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La fabrique a ainsi gaspillé de l'argent qu'elle eût pu bien mieux employer, et les bas-reliefs de la renaissance qui décoraient la devanture de l'orgue ont perdu, avec la délicatesse de leurs détails, la teinte sévère et transparente que le temps donne au vieux bois de chêne, et que les sculpteurs sur bois envient pour leurs travaux modernes.

A l'occasion d'un vase de la renaissance en terre cuite coloriée, trouvé dans le sol à Sainte-Marie-aux-Anglais (Calvados) et présenté par M. Focet, M. Raymond Bordeaux signale à l'attention de la Société et des personnes qui s'occupent de céramique, l'ancienne fabrique de poterie de Manerbe, près Lisieux, maintenant tout-à-fait oubliée. Suivant un passage de la Géographie Blavienne (article Normandie), cette localité, où on ne fait plus aujourd'hui que des poteries destinées aux usages domestiques, aurait possédé aux XVI. et XVII. siècles une fabrique de vases ornés, de poteries artistiques, analogues aux terres de Venise. Si l'existence, de cette ancienne fabrique est maintenant ignorée, ses produits se retrouvent encore en abondance dans le pays d'Auge et à Lisieux. Les brocanteurs font souvent passer les figurines et les vases de Manerbe pour des faïences de Palissy, et les amateurs s'y laissent assez volontiers tromper, grâce aux ornements dans le goût de la renaissance et aux brillants émaux qui ornent ces poteries, qui n'ont d'ailleurs rien de commun avec la faïence, mais qui peuvent être néanmoins l'œuvre de quelques élèves ou imitateurs de Bernard de Palissy. Les plus remarquables produits de cette fabrique sont les épis et les girouettes en terre cuite coloriée, qui ornent encore les toitures de beaucoup d'anciennes maisons de Lisieux, et de manoirs du pays d'Auge. Les couleurs qui dominent dans les émaux de ces poteries sont le vert, le violet, le brun, le gris et le bleu foncé. Le vase élégant présenté par M. Focet présente tous les caractères des poteries de

Manerbe; on y retrouve les formes et les nuances habituelles de cette fabrique et on peut présumer qu'il a été confectionné dans les premières années du XVII. siècle.

M. Bordeaux attire ensuite l'attention des habitants de Bernay sur quelques maisons ornées de sculptures qu'on remarque encore dans leur ville. Il signale trois maisons au coin de la rue 92 u dog A affublée depuis

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parce qu'il a reconnu sur l'un despoteaux du porche de cette maison, décorée de figures très-grossières, l'écusson du duc d'Alençon (de France, à l'orle chargé de besants), et que le duc d'Alençon, comme comte de Bernay, partageait avec l'abbé de Bernay, la seigneurie de la ville. Non loin de là, aussi rue de l'Humanité, n°. 7, on remarque encore la maison qui fait un angle rentrant, et dont la porte présente un chambranle avec moulures et feuillages sculptés en bois dans le style du XVe siècle.

Rue du Commerce, la façade du café Loisel mérite l'attention. La charpente en bois du premier étage est couverte de ciselures et de per

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de Caen, de Bayeux et même d'Evreux. Si l'on se rappelle que Bernay était autrefois du diocèse de Lisieux, on sera convaincu que chaque localité principale avait un style particulier qui était imité dans les petites villes environnantes, ou encore que les ouvriers d'une même contrée puisaient à des sources communes, et étaient dirigés par des maîtres établis dans la ville centrale.

2o. SEANCE,

Sous la présidence de M. le v1. de CUSSY, inspecteur divisionnaire de la Société.

Dans la soirée du 22 juillet la Société française a tenu, à Bernay, une seconde séance.

Les fouilles à faire à Berthouville ont été le principal objet des discussions de cette séance, presqu'entièrement consacrée à des lectures.

MM. Lottin de Laval et Bardet signalent des objets précieux découverts à Berthouville depuis les fameux vases de Mercure Canetus, entr'autres un anneau en or orné d'une sardoine gravée en ronde-bosse, anneau qui a été fondu, malgré sa haute valeur. La pierre gravée a seule été sauvée et vendue 300 fr. à la bibliothèque nationale.

M. de Caumont dit qu'il ne faudrait pas seulement chercher des objets antiques, mais encore les constructions romaines dont M. Le Prévost n'a rien dit dans son mémoire sur les vases de Berthouville.

La Société française offre 100 fr. pour ces fouilles.

M. Bardet annonce qu'il existe dans les environs du lieu'

où ont été trouvés les vases de Berthouville des ruines importantes un puits romain très-bien conservé mériterait d'être visité, ainsi qu'une éminence qui, suivant la tradition, recèle des trésors.

Quelques fouilles ont été faites par les membres de la Société de l'Eure qui habitent Bernay, mais elles ont été bientôt arrêtées par les préjugés des habitants persuadés que ces fouilles doivent attirer sur eux des malheurs.

M. Lottin de Laval cite un curieux exemple de ces superstitions suivant la croyance locale, celui qui emporte un trésor meurt dans l'année. Aussi un brave homme qui avait fait une assez bonne trouvaille eut l'idée au moins naïve de la faire enlever par une vieille jument.

M. de Caumont croit qu'il faut chercher à Berthouville, non un temple, mais une villa accompagnée d'un sacellum. Il expose les données scientifiques qui lui font émettre cette conjecture.

M. Bardet annonce que la teinte des blés indique parfaitement les ruines souterraines. M. de La Garenne, qui habite très-près de Berthouville, pourra surveiller les fouilles.

M. Lottin de Laval entretient l'assemblée de ses dangereuses pérégrinations en Orient pendant les années 1844-4546 et 47. Il donne une idée des travaux des voyageurs qui l'avaient précédé, et après avoir mis sous les yeux de l'assemblée plusieurs cartes d'Orient, il lit un chapitre de son ouvrage inédit. Ce fragment est intitulé : la marche des Dix Mille depuis le passage du grand Zab assyrien jusqu'à l'Arménie Occidentale.

M. le vte. de Cussy rend compte d'une visite qu'il a faite, en compagnie de plusieurs membres de la Société, au curieux musée que M. Lottin a formé à Menneval près Bernay.

Raymond BORDEAUX,
Secrétaire.

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