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ogival a, dans le nord, changé l'aspect de l'architecture dans les monuments religieux comme dans les monuments militaires. Il y a donc apparence que la partie ancienne du palais de l'évèché ne remonte pas au IX. siècle comme on le croit et que le XIII. lui convient mieux. Il y a du reste des recherches à faire sur les monuments de Fréjus, sur l'âge de ses murailles fort intéressantes, sur son port et sur l'édifice gallo-romain que l'on regarde comme ayant servi de magasins.

L'abandon dans lequel se trouvent quelques fragments de statues de marbre découverts dans les bains à l'occasion des fouilles qui furent faites il y a quelques années, aux frais du gouvernement, sous la direction de M. Texier, membre de l'Institut, a vivement peiné M. de Caumont; il a fait une visite à M. le Maire pour le prier de les faire disposer dans une salle de l'hôtel-de-ville. Ces fragments sont en ce moment jetés pêle-mêle, par terre, dans un couloir à ciel ouvert et rempli d'immondices, attenant à l'hôtel-de-ville.

Il est fâcheux que Fréjus ne soit pas visité plus souvent des voyageurs archéologues; dans un des chemins qui traverse la partie haute de la ville du côté du nord, on voit à fleur de terre des pavés très-intéressants, qui, comme beaucoup de ceux que l'on trouve à Pompéï, offrent des fragments irréguliers inais bien polis de marbre rouge blanc et de diverses couleurs, incrustés dans des aires de ciment. Ces pavés mériteraient d'être conservés, il est à craindre qu'ils ne disparaissent.

Les arènes déblayées en partie il y a quelques années finiront par être comblées de nouveau si l'administration n'empêche pas les habitants d'y transporter, comme ils le font, les déblais qui les gênent et parfois des fumiers et des ordures.

Pendant que M. de Caumont explorait les monuments de Fréjus sur lesquels il pourra plus tard donner un article dans le bulletin. M. le vte. de Cussy visitait Grasse, Draguignan et quelques autres villes du Var.

A Nice, M. de Caumont a fait une station, puis il s'est rendu à Gênes, par la route dite de la Corniche; visitant la Turbie, Monaco, Vintiniglia, St.-Remo, Oneglia, Savone et les autres villes du littoral.

Congrès de Gênes. Le Congrès de Gênes a été magnifique, la ville aux palais de marbre avait voulu se parer de toutes ses richesses pour recevoir les savants de l'Italie; aussi voyait-on un mouvement extraordinaire; 1,000 membres titulaires et presque autant de membres auditeurs formaient un personnel considérable, non comprises les femmes des membres qui ont presque constamment assisté aux séances.

Les sections étaient au nombre de huit, savoir: chimie, physique et mathématiques, géologie et minéralogie, botanique et physiologie végétale, géographie et archéologiz, agriculture et technologie, chirurgie et anatomie, medecine. La section de technologie et d'agriculture était la plus nombreuse, près de 500 membres en faisaient partie, il y en avait habituellement 400 aux sections de médecine et de chirurgie les autres sections étaient moins nombreuses, mais non moins laborieuses. Nous regrettons d'être obligé de nous restreindre à l'indication de quelques communications concernant l'archéologie constatons d'abord l'existence d'une section spéciale de géographie et d'archéologie. Quand, en 1840, M. de Caumont s'adressa à M. le Ct. de Saluces, président-général du Congrès (2. session tenue à Turin), on ne crut pas pouvoir sortir du cadre tracé par les Congrès Allemands et adopté à Pise pour le Congrès Italien, mais le Congrès a progressé depuis cette époque, et au bout de 6 ans la demande faite par M. de Caumont a été accueillie. On doit en savoir gré à M. le marquis de BrignoleSales, président-général du Congrès de Gênes, aussi instruit qu'il est habile homme d'Etat. M. le marquis de Brignole,

ambassadeur de Sardaigne près la cour de France, a présidé le Congrès avec beaucoup de talent. Son palais, un des plus beaux de Gênes, a été ouvert aux membres du Congrès, tous y ont trouvé l'accueil le plus affable, l'hospitalité la plus généreuse et la plus grandiose.

La section de géographie et d'archéologie était présidée par M. le comte de San Quintino, membre étranger de l'Institut des provinces; on y a lu des mémoires intéressants sur diverses antiquités. MM. Orioli de Corfou et Cantu, de Milan, y ont pris souvent la parole.

Parmi les Français qui s'étaient fait inscrire dans cette section, M. de Caumont a communiqué quelques idées sur la rédaction des statistiques monumentales et demandé que le Congrès encourage ce genre de recherches et engage les archéologues à les entreprendre pour l'Italie, chacun dans le pays qu'il habite, en suivant un plan uniforme.

