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COLONIE ANGLO-SAXONNE.

Robert Guiscard de la scène de ce combat vic

torieux. '

Probablement, tous les Anglo-Saxons qui étaient venus chercher un asile dans l'empire grec ne combattirent pas dans la journée meurtrière de Durazzo. Au milieu du douzième siècle, il existait encore une colonie anglo-saxonne sur la côte grecque de l'Asie. Elle s'était acquis l'estime des habitans du pays. On ignore comment elle a fini; l'histoire, comme le monde, détourne bientôt son attention des malheureux qui fuient l'oppression triomphante.

En Angleterre, beaucoup d'habitans avaient pris leur parti, et s'étaient promptement habitués à leurs nouveaux maîtres. Souvent le peuple prenait même parti pour les Normands contre ses propres chefs. Ailleurs, des riches se trouvaient flattés d'être distingués par les vainqueurs3. Dans

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Voyez les détails de cette expédition dans l'Histoire des conquêtes des Normands en Italie, en Sicile et en Grèce, par E. Gaultier d'Arc, 1re époque, liv. 3. Paris, 1830.

2 Order. Vital, Eccles. Histor., lib. 4.

3

«< Aliquot sapientiss. civium, et nonnulli ex militibus ingenuis quorum nomen et opes valebant, et multi ex plebejis contra suos pro Nortmannis magnopere insurgebant. » Ibid.

rens,

ATTAQUE SUR DOUVRES.

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les endroits isolés, le rôle de partisan des étrangers était presque aussi dangereux que la résistance. Au-delà de l'Humbre, on était encore libre; les mécontens qui y affluaient faisaient de là des incursions sur le territoire normand, et se vengeaient de la défection des leurs, qui, par intérêt ou par goût, s'étaient déclarés pour pour leur cause. Coxon, comte anglo-saxon, qui, malgré ses paavait embrassé cette cause, fut assassiné par les insurgés'. Ceux-ci avaient engagé Eustache, comte de Boulogne, qui avait pour femme une princesse anglo-saxonne, et qui par ce motif devait porter cette nation à faire une tentative sur Douvres; les Anglais du pays devaient le seconder. Le comte, ayant probablement des sujets de mécontentement contre Guillaume, ou espérant s'enrichir par les conquêtes comme lui, vint en effet attaquer la place; mais les Normands firent une sortie, et repoussèrent les assaillans. A peine Eustache put regagner la rive française, et peu de temps après, il fit sa paix avec Guillaume.

2

'Will. Pictav., Gesta Guill. ducis. Orderic Vital, Eccles. Hist., lib. 4.

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Cependant l'insurrection avait un caractère assez grave pour déterminer le roi à repasser en Angleterre. Cette fois, il amena Roger de Montgomery, qui, pendant son expédition, avait gouverné la Normandie; il laissa le gouvernement de cette province, qui n'était plus qu'une dépendance de son royaume, à la reine Mathilde sa femme, et à Robert leur fils. Quant à Roger de Montgomery, le roi lui donna dans la suite le comté de Chester, Arundel et puis celui de Shropshire'. Il fut un des Normands les plus richement dotés en Angleterre ; il est vrai qu'il avait fourni soixante bateaux pour l'expédition.

Guillaume s'étant embarqué le 7 décembre 1067 à Dieppe, descendit le lendemain sur la côte anglaise. Il célébra à Londres les fêtes de Noël, avec la même solennité qu'il avait célébré celles de Pâques et de Pentecôte en Normandie. Profitant de la présence des seigneurs anglais pour les éblouir le faste de sa cour, et pour les fasciner par ses prévenances et son affabilité, il réussit à en ramener plusieurs à sa cause; cependant l'insurrection n'en continua pas moins

2

par

Orderic Vital, lib. 4.

« Desertores aliquot reducuntur. » Ibid.

le

DU ROI EN ANGLETERRE. — 1067.

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de se fortifier dans le nord, et l'année 1068 commença sous de fâcheux auspices. Exeter reçut les insurgés, et excita les autres villes à la défense commune. Guillaume, avec sa promptitude ordinaire, marcha contre cette ville, et les bourgeois, qui ne s'étaient pas attendus à être si rapidement investis, après une défense désespérée, envoyèrent dans camp leurs anciens, leur plus belle jeunesse et leur clergé en habits sacerdotaux, pour demander leur grâce. Guillaume la leur accorda; il tint même écartées de la place ses troupes mercenaires', animées d'une ardeur effrénée de pillage, et qui ont dû ajouter beaucoup aux malheurs de la conquête. Cependant, pour empêcher les habitans de se révolter de nouveau, il fit aussitôt commencer la construction d'un château fort, comme il avait fait à Londres et ailleurs. C'était un de ses expédiens les plus sûrs dans la conquête de l'Angleterre. A mesure qu'il prenait les villes ou les comtés, il y faisait construire des forts comme il en existe sur le continent. Les Anglo-Saxons ne sachant pas se fortifier ainsi, étaient tout étonnés

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<< Ne gregarii milites repente introirent. » Orderic Vital, lib. 4.

2 Ibid.

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PRISE D'EXETER.

de trouver partout des remparts contre lesquels leur faible tactique ne pouvait prévaloir. C'est ainsi que Warwick, Lincoln, Nottingham, York et beaucoup d'autres villes devinrent des places fortes, commandées chacune par un Normand, qui ordinairement devenait comte ou baron de la ville ou mème de la contrée entière. Nottingham fut confié à Guillaume Peverel, qui bâtit un château sur une montagne escarpée du Derbyshire', dans laquelle s'enfonce la fameuse grotte de Castleton. Walter Scott, dans son roman de Peveril du Pic, nom que reçut le château, assure que Guillaume était ou croyait étre le père de Peveril3, qui fut la souche d'une riche famille baroniale. Cette alliance est apparemment une tradition conservée en Angleterre, car l'histoire n'en parle pas.

Exeter, que Guillaume venait de prendre, fut confiée à Baudoin de Meules, fils du comte Gilbert Crespin, qui reçut également une dotation

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2

« William... was or supposed himself to be the father •, Peveril of the Peak, tom. 1, chap. 1.

etc.

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