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VENDREDI 21 JUIN

Réception au château de La Rochefoucauld.

M. le duc et Mme la duchesse de La Rochefoucauld ont bien voulu permettre aux Congressistes de visiter leur magnifique château de La Rochefoucauld, dont ils ont fait euxmêmes les honneurs. M. E. Lefèvre-Pontalis leur a exprimé toute sa reconnaissance et en même temps les a félicités du goût et du soin qu'ils apportent à la restauration et à l'embellissement d'une des plus belles demeures de la Renaissance française.

Champagne d'honneur du Vendredi 21 Juin.

Le vendredi soir 21 juin, à 9 heures, les membres du Congrés archéologique de France ont offert, dans les salons. de l'hôtel de ville, un champagne d'honneur. A cette occasion, la façade et la tour de l'hôtel de ville avaient été illuminées.

M. Fabre, préfet de la Charente, et M. Mulac, maire d'Angoulême, assistaient à cette fète, qui réunissait plus de deux cents congressistes et invités.

M. E. Lefèvre-Pontalis, président du Congrès, a profité de cette occasion pour remercier, en son nom et au nom des Congressistes, la Municipalité et le Conseil municipal du bon accueil qu'ils ont reçu à Angoulême.

M. E. Lefèvre-Pontalis vante les richesses archéologiques du pays et ses sites ravissants. Il remercie ensuite tous ceux qui ont pris part aux excursions; ceux qui, à un titre quelconque, en ont assuré le succès. Enfin, il lève son verre à la ville d'Angoulême, cette belle cité, fièrement campée sur ses remparts; à sa prospérité, à son développement, à son avenir.

M. Mulac remercie au nom de la ville, dont la population est flattée de la présence des Congressistes: il ne doute pas que cette visite de savants ne laisse un souvenir durable, et qu'un grand nombre de ses concitoyens ne s'intéressent aux publications qui vont prochainement relater les travaux du Congrès.

Le maire d'Angoulême lève son verre en l'honneur des membres du Congrès, des étrangers venus visiter les richesses archéologiques de la France et les monuments de la Charente, et des dames infatigables qui ont pris part aux durs travaux du Congrès.

M. Fabre, préfet de la Charente, félicite les Congressistes de l'ardeur qu'ils ont apportée dans leurs travaux. « Avec vous, dit-il, l'archéologie n'est pas seulement de la science, elle est aussi du sport ». Il fait l'éloge des savants qui vont dans tous les coins du pays et font revivre, par leurs décou vertes, le souvenir d'artistes restés inconnus, mais qui ont mis dans leurs œuvres, avec leur génie, toute leur âme.

M. le Préfet lève, en terminant, son verre à la Société française d'Archéologie, à son éminent Président, à ses membres, aux dames, dont la présence donne à cette fète le meilleur de son éclat.

M. le vicomte de Ghellinck-Vaernewyck, délégué du gouvernement belge, membre du Comité d'honneur de la Société, prend à son tour la parole pour remercier de l'accueil qu'il a reçu à Angoulême. Il lève son verre en l'honneur de M. le Préfet, de M. le Maire et du Président du Congrès.

Enfin, M. Banchereau, trésorier de la Société, en l'absence de M. Chevallier, secrétaire général, adresse des remerciements à tous ceux qui ont pris part au Congrès. qui en ont facilité le succès, notamment aux Compagnies de chemins de fer, pour l'organisation des trains spéciaux. et à la presse, qui n'a pas ménagé son précieux concours.

Inauguration du Monument élevé au R. P. de la Croix, à Poitiers, le Samedi 22 Juin.

La Société française d'Archéologie s'est rendue à Poitiers, au cours du Congrès d'Angoulême, principalement pour rendre hommage à la mémoire du R. P. de la Croix par la voix de son Directeur. Elle y a trouvé l'accueil aimable que lui avaient fait les habitants et les membres de la Société des Antiquaires de l'Ouest, lorsqu'elle y tint ses assises en 1903.

A l'issue du déjeuner servi à l'hôtel de France, M. Deshoulières, directeur adjoint de la Société, remercia au nom de tous, les présidents et membres des Sociétés locales de la région, qui toutes avaient tenu à se faire représenter: Mile de Pierredon, secrétaire de la Société historique et archéologique de Saint-Émilion, M. de La Ménardière, président de la Société des Antiquaires de l'Ouest, M. le marquis de Fayolle, président de la Société historique du Périgord, M. Jouhanneau, président de la Société historique et archéologique du Limousin, etc. Il adresse en terminant un souvenir ému à notre regretté confrère M. de La Bouralière, ancien président de la Société des Antiquaires de l'Ouest, qui avait été l'âme du dernier Congrès de Poitiers, en 1903. -M. l'Archiprêtre de la cathédrale, M. Richard, archiviste du département et M. Ginot. bibliothécaire de la ville de Poitiers, assistaient également au déjeuner.

