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2o Le silex également local abondant à Montépilloy, présentant l'aspect du grès à grains serrés; uniformément gris et terne, il se polit sans prendre aucune patine.

3o Le silex strié de bandes irrégulières bleuâtres, silex d'eau douce se prêtant moins bien que l'autre à la taille. 4o Le silex jaune et caverneux, qui se rapprocherait du silex meulière.

5o Le silex pyromaque, translucide sur les bords, à cassure conchoïdale, de couleur variant du noirâtre au blond. Comme il se trouve principalement en cordons de gros rognons dans les bancs supérieurs de la craie; il a fallu que nos néolithiques allassent le chercher à une certaine distance ou se le fissent apporter en échange d'autres objets.

6o Une hache trouvée à Raray avait tout à fait l'aspect du marbre, et comme tous les objet rencontrés étaient en substance à base siliceuse, ce fait de l'emploi du calcaire sous forme marmoréenne chez nous me semblait étrange. Soumis à un examen attentif, celui-ci a été reconnu être en quartz vert, de même que plusieurs petites haches.

D'autres sont en roche amphiboleuse, en jadéite, etc. En un mot, les substances provenant de terrains primitifs ne se rencontrant qu'assez loin de notre région, il y a là une preuve de colportage. J'en rencontre une autre dans la trouvaille par moi faite d'une pointe de poignard (c'est ainsi que l'on désigne ces objets) en silex du Pressigny (1).

Désignation des instruments.

J'ai trop abusé de votre patience pendant les années

(4) M. Chastaing fils, en sa qualité de minéralogiste, a bien. voulu examiner ces diverses pièces et en déterminer la nature.

précédentes pour ne pas vous faire grâce aujourd'hui de la longue énumération d'objets recueillis sur notre sol. Ce sont toujours les haches polies ou non, grandes et petites, plates et globuleuses, les grattoirs, lames, percuteurs et pointes, enfin l'outillage néolithique connu, qui forment l'ensemble de nos collections. Je veux seulement attirer votre attention sur quelques objets d'un intérêt spécial.

Les nucléi sont généralement massifs et présentent rarement ces longues faces régulières résultant de l'ablation des lames qui se voient sur les nucléi du Pressigny et de Preslong, mais plusieurs ont une configuration spéciale qui semble intentionnelle; les pièces détachées du bloc primitif donnent à celui-ci l'apparence d'un sommet de pyramide, et cette forme souvent répétée nous fait croire à un parti pris. A quoi pouvaient servir pareils objets? C'est dans le silex gris et terne que j'ai essayé de décrire et que l'on rencontre principalement à Montépilloy qu'ils sont taillés.

Plusieurs de nos grattoirs sont assez curieux en ce qu'ils présentent une forme très-allongée, comme celle du grattoir des cavernes; ce sont des lames dont le bout est retaillé en grattoirs.

Nos percuteurs sont généralement massifs; mais au contraire quelques-uns d'entre eux, petits et anguleux, utilisés dans leurs parties les plus saillantes, semblent avoir servi à la confection de pièces délicates.

J'ai des ciseaux de grande dimension avec un tranchant admirablement poli.

Quelques haches d'une dimension minuscule, peuvent être considérées comme objets votifs ou amulettes; j'y verrais volontiers des petits ciseaux ou rabots emmanchés dans une gaine de façon à ne présenter que le trauchant.

Je vous fais grace de nos perçoirs et pointes de flèche,

quoique beaucoup d'entre eux soient d'une grande perfection, car ces types sont fort connus; mais j'appellerai votre attention sur deux ou trois scies à encoches, plusieurs pièces soigneusement retaillées sur toutes les faces. et formant un outil en forme de fuseau ou cigare; d'autres, de petite dimension, ont pu être des engins de pèche; certains silex nous offrent une concavité semicirculaire de dimensions variables qui devait servir à perfectionner les bois de flèche ou les menus outils en os, comme épingles et aiguilles. Absence de flèches à tranchant transversal (1). Beaucoup d'objets dont je vous épargne la description échappent au cadre des classifications connues.

