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fleurs de lis et la forme des lettres, ce qu'on ne découvre cependant qu'au moyen d'une minutieuse observation. Sachant que Charles V fixa à trois le nombre de fleurs de lis dans les armes de France, nous pouvons assigner à ces deux premières monnaies une date antérieure à cette transformation héraldique: elles ne peuvent pas être postérieures au commencement du règne de Charles V dit le Sage, qui monta sur le trône en 1364, si elles ne sont pas de Charles IV dit le Bel, qui régna de 1322 à 1328. La troisième porte les mêmes ornements et le même personnage que les deux précédentes; mais, dans leur exécution, on remarque beaucoup plus d'imperfections et d'irrégularités. Aussi l'attribuons-nous volontiers à Charles IV dit le Bel.

3o.

4o. La quatrième a d'un côté un écusson chargé de trois fleurs de lis avec un point en abîme, comme brisure. Cet écusson est surmonté d'une couronne ouverte de trois fleurons alternés avec trois perles en forme de trèfle. Le reste du champ de cette monnaie n'a aucun ornement. On lit autour † KAROLVS DEI GRACIA FRANCORVM

REX.

*

Le revers représente une croix richement fleuronnée, enfermée dans un quatre-feuilles cantonné de quatre couronnes. L'inscription est toujours: † XPC VINCIT * XPC *REGNAT * XPC IMPERAT. Elle a, comme les autres, trois centimètres de diamètre.

*

Cet écu à la couronne a été frappé, sous le règne de Charles VI dit le Bien-Aimé, par le parti du Dauphin (Charles VII dit le Victorieux). Ce dernier monta sur le trône en 1422. Cette pièce est très-exactement reproduite, avec ces indications, dans l'Histoire de France par M. J. Charton.

Une monnaie semblable a été trouvée dans les ruines du château de Montbrun; elle est conservée dans le médaillier de M. de Labonne, membre de la Société Archéologique; une autre, trouvée à la Chapelle-Montbrandeix, appartient à M. Leyssard.

5o. La cinquième est d'une conservation parfaite. Du côté de la face, elle représente le roi Richard, vêtu d'un large manteau royal, la tête surmontée d'une couronne à trois larges fleurons. Il tient une épée de la main droite, pendant que la gauche est relevée devant la poitrine. Voici l'inscription qui l'entoure

GRA ANGLE: FRACIE R': D: AQI.

RICARD': D':

Au revers, une très-belle croix fleuronnée, cantonnée de deux fleurs de lis et de deux léopards. On lit autour : +: AVXILIVM * MEVM * A * DOMINO B. Nous n'hésitons pas à voir ici une pièce de Richard II, roi d'Angleterre, fils du prince Noir, qui règna de 1377 à 1399.

Comment et depuis quand l'église de Ladignac cachaitelle ce petit trésor, dont cinq pièces seulement sont parvenues à notre connaissance? C'est ce que nous ne saurions dire d'une manière absolument certaine. Cependant, aidé par l'histoire, nous faisons une hypothèse qui nous semble être l'expression de la vérité, surtout si l'on veut bien remarquer que ces pièces sont tombées du haut d'un mur qu'on démolissait. En 1590, le château de Ladignac fut occupé par les ligueurs. Le comte de Ventadour, gouverneur de Limoges, alla l'assiéger, traînant à sa suite la fameuse couleuvrine dite Marsalle. Après une résistance opiniâtre, les assiégés, commandés par le sieur La Cousse, quittèrent le château, et se réfugièrent sur les voûtes de l'église. Là, étant canardés, selon l'expression énergique

du P. Bonaventure (1), ils furent obligés de se rendre à discrétion. Six ou sept ligueurs furent pendus, et La Cousse fut décapité à Limoges. Ces cinq pièces en or, toutes d'une date antérieure à 1590, nous semblent un dernier souvenir laissé, depuis bientôt 300 ans, par ces malheureux assiégés, sur l'église où ils avaient cherché un refuge.

Notre devoir d'archéologue est « de rechercher et de décrire les monuments écrits ou figurés qui existent, soit à la surface, soit à l'intérieur du sol, et d'en assurer la conservation (2) ». Nous venons d'accomplir la première partie de ce devoir, et nous vous proposons d'exécuter la seconde, en faisant l'acquisition de ces cinq pièces. Si la Société Archéologique veut bien prendre cette proposition en considération, elle atteindra doublement le but que lui marquent ses statuts : non-seulement ces pièces seront sauvées de la destruction qui les attend, mais encore le produit de leur vente sera employé à réparer le monument qui les a gardées jusqu'à ce jour.

