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ÉTUDES

HISTORIQUES ET ARCHÉOLOGIQUES

SUR LA

CATHÉDRALE DE LISIEUX

par

Charles VASSEUR

Au milieu de toutes les vicissitudes politiques et sociales, Lisieux a eu le bonheur de conserver, dans son intégrité, son antique cathédrale, monument imposant et du plus haut intérêt, dont la monographie mériterait les efforts réunis d'un écrivain et d'un grand artiste. Mais jusqu'à présent, ni les historiens, ni les architectes ne s'en sont occupés.

A peine M. Viollet-le-Duc, dans un de ses derniers volumes, en dit-il deux mots, et on comprend par la manière dont il en parle, qu'il ne l'a jamais vu. Pourtant, ce monument n'est pas situé dans des lieux inaccessibles et isolés. Pourquoi, à quatre heures de Paris, sur l'un des grands réseaux de chemin de fer, n'arrête-t-il que quelques Anglais, qui retrouvent dans ses pierres des témoins de leur domination en Normandie? Pourquoi est-ce dans les écrits de Du Carel, Cotman, Turner, Galli-Knight et Parker qu'il faut aller chercher toutes les observations écrites sur cet édifice de l'époque de transition?

Les habitants de Lisieux partagent un peu l'indifférence générale pour ce chef-d'œuvre, élevé des mains de leurs aïeux, et dont ils devraient faire leur

gloire. Les écrivains locaux restent sans inspiration et n'en parlent pas. Nous n'avons à citer qu'une brochure de 32 pages in-8°, écrite en 1840, par M. Farolet, curé de l'église, après avoir obtenu, par la haute influence de M. Guizot, le classement de cette œuvre magistrale parmi les monuments historiques. Ce travail succinct est généralement exact, et mérite l'éloge si l'on tient compte du peu de documents que l'auteur avait entre les mains. Dans le courant de 1867, M. A. Pannier, archéologue, a publié dans un journal de la localité, Le Normand, une description propre à compléter, en certains points, la brochure de M. Farolet. La Statistique monumentale de M. de Caumont ne pouvait, sans sortir de son plan général, donner autre chose que des aperçus très-succincts, avec quelques gravures. Tels sont nos seuls devanciers. Nous avons voulu, à notre tour, étudier l'histoire et l'architecture de l'antique cathédrale. En publiant le résultat de nos recherches dans les Archives et de nos observations sur le monument, nous n'avons pas la prétention de présenter un travail définitif, une monographie compiète, les éléments ne nous en paraissent pas encore suffisants; c'est un simple avant-projet, un croquis, un jalon pour celui qui viendra enfin, nous l'espérons, traiter à fond le sujet, d'une manière digne de lui.

PREMIÈRE PARTIE.

HISTOIRE.

CHAPITRE Ier.

ORIGINES CHRÉTIENNES DE LISIEUX.

L'étude d'un monument rappelle naturellement à l'esprit l'origine des institutions qui ont nécessité sa construction, pour l'usage desquelles il a été élevé. Il n'est donc pas étrange, en présence de la cathédrale de Lisieux, de rechercher quels furent les apôtres et les premiers prélats de ce siége épiscopal, anéanti par le malheur des temps, et d'essayer de fixer l'époque où le christianisme pénétra dans cette partie de la Neustrie.

Sous l'influence des doctrines jansénistes, de vives discussions se sont élevées entre les savants des deux derniers siècles sur la date de l'introduction du christianisme dans les Gaules; mais elles n'ont pas été exemptes de préjugé et de système, et partant la lumière n'a pu se faire. Aujourd'hui,

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