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qu'elle est un des caractères de tous les tableaux de l'époque, appelée proprement le moyen-âge. Le tympan de Notre-Dame de Trèves, que nous donnerons d'après M. de Caumont, lorsque nous traiterons du portail de la mère de Dieu, en offrira un exemple que nous ferons ressortir; et, dès aujourd'hui, sans quitter le portail même que nous étudions, nous en trouvons une preuve nouvelle; il n'y a certainement pas de proportion entre les divers personnages qui y figurent; il y en a moins encore entre les personnages et les édifices, la porte du paradis, par exemple , par où ils doivent entrer et d'où ils sortent. La raison de cette manière n'est pas seulement dans l'état où se trouvait alors l'art de la sculpture et dans l'ignorance des rapports proportionnels et de la perspective; cette raison est aussi dans l'habitude du ciseau de donner, dans l'exécution, plus d'importance matérielle à ce qui avait dans le plan et dans la pensée plus d'importance morale. C'est pour cela, nous le verrons bientôt, que Jésus-Christ, qui juge, est de stature colossale, que la Vierge et saint Jean, les puissants intercesseurs du genre humain justiciable, sont aussi beaucoup plus grands de taille que le reste de la foule ; pour cela que toutes les parties architecturales des tableaux ne sont rien auprès de la partie vivante et animée ; pour cela enfin et en particulier que la terre et les quatre parties qui donnent à elles seules l'idée suffisante et complète du monde tout entier, ne laissent presque point de place à la représentation de la mer, qui entre dans la composition du monde sans lui donner son nom.

SÉANCE ADMINISTRATIVE

TENUE A SAINT-LO,

PAR LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE POUR LA CONSERVATION DES MONUMENTS HISTORIQUES,

LE 17 MARs 1846.

Extrait du procès-verbal.

Le conseil permanent de la Société avait désigné M. l'abbé Lalmand, pour remplir les fonctions de secrétaire et préparer la réunion.

Sur l'invitation du directeur général et du secrétaire, plusieurs membres de l'Association Normande et de la Société de St.-Lo, ont bien voulu se réunir à la Société Française. La séance a été ouverte à 6 heures et demic du soir, dans la grande salle de l'hôtel-de-ville.

M. de Caumont, après avoir remercié de leur concours bienveillant MM. les membres présents, expose le but de la Société française qui, depuis 12 ans, s'occupe de faire le dénombrement complet des monuments historiques, de les décrire, de les classer dans un ordre chronologique, de publier les statistiques monumentales de chaque départeinent, et qui, sans relâche, fait tous ses efforts pour empêcher la destruction des anciens édifices et les dégradations résultant de restaurations malentendues, provoque la création de

musées d'antiquités dans les chefs-lieux. M. de Caumont, exprime le vœu que des rapports étroits unissent les différentes Sociétés scientifiques du royaume, afin de concentrer leurs efforts, mettre de l'unité dans leurs vues et donner une plus grande extension à leurs travaux, qui restent trop souvent enfouis dans les archives locales. A cette occasion il invite la Société de St.-Lo à publier des mémoires, seuls témoignages de vie que puisse donner une Société de province. Il appelle l'attention de la compagnie sur l'excellente statistique que publie M. Le Héricher, secrétaire de la Société d'Archéologie d'Avranches, sous le titre d'Avranchin monumental et historique, et signale cet ouvrage comme un modèle du genre. Il s'informe ensuite de l'état des monuments historiques de l'arrondissement, demande la liste des monuments classés et de ceux qui méritent de l'être, se plaint du manque d'entretien convenable, des restaurations de mauvais goût si fréquentes dans nos contrées.

