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vierge, le tuf, avec ses veinules caractéristiques et la consistance particulière aux terrains qui n'ont jamais été remués. Inutile de foncer plus bas. Nous élargîmes l'incision cruciale, et parvînmes ainsi jusqu'à quatre grosses pierres recouvertes par une cinquième, plate et fort large. Ces cinq blocs étaient à un mètre sous terre, et formaient une sorte de table ou dolmen. Le peu que je devais trouver était là.

Sous les deux blocs de droite, à l'orient du tertre, j'ai recueilli une pointe de flèche en silex non poli et un petit fragment de couteau aussi en silex; puis les débris d'un large vase, de forme rare, si je ne me trompe, dans les collections; puis deux pièces de fer oxydées dans toute leur épaisseur. Sous les pierres de gauche, nous avons eu une poterie très-délicate, mais petite, et un bracelet en bronze c'était tout. Soit que le tombeau ne contienne pas d'autres objets, soit qu'il n'ait pas été ouvert dans sa partie riche, les fouilles, continuées quelques jours encore, n'ont fourni que de nombreuses pierres erratiques d'espèces diverses et cette terre spéciale aux lieux d'inhumation.

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Je donne ci-contre un dessin (au tiers du diamètre) des poteries.

Ces échantillons de la plus vieille céramique sont en argile brunâtre, fine, non calcaire, très-cuite, et paraissent avoir été vernissés en noir. Le poids des matériaux qu'ils supportaient les avait brisés en nombreux fragments. Ces morceaux, d'une friabilité telle qu'ils s'effritaient sous le doigt à la moindre pression, ont repris peu à peu, à l'air, assez de consistance et même de solidité pour qu'on ait pu les réunir et les souder, de manière à rétablir les deux vases en leur entier, sauf quelques par

celles broyées par la pioche. Le grand vase, dont la forme est tout-à-fait analogue à celle des plats indiens-américains de bois ou de terre que l'on voit au musée ethnographique du Louvre, était certainement destiné au service culinaire c'était un plat de table, si l'on peut s'exprimer ainsi en parlant de cette époque. Le petit servait peutêtre de coupe à boire. L'un et l'autre ont dû être montés à la main, et sans tour de potier, car ils ne sont ni complètement d'aplomb ni absolument arrondis; mais, tels qu'ils sont, un artisan habile était seul capable de les confectionner. Le plat a une hauteur de 8 cent. 5 mill.; un diamètre, au haut, de 33 cent., et, au bas, de 8 cent.. 5 mill. seulement. L'intérieur a, je crois, été verni en couleur foncée, et présente en outre un dessin argenté ou nacré consistant en cercles horizontaux parallèles entre eux, reliés par des barres ou chevrons. La couleur qui a tracé ce dessin était d'une solidité à toute épreuve, puisqu'elle a résisté à bien des influences destructives. La petite poterie n'est remarquable que par sa gracieuseté : son dessin est pur et correct. Il semble qu'elle ait été vernissée extérieurement.

Le bracelet est un grand anneau ovale et ouvert (dont les diamètres, sont l'un de 5 cent., l'autre de 6 cent. 5 mill.) formé d'une tige méplate, terminée par deux demi-boules aplaties. Il faisait ressort pour laisser passer la main. Le bronze qui le compose est oxydé au point de n'avoir plus aucune résistance. Cet ornement, en raison de son étroitesse, n'a pu s'adapter qu'au bras d'un enfant ou plutôt à celui d'une femme.

Les deux morceaux de fer semblent, au contraire, des attributs masculins et guerriers. L'un d'eux, d'une longueur de 20 cent., et terminé en pointe, a pu être un bout

de lance, une dague ou un couteau; l'autre, long de 8 cent. et recourbé, était un fort hameçon ou peut-être une partie de bracelet.

Les deux silex, portion de couteau ou grattoir et pointe de flèche, non polis, n'offrent par eux-mêmes aucun intérêt; mais leur présence permet d'assigner une date relative à ce tumulus. En effet, nous trouvons ensemble le silex, c'est-à-dire l'outil primordial; le bronze, premier métal connu après l'or et l'argent, et enfin le fer, dont la découverte a été bien postérieure à celle du bronze. Les trois âges de la pierre, du bronze et du fer ont déposé leurs marques dans cette sépulture, et la font ainsi remonter à une époque de transition où les métaux usuels étaient déjà connus, mais pas assez répandus pour supprimer absolument l'usage économique du silex.

Ne pourrait-on dire aussi et dès à-présent que ces quelques vestiges de nos pères nous permettent de conjecturer, sans trop d'invraisemblance, de ce qu'étaient alors les arts et l'industrie, et - allons plus loin de présumer des sentiments et des croyances qui animaient et émouvaient nos rudes ancêtres ?

Si la chimie, science moderne, n'existait point encore parmi des peuplades de nomades chasseurs et pasteurs, ils possédaient au moins certains procédés industriels qui leur donnaient moyen de découper, de tailler, et, un peu plus tard, de polir les silex transportés des lieux d'origine, notamment du Quercy et du Périgord. Ils savaient déjà creuser des mines pour en extraire le cuivre et l'étain ainsi que les oxydes et sels de fer. Ils avaient inventé des méthodes pratiques pour fondre ces métaux, opérations compliquées, surtout quant au fer; pour les mettre en œuvre, les tremper même, afin de rendre le bronze plus

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