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réduite d'après un dessin très-exact de M. Bouet, peintre et membre de la Société francaise. Cette vue représente la façade méridionale: on aperçoit au bout l'entrée de caveaux qui régnaient sous le moulin de l'abbaye. Voici aussi un spécimen des détails de la façade du nord: c'est le blason du fondateur, moulé sur l'un des écussons les mieux conservés, dont le plâtre se trouve maintenant au musée d'antiquités de Caen. Charles de Martigny portait: écartelé, au 1er. et au 4., un lion rampant; au 2. et 3., trois fasces vivrées chargées d'une bande semée de fleurs de lys. Nous ne connaissons pas les couleurs de cet écusson.

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CONSIDÉRATIONS

SUR LA FLORE MURALE

ET PRINCIPALEMENT

SUR DES VÉGÉTAUX SCULPTÉS, FIGURÉS PAR M. DE CAUMONT,

Par M. Charles DESMOULINS,

Membre de l'Institut des Provinces, Inspecteur divisionnaire de la Société française.

MONSIEUR,

Vous m'avez fait l'honneur, le mois dernier, de me demander mon avis sur la détermination spécifique des végétaux représentés sur deux chapiteaux dont vous m'avez adressé la gravure. La première chose que je dois faire, c'est de me dépouiller de ce désir de tout expliquer, si naturel à ceux qui étudient les monuments du passé. Il faut voir en effet si, consciencieusement parlant, il y a lieu à expliquer, à déterminer scientifiquement; et en thèse générale, il me semble qu'il est prudent, nécessaire même, de se renfermer dans une grande réserve, comme vous l'avez fait dans votre volume de l'architecture religieuse (p. 322). Soit inhabileté d'imitation, soit infidélité dans les souvenirs, soit enfin fantaisie pure, les fleurs artificielles ne datent pas du jour où les modistes en ont orné les chapeaux de nos dames. Aussi, dans les monuments, comme dans les tableaux, comme dans

les modes, on remarque et on remarquera toujours, on signalera comme une exception précieuse, l'imitation fidèle et rigoureuse des formes de détail des végétaux. Et ici, j'argue de faux les modèles classiques, tout aussi bien que les types les plus élégants des diverses phases sculpturales de notre art chrétien. Quoi de plus inexact, en effet, que l'Acanthe Corinthienne? Le sentiment, le mouvement, comme disent les peintres, s'y trouvent, mais non la reproduction du détail. Quoi de plus obscur, en l'absence du sarment garni de ses feuilles, que la grappe de raisins romane? Il arrive, dans ce cas, qu'on hésite entre elle et la pomme de pin, comme cela m'est arrivé à Moissac et ailleurs. Quoi de plus arbitrairement agencé que cette jolie cerise (?) à demi cachée sous la feuille, dans les hauts chapiteaux de la nef à Chauvigny, à St.-Hilaire de Poitiers, à la chapelle de l'Immaculée Conception à Lyon ? quoi de plus fantastique que les crochets du XIII. siècle? quoi de plus infidèle enfin, si gracieux qu'ils soient, que les choux frisés et les chardons de la décadence ogivale ?

Au milieu de toutes ces infidélités, il y a une exception d'autant plus remarquable qu'elle est générale pour tous les temps et pour tous les lieux : elle est immuable comme une loi, et, caractérisée par cette condition d'universalité, elle est, si je ne me trompe, unique. C'est celle qu'offre le chêne; aussi vous, avec votre coup-d'œil de naturaliste qui, comme un verre amplifiant, ajoute la certitude de la netteté à vos perceptions d'archéologues, vous n'avez pas manqué de la faire ressortir en disant (p. 318) de ce seul végétal qu'il a été parfaitement imité, parfaitement rendu.

Vous le voyez, c'est avec une idée préconçue, avec une défiance systématique que j'aborde le travail que vous m'avez prescrit; mais je me garde bien de m'en défendre et de m'en cacher, puisque ce n'est, après tout, qu'une réserve de prudence; et si, comme je le crois, les déterminations en

matière de flore murale ne peuvent être que rarement suivies de ces points d'exclamation (!) que les naturalistes appellent point de certitude, je suis loin de vouloir pour cela qu'on s'abstienne de chercher à reconnaître les végétaux figurés sur nos monuments. Je veux seulement que les déterminations soient en général proposées craintivement, sans affirmation absolue, et cela parce qu'il faut accorder une grande latitude à ces sortes d'horticultures sur pierre. Je veux en outre qu'on soit très-coulant sur l'exactitude de l'exécution, mais qu'on tienne compte de toutes les intentions même légèrement indiquées; l'esprit du temps l'exige impérieusement. En effet :

1o. Si le galbe d'une feuille est une indication qui dirige la pensée vers le choix d'une détermination spécifique, il faut bien reconnaître que ce galbe est plus ou moins exactement reproduit dans beaucoup d'autres espèces, car nous ne connaissons guère, pour 70,000 végétaux phanérogames décrits jusqu'ici, qu'environ soixante-dix formes types pour les feuilles simples et une trentaine pour les feuilles composées. Or, quand le galbe est à peu près identique, quel est le caractère principal qui sert à reconnaître la famille, puis à déterminer l'espèce? Evidemment c'est la nervation: c'est dans ce caractère essentiel, qui est aux feuilles ce qu'est le squelette aux animaux vertébrés, qu'on a pu chercher des bases méthodiques pour la botanique fossile dont l'étude a été si brillamment constituée par M. Adolphe Brongniard. Hé bien! ce caractère boussole, si j'ose ainsi dire, manque presque toujours entièrement, ou n'est exprimé que trèsincomplètement dans la phytographie murale. Voilà pour ce qui concerne la feuille en elle-même, car je ne parle pas ici de la fleur dont la petitesse relative, la délicatesse et la complication fréquente de formes interdit presque toujours la reproduction; on ne trouve, ce me semble, que deux formes de fleurs imitées sur les monuments, savoir: la forme rosacée

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