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M. E. Lefèvre-Pontalis prononce ensuite le discours suivant:

MESDAMES,
MESSIEURS,

Heureux de visiter en votre aimable et savante compagnie le pays des coupoles, où vous serez séduits à la fois par l'intérêt des monuments et le charme du paysage, je me félicite de pouvoir ouvrir le Congrès d'Angoulême devant l'élite des archéologues français et étrangers dans une ville où nous recevons l'accueil le plus empressé. Je remercie cordialement M. Fabre, préfet de la Charente, d'honorer de sa présence notre séance d'ouverture et M. le sénateur Mulac, maire d'Angoulême, d'avoir bien voulu mettre à notre disposition la salle des Fêtes de ce majestueux Hôtel de Ville. En nous adressant ses meilleurs souhaits de bienvenue, en faisant préparer un cadre de lumière et de verdure pour notre champagne d'honneur, il s'est acquis un double titre à notre reconnaissance.

Chaque année, nous avons le plaisir de voir au milieu de nous M. Héron de Villefosse, membre de l'Institut, qui représente ici M. le Ministre de l'Instruction publique. Il y a quelques jours, ses anciens élèves et ses nombreux amis lui offraient une plaquette commémorative pour célébrer la vingt-cinquième année de son élection à l'Institut. C'était la fête de la science, mais c'était aussi la fête de l'obligeance, qui s'incarne dans notre éminent confrère, comme tant d'autres qualités du cœur et de T'esprit. Qu'il veuille bien accepter, en cette circonstance, le témoignage de notre inaltérable amitié et de notre gratitude pour son dévouement à notre œuvre et pour les mémoires si documentés qu'il veut bien insérer dans nos volumes.

Vous entourez de la même sympathie M. le comte de Ghellinck, membre de notre Comité d'honneur, délégué du Gouvernement belge, qui se fait toujours un devoir et un plaisir de rendre compte de nos sessions à l'Académie royale de Belgique. Il y intercale ses observations personnelles et ses charmantes photographies avec une forte dose d'aménité pour votre Directeur et

les organisateurs de nos Congrès, qui seront toujours heureux de rendre la mene politesse à nos amis de Belgique. Leur Fédération a deja enregistre bien des succès dans ses brillantes sessions, mais elle veut se surpasser à Gand l'année prochaine.

Notre inspecteur divisionnaire M. Labande représente ici le Mecène des arts et des sciences, le prince de Monaco. M. Guiffrey, membre de l'lastitut, nous reserve la primeur de ses remarques sur les celebres tapisseries du château de Verteuil. Il est accompagne de son collègue M. Verlet, qui a doté la ville d'Angoulème d'une belle œuvre de sculpture, et qui vient admirer les œuvres délicates des imagiers du XIIe siècle. Je tiens à remercier M. Louzier, inspecteur général des Monuments historiques, de se joindre à nous pour écouter les doléances des archéologues sur l'abus des restaurations, dont l'Angoumois offre trop d'exemples.

En regrettant l'absence de notre savant confrère M. John Bilson, dont nous mettons tous à profit la complaisance et l'expérience, je suis heureux de saluer nos amis de Belgique et d'Angleterre, qui reviennent chaque année resserrer les liens qui nous unissent, M. l'abbé Brun, archiprêtre, qui se réjouit de nous recevoir bientôt à la cathédrale, M. Imbert, archiviste de la Charente, M. Jacquard, inspecteur d'Académie, et les représentants de la presse, qui ont bien voulu répondre à notre invitation. Notre inspecteur M. Chauvet, dont le nom fait autorité dans la science préhistorique et qui vient d'obtenir un ruban rouge si bien mérité, s'est fait l'interprète de la Société archéologique de la Charente pour souhaiter le succès de notre Congrès et pour évoquer le souvenir des pionniers qui ont exploré les gisements de la région. Il a le mérite d'avoir formé des élèves qui marcheront sur ses traces. Je félicite ses confrères de continuer l'œuvre de leurs devanciers en donnant à leur Bulletin un caractère nettement scientifique, et j'espère qu'ils sauront y faire une place à des monographies d'églises rurales, qui deviennent trop rares dans les recueils des Sociétés savantes.