M. Denys, secrétaire de la section d'Archéologie de St.-Lo, répond d'une manière détaillée aux questions de M. de Caumont sur l'état de conservation des monuments religieux. Il signale des excavations dangereuses faites récemment dans le chœur de l'église de Hambie, pour en extraire de l'argile, le mauvais état des églises de Ste.-Croix, de Cerisy et de St.-Gilles; quelques détails curieux des églises en partie romanes de Marigny, Semilly, Villiers-Fossard : il se plaint des restaurations qui viennent d'être faites à l'église NotreDame-de-St.-Lo. Il adresse ensuite à M. Queillé, architecte, ses félicitations pour la reconstruction du chœur de Marigny en style ogival du XIII. siècle.

M. l'abbé Le Cuir demande que nulle restauration ne puisse être faite dans les églises sans l'autorisation des autorités civile et ecclésiastique; il déplore, avec M. Denys, les travaux de mauvais goût qui, depuis plusieurs années, s'acharnent à défigurer la belle église paroissiale de St.-Lo, et forme le vœu

qu'on dégage, le plus tôt possible, les nefs latérales obstruées par des autels d'un prétendu ordre grec, en complet désaccord avec le monument qu'ils dénaturent; que les chapelles soient rétablies dans un style convenable, et qu'on ne fasse à l'extérieur que les restaurations indispensables. Après une courte discussion sur ce sujet, la Société s'associe unanimement au vœu exprimé par M. Le Cuir.

M. l'abbé Lalmand prie M. de Caumont d'inviter le Congrès archéologique, qui se tiendra à Metz le 1er juin 1846, à adresser au gouvernement une demande pressante en faveur de l'église St.-Croix de S'.-Lo, dont la ruine est imminente si de prompts secours n'interviennent. MM. Denys, Houel, Lepingard, Rousseau et Clément joignent leurs sollicitations à celles de M. l'abbé Lalmand. M. de Caumont témoigne de son intérêt pour cette curieuse église romane; il s'étonne qu'elle ne soit pas classée, et engage la Société à faire les plus actives instances pour obtenir au plus tôt un classement qui ne peut être retardé davantage, puisque l'inspecteur général et lui-même, en particulier, ont appelé l'attention du gouvernement sur ce monument. I invite M. l'abbé Lalmand à lui adresser, à Metz, une demande en faveur de Ste-Croix, afin qu'il la transmette sur-le-champ au Congrès archéologique de France.

M. de Caumont demande ce que sont devenues les parties monumentales de l'ancienne abbaye de St. -Croix, qui vient d'être détruite pour faire place aux nouveaux bâtiments du haras. M. Denys répond que M. le préfet a acquis, pour les conserver, les débris de l'ancienne chapelle et les pendentifs armoriés dont la Société archéologique a fait prendre l'empreinte; quant à la cheminée à colonnettes, dont M. de Caumont s'est occupé dans son Cours d'antiquités monumentales, elle a été achetée par la Société et érigée par ses soins et ceux de M. Bazire, curé de St.-Croix, dans le jardin du presbytère de la paroisse. M. de Caumont félicite la section

d'archéologie du soin qu'elle a pris de ces objets intéressants, et l'engage à conserver, ou au moins à faire dessiner, les pierres armoriées qui doivent se trouver en grand nombre dans les débris de l'abbaye.

M. Denys communique une inscription qu'il a relevée dans l'église de St.-Croix, et qui jusqu'alors était restée inconnue. M. de Caumont l'invite à en remettre le fac-similé au secrétaire de la Société française, afin qu'elle soit insérée dans le Bulletin munumental. M. Denys communique une autre inscription romane qu'il a observée dans l'église de St. Symphorien; il cite des fonts baptismaux curieux à la Barre-Semilly et à Villiers-Fossard. M. de Caumont rappelle ceux qu'il a signalés dans son Cours d'antiquités (6. partie), comme existant dans le département de la Manche, à Magneville

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et à Contrières, ceux de Trois-Gots, Percy et Dangy, etc., etc. Il signale aussi à Pont, près d'Avranches, un font, dessiné par M. Bouet, qui est orné d'arcatures ogivales. Ce font a été décrit par M. Le Hericher.

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