6o.

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En 1858, en creusant les fondements de la maison qui sert aujourd'hui de presbytère à la paroisse de Marval, canton de Saint-Mathieu, on trouva un écu d'or, un royal aquitain, qui a été vendu récemment à un doreur. Nous avons pu l'examiner pendant quelque temps, et voici sa description:

Du côté de la face, il représente un léopard passant, la tête surmontée d'une couronne. On lisait autour, en belles lettres gothiques: † EDVVARDVS D GRATIA ANGLIE ET FRAN

CIE REX.

Au revers, on voyait une croix fleuronnée, cantonnée de

(1) P. BONAVENTURE, T. III, p. 804.

(2) Statuts de la Société Archéologique, art. 2.

quatre lions ou léopards, avec l'inscription † XPC VINCIT

*

*

XPC REGNAT XPC IMPERAT. Cette pièce pèse 3 grammes et demi. Elles nous paraît être d'Edouard III, qui succéda sur le trône d'Angleterre à son père Edouard II en 1327. Il entra en France, et battit Philippe IV, mais fut vaincu à son tour par Charles V, et mourut en 1377.

7. Il y a douze ans environ, on trouva à Balledent, canton de Châteauponsac, un trésor de pièces françaises où l'on en remarquait une qui mérite d'être décrite. C'est une imitation des royaux de France. D'un côté, on trouve un buste vu de face et couronné; il est revêtu d'un manteau, et tient de la droite une épée, au milieu d'un encadrement orné de neuf rosettes. La légende est : *KAROLVS DVX A. QVITANIE.

Le revers porte une croix fleuronnée et cantonnée de deux fleurs de lis et de deux lions d'Aquitaine, et, pour légende, toujours le cri de guerre des croisés : XPC VINCIT, XPC REGNAT, XPC IMPERAT. Un petit vaisseau en indique le commencement; il est remplacé sur la face opposée par une étoile. Charles, fils puîné de Charles VII et de Marie des Deux-Siciles, duc de Berry, mort duc d'Aquitaine en 1472, frappa ce royal, qu'on pourrait appeler aquitain. Cette pièce est reproduite dans le Bulletin de la Société Archéologique du Limousin, tome XIII, p. 213.

8°. M. de Labonne possède une monnaie en or, trouvée à Montbrun, sur laquelle on lit très-nettement: RICHARDVS PICTAVIENSIS. Elle doit être de Richard Coeur-de-Lion, qui passa à Montbrun en allant faire le siége de Châlus.

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9o. En 1816 ou 1817, une pièce d'or fut trouvée au village de Puy-Bourraud, commune de Vaulry, canton de Nantiat. Elle représente, d'un côté, une figure assise

sur un trône gothique, portant le glaive et la couronne, et soutenant un écu semé de fleurs de lis, avec cette légende† PHILIPPVS DEI GRATIA FRANCARVM REX.

Au revers est une croix latine d'un dessin très-délicat et la devise: XPC. VINCIT. XPC. REGNAT. XPC. IMPERAT. Cette pièce peut être de Philippe IV dit le Bel (1314), ou de Philippe V dit le Long (1322), ou même de Philippe VI dit de Valois (1350). Toutefois elle est antérieure à Charles V, qui fixa le nombre des fleurs de lis à trois. Elle faisait partie de la collection de M. Allou. (Description des Monuments de la Haute-Vienne, p. 335.)

10o.

En 1854, on a trouvé dans la commune de SaintGilles-les-Forêts, canton de Châteauneuf, une pièce d'or de Philippe le Bel qui doit être la reproduction de cette dernière.

11o. Suivant la Feuille hebdomadaire de 1776, on trouva cette même année, dans la paroisse de Saint-PriestLigoure, canton de Nexon, une grande quantité de pièces de monnaie dont quelques-unes étaient d'or. Elles portaient pour face une croix cantonnée de quatre fleurs de lis, avec la légende : SIT NOMEN DOMINI BENEDICTVM. Au revers, la lettre F couronnée et cantonnée de deux fleurs de lis, avec ces mots : FRANCISCVS DEI GRATIA FRANCORVM REX. Ces pièces étaient donc de François Ier (1515-1547), car on n'en connaît pas de semblables de François II. (ALLOU, Description des Monuments de la Haute-Vienne, p. 303.)

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12o. Dans une terre près du village d'Escurat, commune du Buis, canton de Nantiat, on a trouvé, à différentes époques, un assez bon nombre de monnaies en or. Plusieurs ont été vendues à des orfèvres, et fondues. Trois

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