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Le roi s'embarqua donc en 1073, une deuxième fois pour la Normandie, en ayant soin de se faire accompagner des troupes d'origine anglaise qu'il avait enrôlées; peut-être étaient-ce des gens des domaines qu'il s'était attribués après la conquête. Son intention était de s'en servir pour soumettre les Manceaux, qui, excités par le seigneur de Mayenne et d'autres barons du voisinage, s'étaient soulevés, refusaient de reconnaître le don que le dernier comte du Mans, Herbert, avait fait à Guillaume de cette seigneurie, et faisaient même des incursions sur le territoire normand.

Guillaume n'aimait pas les Manceaux, s'il est vrai, comme l'assure Orderic Vital, qu'il ait dit un jour à son chapelain Samson : « Le siége épiscopal du Mans est vacant. Les Manceaux sont un peuple féroce, acharné contre leurs voisins, et toujours en rébellion contre leurs maîtres. Toi que je chéris depuis l'enfance, je te confie la direction spirituelle sur eux. » Samson refusa, en prétextant son incapacité; mais il recommanda un pauvre clerc breton de la chapelle du roi,

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nommé Ouel. Quand Guillaume le vit, il s'indigna d'abord de ce qu'on lui recommandait, pour l'évêché, un homme d'un extérieur si humble et

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peu prévenant. Cependant son chapelain fit un si grand éloge du savoir et des vertus de ce clerc, que le roi consentit enfin à l'admettre pour cette dignité. Ouel finit par être archevêque de

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Aussitôt que Guillaume fut arrivé en Normandie, il fit des préparatifs de l'expédition qu'il avait méditée contre le Maine. Ayant appelé sous ses bannières les Normands, il les réunit aux troupes amenées d'Angleterre, et marcha avec eux contre les insurgés. Il ravagea les terres du Maine, et mit d'abord le siége devant le château de Fresnay, qui, effrayé de cette attaque subite, demanda promptement à capituler. Toutes les petites villes et tous les bourgs dont il approcha, se soumirent avant même qu'il fit des sommations; les bourgeois et le clergé allaient au-devant de lui, et demandaient humblement à lui prêter serment de fidélité. Sa marche à travers le Maine aurait été plutôt le voyage d'un seigneur venant recevoir

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les hommages de ses vassaux, qu'une guerre, si ses troupes, les Anglais surtout, n'eussent puni, par des ravages cruels, l'insurrection des habitans.

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Le chef-lieu fut aussi effrayé que les autres places du comté, lorsque Guillaume, avec ses bandes victorieuses, vint l'investir et le sommer de se soumettre, à moins qu'on ne voulût s'exà voir les maisons incendiées et les bourgeois passés au fil de l'épée. Dès le lendemain, les habitans du Mans lui apportèrent les clefs de la ville, en le suppliant de leur faire grâce. Le reste du pays ne tarda pas à suivre leur exemple, et tout le Maine rentra en peu de temps dans la soumission à son nouveau seigneur. '

Jean de la Flèche, un des plus puissans barons de l'Anjou, s'était attiré l'inimitié des barons voisins à cause de son dévouement pour Guillaume; Foulques comte d'Anjou, et Ouel comte de Bretagne, vinrent assiéger Jean de la Flèche dans son château. Celui-ci invoqua les secours de Guillaume, qui ne demandait pas mieux que d'engager le combat contre des voisins dont il connais

I

<< Pacis legatos victori destinaverunt, et datis ab utrisque dextris, ipsi regalibus signis sua vexilla gaudentes associaverunt. >> Orderic Vital, lib. 4.

TRAITÉ CONCLU AVEC L'ANJOU.

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sait les sentimens hostiles envers lui. Il entra de nouveau en campagne avec une armée de Normands, d'Anglais et de Manceaux, qui pour la cavalerie seule comptait soixante mille hommes; elle était sous les ordres de Turgis de Tracy et de Guillaume, seigneur des Moulins-la-Marche. Cependant les barons ennemis, loin de se laisser effrayer par cette armée nombreuse, mirent de leur côté en campagne une armée considérable d'Angevins et de Bretons; elle passa la Loire, brûla ses bateaux, et campa au lieu appelé Blanchelande, bien déterminée à vaincre ou à mourir, lorsque des prêtres, soit de leur propre mouvement, soit envoyés par l'un des princes, accoururent dans les deux camps, négocièrent de part et d'autre, et obtinrent enfin une réconciliation entre Guillaume et les barons. Foulques, comte d'Anjou, renonça à ses prétentions sur le Maine, en faveur de Robert, fils de Guillaume, et promit de laisser en repos Jean de la Flèche. Depuis ce temps le Maine demeura paisiblement soumis au duc de Normandie. '

« Hæc pax.... omni vita regis ad profectum utriusque provinciæ permansit. Orderic Vital, lib. 4.

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CHAPITRE III.

Conspiration anglo-normande à Norwich. - Condamnation des

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coupables. Décapitation de Waltheof. - Guillaume assiége

Dol en Bretagne. — Il refuse de céder la Normandie à son

fils Robert Courteheuse.

Consécration des abbayes fondées à Caen par Guillaume et Mathilde. - Émeute des moines de Saint-Ouen. Le médecin de Guillaume promu à l'évêché de Lisieux. Déposition de l'archevêque de Rouen. - Statuts promulgués à Lillebonne en 1080. Conduite de Guillaume à l'égard des prétentions du pape Grégoire. Lettres de ce pape au Roi. Querelle entre ce roi et son fils Robert. Celui-ci quitte la Normandie.

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Guillaume assiége son fils

dans Gerberoy.

Pendant que Guillaume cherchait à rétablir la paix sur les frontières de la Normandie, et donnait des ordres pour la maintenir dans l'intérieur, les Anglo-Saxons, le croyant pour long-temps engagé dans la guerre sur le continent, conçurent de nouvelles espérances pour leur affranchissement; dans le nord surtout, où l'on était moins instruit de la situation des affaires de la Normandie, on crut que le moment était venu de secouer le joug imposé par les étrangers à l'An

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