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considérablement les ressources de son modeste budget. Pour aider M. le maire de Thaon à y faire face, nous lui avons alloué une somme de cent francs.

Pendant le mois d'août, alors que la plupart des membres de notre Société étaient en villégiature, nous avons reçu la visite de la ghilde de SaintThomas et Saint-Luc. De concert avec M. le comte de Marsy, nous avons fait aux archéologues belges, au nombre de cinquante, les honneurs de la ville de Caen, et nous avons mis à leur disposition la salle de nos séances. Dans la réunion qu'ils y ont tenue, notre président, M. Langlois, a souhaité la bienvenue à nos hôtes, et nous avons pu constater, par leurs propres témoignages, le juste renom de nos monuments à l'étranger et la grande autorité qui s'attache toujours aux ouvrages de notre illustre compatriote, M. de Caumont.

Dans ce même mois d'août, plusieurs d'entre Vous ont pris part au Congrès de l'Association Normande à Carentan : nous ne parlerions pas ici de leur intervention très appréciée dans les excursions et dans les enquêtes, si une question posée au programme, et qui est un peu de notre Société, n'avait eu un véritable retentissement. Il s'agissait de la détermination de l'emplacement. exact de la cité de Crociatonum. Pour élucider ce problème, beaucoup de congressistes ont pris la parole, et M. Travers, s'appuyant sur un ensemble

rentan

de considérations très plausibles, a émis l'opinion que Crociatonum devait être cherché, non à Caou à Sainte-Mere-Église, mais du côté d'Odouville. Or, pendant que l'on dissertait ainsi, un archéologue bien connu de la Mayenne, M. Liger, croyait reconnaître la mystérieuse cité sous les monticules des herbages de Beuzeville-au-Plain. Tous les journaux ont parlé de cette découverte, et tout naturellement M. Liger ne doute en aucune façon de sa réalité. Il est possible qu'il ait raison. Mais, comme jusqu'ici aucune fouille n'a été faite sur le point qu'il indique et que l'on ne connait aucun objet antique en provenant, il est prudent jusqu'à nouvel ordre de se tenir sur la réserve.

C'est surtout quand il s'agit des problèmes si délicats de la géographie ancienne que les systèmes s'échafaudent rapidement et s'écroulent de même. Attendons, par conséquent, avec patience et résignons-nous à rester encore quelque temps sans être absolument fixés sur l'emplacement de Cro

ciatonum.

Comme les années précédentes, vous avez offert des médailles aux élèves qui, dans les sept lycées de l'ancienne circonscription de la province de Normandie, ont obtenu le premier prix d'histoire dans la classe de rhétorique.

Les élèves qui ont bénéficié de cette distinction sont MM. François Jean, pour le Lycée de Caen; Henri Basin, pour le Lycée d'Évreux; Gaston

Guesdon, pour le Lycée de Cherbourg; Ernest Robine, pour le Lycée de Coutances; Couppel du Lude, pour le Lycée d'Alençon; Henri Poidevin, pour le Lycée de Rouen; Ferdinand Langlois, pour le Lycée du Havre.

Pendant l'année qui vient de s'écouler, nous avons admis au nombre de nos membres titulaires : le R. P. Jossaud, M. Le Pelletier, le curé-doyen de Saint-Étienne, M. Auguste Léo, publiciste à Paris. Nous avons nommé également un certain nombre de membres correspondants étrangers. Malheureusement, pendant cette même période, nous avons perdu six de nos membres titulaires : MM. Blanchetière, de Larturière, Boulatignier, le chanoine Nicquet, le duc d'Harcourt et M. le sénateur de La Sicotière.

M. Blanchetière, entré dans nos rangs le 2 décembre 1851, avait senti sa vocation archéologique s'éveiller au contact de M. de Caumont. On lui doit des travaux estimables sur les pierres tombales de Notre-Dame-sur-l'Eau et sur le château de Domfront. Ancien conducteur des ponts-etchaussées, M. Blanchetière s'était fait une situation importante à Domfront par sa capacité et par la droiture de son caractère. Il avait été pendant quelques années maire de la ville et s'était concilié la sympathie générale.

M. de Larturière, qui faisait partie de notre Société depuis le 2 janvier 1874, avait été fort

longtemps maire de Vire. Comme administrateur, il s'occupa avec une prédilection marquée du développement de l'instruction primaire et de l'organisation de la Bibliothèque municipale qu'un de nos confrères, M. Fédérique, dirige avec tant de dévouement.

Pendant qu'il était à la mairie, il présida des expositions industrielles et des expositions rétrospectives d'objets d'art et de curiosité, qui attirèrent beaucoup de visiteurs et qui firent honneur, tout à la fois, à la ville de Vire et à ses édiles. Appartenant à la vieille noblesse du pays, M. de Larturière, par ses relations, était au courant de tout ce qui concernait les familles de l'arrondissement. Tous les événements qui s'étaient passés dans le Bocage, pendant la Terreur, lui étaient parfaitement connus, et nous savons que, sur cette période, il a pu fournir à nos historiens locaux les renseignements les plus circonstanciés et les plus sûrs. Il ne s'était jamais désintéressé de ces recherches et nous nous rappelons encore que ce fut à l'occasion de la publication par M. de Neuville des mémoires de Michelot-Moulin, qu'il nous écrivit ses dernières lettres.

M. le chanoine Nicquet, que la mort a frappé récemment, était curé de Villers-Canivet lorsqu'il fut nommé membre titulaire le 2 juin 1873. Il nous appartenait non seulement par l'intérêt qu'il portait à nos monuments religieux, mais encore par la

communauté des goûts et des études. L'histoire du clergé du diocèse de Bayeux, pendant la tourmente révolutionnaire, avait été de sa part l'objet des recherches les plus longues et les plus persévérantes. Malheureusement, M. le chanoine Nicquet poussait la conscience et l'amour de l'exactitude jusqu'au plus extrême scrupule. Il ne pouvait se décider à rien publier quand il lui restait encore un point à élucider, un document à consulter. Hélas! sur un événement quelconque, qui peut se flatter de pouvoir composer un dossier réunissant toutes les pièces officielles, tous les articles de journaux, tous les témoignages contemporains! M. Nicquet a été victime de cet amour exagéré du complet. Il a amassé toute sa vie des documents, laissant à d'autres le soin de les utiliser.

M. Boulatignier n'était ni un antiquaire, ni un historien: c'était un jurisconsulte éminent, que son labeur opiniâtre et sa connaissance approfondie du droit administratif portèrent aux plus hauts emplois. Devenu conseiller d'État, M. Boulatignier n'oublia jamais son pays d'origine, la Normandie, et s'associa chaleureusement à toutes les manifestations intellectuelles qui s'y produisaient. C'est sous l'empire de ce sentiment qu'il tint à faire partie de notre compagnie; il y entra comme membre titulaire en 1853 et, pour répondre aux sympathies qui nous étaient ainsi témoignées, sur la proposition de M. Charma, nous l'appelames aux fonctions de directeur en 1855.

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