A l'inauguration du buste du R. P. de la Croix, œuvre du statuaire Octobre, des discours ont été prononcés par M. de La Ménardière, M. le vicomte de Ghellinck, délégué du gouvernement belge; M. Héron de Villefosse, membre de l'Institut, président de la section d'archéologie du Comité des Travaux historiques, et par M. E. Lefèvre-Pontalis.

M. Héron de Villefosse, membre de l'Institut, prononce le discours suivant :

MESSIEURS,

Parmi les maîtres qui ont apprécié très hautement les recherches du R. P. de la Croix, qui ont soutenu ses débuts, qui lui ont prodigué leurs encouragements de la manière la plus cordiale, qui ont chaleureusement applaudi à ses succès, il en est un dont le nom nous est cher et dont nous devons nous souvenir aujourd'hui avec un pieux respect. Jules Quicherat, l'auteur de tant de travaux destinés à répandre sur toutes les branches de notre histoire et de notre archéologie nationales une lumière si vive et si délicate, fut un des admirateurs les plus convaincus de notre confrère. Il avait pour lui un attachement véritable; il parlait de lui sans cesse au Comité d'archéologie; il le citait comme un modèle dans les Congrès de la Sorbonne; il se réjouissait de le voir, et, chaque année, il combinait ses voyages de vacances de façon à traverser le Poitou et à venir surprendre le P. de la Croix sur un de ses chantiers. Ah! Messieurs, comme il vous aurait bien parlé de lui. Avec quel cœur, avec quelle chaleur il aurait su vous rappeler ces brillantes qualités qui ont fait la force et les succès du P. de la Croix, qui ont préparé sa renommée! Ces hommes, d'idées et de convictions opposées, avaient l'un pour l'autre une affection touchante qui les honore grandement tous les deux. Je me souviens avec émotion de la joie de Quicherat,le jour où le Ministre de l'Instruction publique, qui était alors Jules Ferry, attacha la croix de la Légion d'honneur sur la poitrine de

notre ami.

Le P. de la Croix ne semblait pas prédestiné aux grandes recherches qui ont illustré son nom; il n'y était en aucune façon préparé. Ayant tout d'abord cultivé la musique avec frénésie, il avait l'habitude de dire à ses élèves que ceux qui y restaient insensibles ne seraient pas reçus dans le royaume des cieux! Ce fut assez tard, à la suite d'une circonstance imprévue, qu'il délaissa la musique, son premier amour, et que sa vocation archéologique prit naissance, se développa tout à coup et devint irrésistible. Dès lors, la passion des recherches scientifiques

s'empara de lui et domina tout dans sa vie; il lui sacrifia son temps, sa santé, sa fortune. S'étant formé lui-même par la pratique et par une observation minutieuse, il poursuivait ses idées avec une ténacité et une énergie peu communes. Grâce à son indomptable volonté, il obtint ainsi les résultats les plus inattendus et les plus importants. Son coup d'œil était pénétrant, j'allais dire surhumain. Il avait acquis une telle pratique du terrain qu'il devinait tout de suite et sans hésitation à quel endroit précis il fallait donner le coup de pioche pour découvrir le filon qui devait lui procurer la victoire. A un âge où d'autres aspirent au repos, il travaillait encore, il travaillait toujours : il est mort sur la brèche, comme un soldat vaillant, en tenant haut et ferme, jusqu'à la dernière heure, le drapeau de l'archéologie, en pensant à son cher Musée, à son cher temple Saint-Jean, à sa chère Société des Antiquaires de l'Ouest.

Tout l'intéressait et l'attirait: la préhistoire, l'époque romaine, le moyen age. Jamais il ne se spécialisa, et pendant toute sa carrière scientifique, il fit preuve de la plus grande indépendance d'esprit. Il manifesta cependant une prédilection marquée pour l'époque mérovingienne, à laquelle il devait les meilleures joies

de sa vie.

Une voix particulièrement autorisée, celle du savant Président de la Société des Antiquaires de l'Ouest, M. de La Ménardière, vient de vous rappeler éloquemment la longue suite de ses découvertes. Les plus retentissantes furent, à coup sûr celle de Sanxay et celle de cet Hypogée des Dunes où vous avez eu, Messieurs, l'heureuse idée de lui élever le monument que nous inaugurons aujourd'hui. C'est ici, en effet, que sa pensée se reportait sans cesse et avec le plus de douceur. Par une association d'idées facile à comprendre, il unissait dans son cœur, à l'Hypogée des Dunes, le Temple Saint-Jean, où il a fondé, comme nous avons pu le constater tout à l'heure, le plus admirable musée de l'art mérovingien qui soit au monde, de cet art mérovingien qui forme comme le trait d'union entre l'art antique et l'art du moyen âge. Sa grande âme plane pour l'éternité audessus des monuments qu'il a réunis avec une sagacité remarquable et une patience que rien n'a pu lasser.

Son imagination vive et ardente lui fit émettre parfois des

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