Notre Société ayant pour but essentiel l'étude des monuments du moyen âge, je voudrais rendre hommage aux archéologues qui ont étudié les caractères de l'architecture romane dans les Charentes. En tête de cette liste, je placerai le nom de l'abbé

Michon, dont la Statistique monumentale, imprimée en 1844, renferme de précieuses indications. Le Répertoire archéologique de M. Marvaud, l'Architecture byzantine en France de M. de Verneilh, malgré les conclusions très discutables de l'auteur sur la filiation des églises à coupoles, seront toujours utiles à consulter, mais l'un des livres les plus originaux consacrés aux églises charentaises est l'œuvre d'un groupe d'architectes anglais conduits par M. Sharpe qui ont fait paraitre en 1876 le résultat de leurs observations sous ce titre : A visit to the domed churches of Charente. M. Phéné Spiers, qui avait pris part à cette fructueuse campagne, a publié des observations techniques sur les coupoles dans le Bulletin Monumental.

Je tiens à évoquer ici le souvenir de notre ancien secrétaire général M. de Laurière, qui repose dans le cimetière de La Rochefoucauld, et qui incarnait en sa personne le zèle archéologique. Je remercie M. Héron de Villefosse d'avoir si bien fait revivre sa mémoire et d'avoir mis en relief tous ses mérites. M. Audiat, Mgr Julien Laferrière, dont le grand ouvrage est malheureusement inachevé, ont également beaucoup de titres à la reconnaissance des archéologues.

Notre inspecteur M. Georges Musset, qui a exploré l'Aunis et la Saintonge, sac au dos, et dont le dévouement à la science ne s'est jamais ralenti, a publié sur les églises rurales et sur La Rochelle d'importantes études. President de la Commission des arts et monuments de la Charente-Inférieure, il a contribué à faire classer beaucoup d'édifices avec le dévoué concours de MM. les architectes Albert Ballu et Georges Naud, qui ont mis leurs relevés à notre disposition. M. Dangibeaud, conservateur du Musée de Saintes, est l'auteur d'un remarquable mémoire sur la sculpture et l'iconographie des églises de la Saintonge. Nous serons heureux de mettre à contribution sa science et son obligeance quand nous visiterons l'antique cité des Santons. M. Émile Proust a photographié les motifs de sculpture de tous les monuments de Saintes : c'est une heureuse initiative qui devrait être suivie dans nos villes d'art, car notre excellent confrère M. Martin-Sabon ne peut suffire à la tàche, malgré le surmenage de ses objectifs. Nos confrères MM. George et Mourier ont mené à bonne fin l'inventaire archéologique d'Angoulême, et j'émets le

vru, au nom de tous les Congressistes, que M. George puisse faire bientôt paraitre son ocvrage sur les églises de l'Angoumois, dont il eonnait les molt tres détails. Enfin, notre ancien directeur Lécn Palustre. M. Emle Biais et notre savant confrère M. Paul Vitry ont étudié les euvres des artistes de la Renaissance dans la région.