M. Beaulieu, de Paris, a lu un mémoire sur le séjour des Sarrazins en Savoie.

En général, le moyen-âge a eu très-peu de place dans les discussions et les communications M. de Caumont avait eu la pensée de porter l'attention de la section sur les monuments de la ville, en proposant que l'on s'occupât de la statistique monumentale de Gênes, mais cette proposition n'a pas eu de suite. La géographie devait d'ailleurs occuper une partie du temps, et l'examen des chemins de fer projetés pour l'Italie a absorbé les derniers jours de la session. L'an prochain un programme de questions sera, dit-on, rédigé à l'imitation de ce qui a lieu en France. Une commission a été instituée à cet effet: M. de Caumont a soumis à cette commission plusieurs questions concernant l'architecture féodale en Italie et sur quelques autres sujets.

Le trésor de la cathédrale a été exposé chaque jour pour que les membres du Congrès pussent observer les précieux

objets qu'il renferme. On a pu toucher le sacro catino trouvé à la prise de Césarée en Palestine, l'an 1101, et que l'on avait cru long-temps être taillé dans une émeraude, mais qui n'est que de verre. Ce vase fut brisé en 1815 en revenant de Paris où il avait été transporté en 1809; mais les morceaux en ont été recollés.

M. de Caumont a examiné avec un soin particulier une chappe tissue d'or, représentant des enroulements et des fruits circonscrits par des points de soie rouge; il est probable que ce tissu a changé de destination, les bordures qui offrent l'image des apôtres dans des niches ogivales paraissent moins anciennes que le tissu et doivent avoir été appliquées sur lui quand il a été employé à faire une chappe on croit que le tissu existait en 1120, époque de la dédicace de la métropole; alors il formait peut être une chasuble ou quelqu'autre ornement; les bandes à personnages ne peuvent être antérieures à la fin du XIII. siècle.

Il a été question dans le bulletin (t. VII, p. 130), des châsses conservées dans le trésor de la cathédrale de Gênes, nous n'en parlerons que pour dire combien laisse à désirer le travail de la châsse dite de saint Jean, la plus ancienne et qui date de 1438.

On voit encore dans cette collection un beau plat d'agathe offrant au centre la représentation de la tête de saint JeanBaptiste.

M. de Caumont a revu les églises qu'il avait visitées en 1840 l'église St.-Mathieu, en partie de la 2. moitié du XIII. siècle, son joli cloître dont deux chapiteaux portent les dates 1308 et 1310, la mosaïque qui orne le tympan de la porte principale, excitent toujours à juste titre l'intérêt du voyageur. Il en est de même de l'église de Ste.-Marie du château et de plusieurs autres.

L'église de l'Annontiade a été malheureusement dotée d'un

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péristyle doriqué qui ne s'accorde guère avec le reste de l'édifice, et qui prouve qu'on n'est pas très-avancé en Italie dans l'assortiment des styles. Il est fort à regretter qu'on n'ait pas terminé plus convenablement la façade de cette belle église moderne.

M. de Caumont a demandé que l'on dessinât avec soin la magnifique porte des prés construite en marbre dans le style bysantin, en 1150, ainsi que l'atteste une inscription et dont les itinéraires ne disent rien. C'est pourtant un des monuments les plus remarquables et les plus élégants de Gênes, et l'on ne peut s'en procurer de bons dessins : une autre porte semblable existe à l'extrémité d'une rue opposée à la précédente. Ces deux portes ornées de colonnes élégantes sont de véritables arcs-de-triomphe du moyen-âge. On ne peut rien trouver de plus élégant ni de plus majes

tueux.

Il existe à Gênes de très-hautes tours carrées annexées aux maisons anciennes et qui ressemblent au donjon des châteaux; on sait que des tours semblables se trouvent encore dans différentes villes d'Italie et qu'elles appartenaient aux familles patriciennes. Il est utile de faire remarquer qu'elles se rencontrent aussi parfois dans la région du Rhin dont l'architecture a plus d'un rapport avec celle de l'Italie. Ainsi, à Metz, on voit encore des tours qui rappellent celles dont nous parlons, tandis que dans l'Ouest, où l'architecture ogivale a de bonne heure modifié les formes, les tours carrées des maisons puissantes des villes se traduisent en tours de différentes formes et parfois octogones moins sévères, mais plus élégantes.

Nous ne dirons rien des fêtes magnifiques qui ont eu lieu pendant le Congrès. La ville de Gênes avait voté 150,000 fr. pour recevoir le Congrès, et ce crédit a été, dit-on, dépassé. Chaque membre a reçu une Statistique de la province en

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