Indépendamment de la diversité des matières employées, il y a une grande différence dans la main-d'œuvre; les travailleurs semblent avoir appartenu à plusieurs écoles. Beaucoup d'outils sont taillés avec une rare perfection; d'autres, d'aspect grossier, de grande dimension, semblent être le résultat d'un travail hâté et dédaigneux. Si nous nous trouvions sur le terrain d'alluvion superficielle que décrit M. Jacquinot, je serais disposé, en comparant ces dernières pièces à celles qu'il décrit dans sa brochure, à les ranger dans le type de transition sauvinien qu'il propose; je les mettrais à côté d'outils du même genre par moi trouvés dans les alluvions de la Seine. Ici l'assimilation nous est interdite par la nature du sol, et j'y vois tout au contraire l'ouvrage maladroit des derniers ouvriers de la pierre, après l'introduction du métal.

On remarquera peut-être que dans l'énumération des

(1) Cette affirmation est trop absolue; nous avons trois ou quatre échantillons de ce type, mais leur dimension et leur facture pourraient les faire rentrer dans la catégorie des petits ciseaux.

outils, je n'ai pas mentionné le polissoir qui a dû jouer un si grand rôle dans la fabrication des pièces en silex indigène. Je ne parle pas des autres qui peuvent être dues à l'importation. L'absence de polissoir connu dans notre région est cause de ce silence je sais bien que quelques fragments de grès présentant des traces d'usure peuvent avoir servi au polissage, et sont désignés sous le nom de polissoirs à main. Mais je crois qu'il faut ne les considérer que comme la pierre à aiguiser du repasseur qui parachève l'œuvre commencée par la meule. Ces instruments seuls, sans polissoir fixe, devaient occasionner à l'ouvrier une besogne fastidieuse, rebutante, exigeant une patience et un déploiement de force extraordinaires. J'ai vu en présentant à la meule quelques silex, avec quelle tenacité et quelle vigueur il fallait appuyer pour obtenir un résultat toujours assez lent. J'en conclus donc à la présence probable, dans notre rayon ou environs, de polissoirs fixes, gros blocs de grès avec cuvette et rainures profondes, comme celui de Saint-Germain, ou ceux que l'on peut voir dans le Vendômois sous le nom de pierres cochées. La culture a pu les enfouir ou les briser.

Il ne me reste qu'un dernier mot à dire. La vue des pièces de nos collections eût abrégé notre nomenclature, car un coup d'œil fait mieux saisir les choses que les descriptions les plus minutieuses; mais le transport d'une collection n'est pas aisé. Aussi dois-je prier ceux d'entre vous qui veulent bien suivre nos études et qui désireraient de plus amples renseignements de venir les chercher à notre domicile.

La séance continue par la lecture du mémoire suivant, de M. Millescamps, membre de la Société d'antropologie de Paris.

Les monuments mégalithiques de Thimécourt, près Luzarches (Seine-et-Oise), constructions contemporaines de l'âge de la pierre taillée.

De longues et patientes recherches, entreprises sur de faibles indices et poursuivies pendant les années 1875 et 1876, m'ont permis d'exhumer deux monuments d'une haute antiquité qui, n'ayant laissé que des traces à peu près imperceptibles à la surface du sol, étaient demeurés jusqu'à ce jour complétement ignorés.

Ces deux monuments distincts quoique contigus sont situés sur le territoire de Thimécourt, hameau dépendant de Luzarches (Seine-et-Oise); ils occupent un point élevé, à l'altitude de 105 mètres environ, sur le versant sud de la petite vallée de l'Isieux. Tout autour s'étend une lande à peu près stérile, dont le sol est'saturé de pierres calcaires et de débris de carrière. Le sous-sol, qui appartient à l'étage inférieur du terrain tertiaire, est formé, suivant les places, de marnes fragmentaires et de calcaire grossier. C'est dans ce terrain dur et pierreux que les instruments primitifs de quelque tribu de l'âge de la pierre taillée ont paisiblement creusé une vaste et profonde excavation que nos outils modernes n'ont pas rouverte sans difficulté.

Le premier de ces monuments, apparent en trois points seulement, était composé de sept grès, de grandes dimensions, placés les uns près des autres à plat ou légèrement inclinés et reposant sur leur plus large surface.

Le second monument, complétement enfoui et formé

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