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SÉANCE ADMINISTRATIVE

TENUE A PARIS

Le 21 Janvier 1846.

Présidence de M. LAJARD, membre de l'Institut.

Le conseil de la Société s'est réuni à Paris le 21 janvier 1846, sous la présidence de M. Lajard, membre de l'Institut. La séance est ouverte à une heure 112.

Sont présents: MM. de Caumont, directeur; V. de Cussy, membre de l'Institut des provinces; Richelet, id. ; De La Saussaye, inspecteur divisionnaire; Ve. Dumoncel, membre du conseil de la Société; Duchalais, employé au cabinet des médailles; B". d'Huard, membre de l'Académie de Metz; Danjoi, architecte du gouvernement; de Lavillegille, secrétaire du comité des chartes; Giraud de Prangey, inspecteur de la Haute-Marne; Paty, inspecteur de la Marne; Paul Huot, conservateur adjoint de la bibliothèque de Versailles, inspecteur du département de Seine-et-Oise.

M. Huot remplit les fonctions de secrétaire.

M. de Caumont rappelle la perte douloureuse que la Société a faite en la personne de M. Cauvin.

M. de Caumont donne ensuite connaissance de la correspondance.

M. Anatole de Barthélemy annonce un mémoire sur un camp des environs de St.-Brieux.

M. Pérey, membre du conseil général du Rhône, envoie de nouveaux détails sur divers monuments archéologiques de cette contrée.

M. Paris, bibliothécaire de Reims, propose de réunir la société une fois par trimestre dans cette ville. Le conseil autorise cette réunion.

M. le baron d'Huart donne lecture de la circulaire de convocation adressée à la Société pour le congrès archéologique de 1846, qui se réunira à Metz le 15 juin prochain; il fait connaître une série de questions qui pourront y être traitées, et qui offrent un haut intérêt archéologique; les personnes qui en auraient de nouvelles à proposer sont priées de les adresser à M. Du Coëtlosquet et à M. d'Huart, à Metz.

M. Lajard, président, à propos de quelques-unes de ces questions, donne quelques intéressantes explications sur le symbolisme antique de l'Orient, notamment sur la signification du lion et du taureau dans les monuments funéraires.

La Société admet parmi ses membres M. l'abbé Aulanier, chanoine honoraire de la cathédrale de Paris, aumônier du couvent des Oiseaux, qui a parcouru et étudié avec fruit plusieurs contrées de l'Orient, et qui dans ces derniers temps a fait construire dans la maison à laquelle il est attaché, chapelle ogivale remarquable par l'entente de l'art et des traditions achitectoniques.

une

M. le comte de Montalembert, pair de France, vient prendre place parmi les membres du conseil; invité par M. le président à faire connaître à la Société les documents qu'il peut avoir recueillis comme inspecteur divisionnaire, le noble pair répond:

a Les fonctions d'inspecteur me paraissent utiles dans les départements, où l'influence, les conseils, les démarches de ceux qui remplissent ces fonctions, peuvent arrêter la des

truction des monuments à conserver; il devrait en être de même à Paris; il n'en est rien; à Paris, le vandalisme, le vandalisme officiel fleurit sans entrave, comme aux plus beaux jours de l'empire et du XVIII. siècle; ici c'est le couvent des Bernardins, dont la toiture unique dans cette grande ville vient d'être remplacée par une attique moderne; là, ce sont les Célestins qui n'attendent que le marteau des démolisseurs pour disparaître à jamais, sans préjudice de ces autres faits analogues qui se commettent chaque jour, sous les yeux des ministres, avec leur approbation, quelquefois par leur ordre, en présence du comité de l'intérieur et du comité de l'instruction publique, en présence des protestations non-seulement des journaux spéciaux, mais encore de la presse en général, qui commence à s'occuper, elle aussi, d'archéologic. Rien n'y fait, la démolition poursuit son cours, et quand ce n'est pas la démolition, ce sont des restaurations presqu'aussi déplorables; ce que l'on ne détruit pas, on le déguise, on le transforme, et l'œil le plus exercé a peine à reconnaître l'œuvre de nos pères en présence de ce mépris de l'art et de l'histoire, affiché au sein de la capitale elle même, je crois qu'il y aurait lieu, par la Société française, de supprimer les inspecteurs du département de la Seine et de donner à cette suppression le caractère d'une protestation énergique contre ce vandalisme officiel qu'elle tente en vain d'arrêter.

« Les restaurations, le badigeon, la marbrure, fleurissent aussi en province; il y a, notamment dans le Limousin, une famille de peintres ambulants, d'origine Italienne, les Fiores, je crois, qui s'en vont d'église en église, de fabrique en fabrique, de sacristie en sacristie, offrant au rabais, le secours de leur pinceau; et la modicité de leurs prix leur vaut une assez nombreuse clientelle. L'église de ChâteauMelliant, par exemple, leur a été livrée et est sortie de

leurs mains moitié verte et moitié blanche; à Orléans, on a brutalement abattu, malgré les démarches de M. Mérimée, l'Hôtel-Dieu attenant à la cathédrale, la maison des pauvres, auprès de la maison du Seigneur, c'était bien, c'était chrétien, je dirai plus, c'était conforme, selon moi, aux données de l'art catholique qui faisait saillir les immenses proportions de ses cathédrales en leur accolant des édifices de moindre dimension; mais aujourd'hui les conseils municipaux qui ont la prétention de comprendre les beautés de leurs églises, ne trouvent rien de mieux que de les isoler, que de les placer au milieu d'une espèce de plaine aride plus ou moins régulièrement pavée.

Mais enfin, quoique profondément regrettables, ces actes de vandalisme s'expliquent s'ils ne s'excusent pas ; quelle que soit l'impulsion donnée dans ces derniers temps au mouvement archéologique de la France; ce mouvement n'a pas encore assez pénétré au cœur du pays pour produire les effets que l'on avait droit d'en espérer, les départements, les conseils municipaux dévastateurs ou réparateurs (c'est souvent tout un ), peuvent être assimilés aux hommes du XVIII. siècle qui trouvaient l'art ogival barbare, mais MM. les administrateurs et architectes de Paris qui se piquent de savoir, n'ont pas pour eux cette excuse, ils font le mal avec connaissance de cause, et pour ainsi dire, en se frottant les mains. Je crois donc les inspecteurs utiles et peut-être nécessaires dans les départements, inutiles et presque dérisoires à Paris; néanmoins la Société ne doit pas se décourager, elle doit au contraire redoubler d'efforts, vigilance, d'énergie, surtout dans ses dénonciations: la publicité de certains actes est souvent leur plus juste, leur plus efficace châtiment.

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Ces paroles que nous avons reproduites le plus exactement qu'il nous a été possible, ont vivement impressionné l'auditoire.

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