Le Congrès d'Angoulême aura le mérite de la nouveauté, car notre Société n'a jamais tenu ses assises dans cette grande ville. Par contre, elle s'est réunie à Saintes en 1844 et en 1894: cette dernière session s'est terminée à La Rochelle. Le programme du Congrès de 1912 est tracé sur un plan beaucoup plus vaste, afin de faire bien comprendre le rayonnement de l'art poitevin dans les Charentes. Ainsi nous visiterons Poitiers, ce qui nous permettra d'assister en corps à l'inauguration du buste du R. P. de La Croix, vis-à-vis de cet hypogée mérovingien découvert par l'éminent archeologue, monument unique en France et désormais à l'abri de toute déprédation. Nous nous rendrons à Saint-Émilion pour étudier l'église monolithe et les coupoles de la collégiale, à Saintes pour admirer les arènes, le musée lapidaire, Saint-Eutrope et Sainte-Marie-aux-Dames. Si j'ajoute à ce premier lot les églises de Charroux, de Civray, de Melle, d'Aulnay-de-Saintonge, de Chateauneuf, les châteaux de La Rochefoucauld, de Verteuil et de Montmoreau, vous serez peut-être effrayés des kilomètres à parcourir en chemin de fer et en voiture, mais rassurez-vous. Les infatigables organisateurs de nos randonnées, MM. Chevallier, Heuzé et Banchereau ont tout prévu, depuis l'horaire des trains spéciaux jusqu'au menu de vos repas. Ils acquièrent chaque année de nouveaux titres à votre gratitude, mais leur meilleure récompense c'est la satisfaction qu'ils éprouvent à vous être agréables.

Le souci de l'organisation matérielle ne nous fait jamais oublier l'intérêt scientifique, car nos beaux volumes sont le souvenir le plus durable de notre passage. Je tiens donc à remercier M. Serbat et M. André Rhein d'avoir parcouru les Charentes l'année dernière pour prendre les notes nécessaires à la rédaction du guide. Vous écouterez leurs savantes explications et vous profiterez de celles que nos confrères voudront bien y ajouter. Après douze ans d'excursions scientifiques, votre Directeur a la profonde

satisfaction d'avoir pu constituer un groupe d'anciens élèves de l'École des Chartes, d'architectes et d'auditeurs libres de ses cours qui veulent bien se donner la peine d'étudier un monument dont le nom ne figure pas au programme du Congrès pour le décrire dans le volume des Mémoires. Leurs travaux, marqués au coin de la bonne méthode et de la véritable érudition, font grand honneur à notre chère Société.

Depuis le Congrès de Reims, le bureau de notre Société s'est trouvé modifié par la nomination de mon excellent ami François Deshoulières aux fonctions de directeur adjoint, le 26 avril dernier. Notre dévoué confrère Émile Travers, qui est entouré de l'affection unanime des membres de notre Association, avait le profond regret de ne pouvoir assister à nos Congrès en raison de son état de santé, qui exige de grands ménagements. Le Conseil administratif, voulant reconnaître les éminents services qu'il a rendus à notre Société en qualité de trésorier et de directeur adjoint, l'a nommé par acclamation directeur honoraire. Vous vous unirez à moi pour lui adresser nos meilleurs vœux de rétablissement et l'expression de nos souvenirs les plus affectueux. Son successeur, dont vous connaissez l'endurance et l'activité, qui a suivi nos Congrès depuis douze ans, et qui a publié dans le Bulletin Monumental des articles très remarqués, saura redoubler de zèle pour partager avec votre Directeur la charge de la présidence des Congrès et de l'impression de nos volumes. Notre confrère M. Boinet, nommé secrétaire de rédaction comme M. Marcel Aubert, le secondera dans sa tâche; je tiens à le remercier de son précieux concours.

Notre inspecteur général M. le marquis de Fayolle, nos inspecteurs divisionnaires MM. Fage, Bégule, le comte Lair, Jarry, sont toujours fidèles à nos Congrès. J'aperçois dans cette salle plusieurs inspecteurs départementaux, la plupart des membres du Conseil, et des Congressistes modèles comme nos amis Macqueron et J. de Valois, qui comptent les années par les noms des villes où se sont tenus des Congrès. C'est pour moi un agréable devoir de souhaiter chaque année la bienvenue aux dames qui ne reculent devant aucune fatigue pour nous suivre et qui veulent s'initier à l'archéologie pour mieux comprendre les beautés de l'art français.

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