENABLE DE BATIR, AU XIX SIÈCLE, des églises DANS LE STYLE OGIVAL?

RÉPONSE

AU RAPPORT DE M. RAOUL ROCHETTE;

Par M. G. VILLERS,

Membre de la Société française pour la conservation des monuments.

Un recueil périodique, dont les opinions devraient toujours porter l'empreinte d'un sentiment de dignité et de convenance, par cela même que les noms de ses rédacteurs semblent lui donner une sorte d'autorité, la Revue archéologique s'est empressée, dans son no. du 15 juin dernier, de publier un rapport émané de l'Académie des Beaux-Arts, en accompagnant ce document d'une violente diatribe dirigée contre les partisans de l'architecture ogivale.

Voici la cause qui motiva ce rapport.

Le Conseil des bâtiments civils ayant à se prononcer sur le style à adopter dans la construction d'une nouvelle église projetée par le Conseil municipal de Paris (l'église Ste.Clotilde) avait choisi l'architecture ogivale.

Pour bien des gens cette décision était imprévue, aussi causa-t-elle une vive rumeur : c'était une véritable révolution.

« PreviousContinue »