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de nos docteurs, comblé d'années et de bénédictions publiques, nous rappelant le bien-aimé et le dernier survivant d'entre les disciples du Sauveur, qui n'avait conservé, dans sa retraite de Pathmos, que la force de répéter à ses élèves et enfants un dernier conseil de paix et d'amour.

<«< Notre voix suppléant à la sienne, doit reconnaître tout ce que, grâces au fruit de ses leçons, notre pays trouve aujourd'hui, par les travaux intellectuels, de sympathie et d'appui dans la génération parvenue à la virilité.

« L'objet le plus cher à nos Sociétés archéologiques, la remise en honneur de la vieille architecture religieuse et catholique, a fait naître plus d'un généreux élan, honorable pour les annales de la ville et du collége. Ainsi deux faits récents et à peine achevés, désignent à notre haute estime des noms appartenant à des classes de la Société, dont la vocation spéciale est d'entretenir le travail, véritable source des vertus chrétiennes, au commerce et à l'industrie. Celleci, par les généreuses mains de son plus éminent représentant (1), vient de donner à un temple voisin, consacré par un pélerinage cher à la piété publique, le développement, l'élévation et le type qui convenaient à la majesté d'un tel sanctuaire bénit solennellement, l'autre jour, par le premier pontife de notre diocèse.

« C'est dans le sein du commerce de cette ville, au milieu d'une famille vouée aujourd'hui parmi nous à la magnifique œuvre de la Propagation de la Foi, que s'est élevé le pieux lévite (2) qui, comme frère quêteur et bâtisseur de la grande église dédiée à Notre-Dame-de-Bon-Secours, jouit déjà, de son vivant, d'une antique renommée. Seul et inconnu, il va frapper à la porte des palais et des chaumières; il a le secret

(1) M. Lebaillif, filateur. (2) M. l'abbé Godefroy.

de toucher les cœurs, et de justifier ses contemporains du reproche d'avare égoïsme, en obtenant partout des trésors en échange de quelques bénédictions et prières. Il n'a encore complété qu'en espérance son budget millionnaire d'oboles pieuses, et déjà il a presque achevé une entreprise réservée avant lui aux maisons ou nations souveraines; déjà il a hardiment élevé au-dessus de notre grande cité métropolitaine, un temple conçu dans ces proportions hautes et grandioses, et avec ce pur et catholique caractère, qui semblent nous révéler, surgissant tout-à-coup au-dessus de notre âge, une résurrection des siècles passés.

« Ces églises, nouvelles ou renouvelées, offrent le champ le plus favorable au travail d'ornementation par les arts du dessin, du coloris et de la pratique. Cette ornementation, lorsqu'elle est dirigée dans la voie que peut nous tracer la Société française, avec une source féconde à l'édification publique et au développement des talents, grâces au concours mutuel du Jabeur archéologique et du sentiment chrétien, la peinture religieuse a été appelée à délaisser la prééminence, et, on peut le dire, la divinisation de la forme jusqu'à nos jours consacrée dans l'école, par le prestige des grands maîtres de la renaissance. L'artiste appelé à décorer le sanctuaire, et à le compléter par une œuvre destinée à stimuler la prière publique, le fidèle qui vient y exhaler ses vœux, ont là une source commune d'inspiration, qui est la foi; cette source coule plus libre et plus pure, elle se dilate plus puissante à la vue des produits antérieurs d'une école comparativement mystique et immatérielle. Rome se prête ici encore à ramener notre âge dans la voie du progrès, par la route du passé. C'est dans la capitale du monde chrétien qu'ont été inspirés, qu'ont été composés, par un peintre éminemment catholique (1),

(1) M. Hauser.

des tableaux comprenant l'histoire de la voie douloureuse. Le zélé pasteur, qui a doté cette ville d'un si précieux sujet de prières et d'études, attend, pour lui donner dans le temple (1) une convenable et solennelle inauguration, la fin d'une saison où, par un concours d'épreuves rigoureuses, l'église doit tous ses soins et toutes ses ressources à l'accomplissement de ce devoir qu'elle a placé elle-même dans une sphère exceptionnelle, en l'appelant par une sublime expression, le sacrement au pauvre.

« Cette revue, nécessairement fugitive, des arts du sanctuaire, serait, à Falaise, par trop incomplète, sans un mot de tous sur celui qui s'associe et concoure le plus intimement, le plus indispensablement, à l'objet principal des monuments sacrés, qui est la célébration des fêtes et cérémonies pieuses.

«La musique religieuse a possédé, en France, au commencement de ce siècle, un promoteur, un rénovateur habile, dévoué, désintéressé; homme lui aussi, des anciens temps, par son abnégation et son entraînement d'artiste. Ce grand enseignement donné par Choron à la communauté catholique, se rattache aux nobles souvenirs qui, dans cette cité, ont initié son âme aux premiers devoirs de la vie publique commencée pour lui par la co-direction du collège de la ville. Aujourd'hui encore, son nom et sa famille nous sont chers à plus d'un titre. Sa voix s'est éteinte, mais le zèle pour l'œuvre n'est pas demeuré muet. Dans une de nos paroisses (2), les fidèles sont conviés à une large collecte pour l'œuvre importante et ardue de la restauration de leur orgue; dans l'autre (3), un de nos plus zélés concitoyens (4) dévoue

(1) N.-D.-de-Guibray.

(2) St.-Gervais.

(3) Ste.-Trinité.

(4) M. Sevin.

chaque année, de nouveaux efforts au précieux soin d'organiser les chœurs d'harmonie sacrée du beau mois où s'épanouit, avec la rose des champs, le culte de la rose mystique et de la reine des anges.

<< Messieurs, cette nomenclature de quelques œuvres douces et utiles n'est pas destinée à nous faire illusion; la Société française serait trop heureuse si elle n'avait qu'à diriger et encourager le bien, si elle n'avait surtout à empêcher et arrêter le mal. Dans nos contrées, une forte et prédominante part de sa bénévole activité est réclamée par les édifices appartenant à l'église; comme celle-ci, elle doit se faire militante; elle le doit, pour rester fidèle aux devoirs qu'impose son titre: conservation et description, c'està dire qu'il faut conserver ce que la main de l'homme et du temps menace de détruire; décrire et garder à la mémoire, fût-ce par un rapide coup de crayon, tout ce qui, sans cela, n'aurait souvent pas laissé plus de trace de sa forme sur le papier que sur le sol. La vie est rude dans la compagnie ; la lutte y est incessante, mais surtout pour les chefs; c'est à eux qu'il appartient d'aller, dans les capitales et hameaux de la France, examiner l'état de ses monuments; placer, à proximité, des sentinelles vigilantes; recueillir leurs cris d'alarme, et revendiquer pour eux-mêmes l'honneur de se mettre sur la brèche, courtois à partager les honneurs d'un succès dont ils s'étaient réservé la peine.

« Le mot de ralliement de cette généreuse milice, c'est guerre au vandalisme.

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« Vandalisme Vandales: : ces noms reviennent fréquemment sous la plume de nos maîtres; ils nous sont devenus familiers; et cependant, ils m'inspirent quelques scrupules que je demande la permission de vous soumettre.

« Nous vivons en un temps de grands travaux historiques; ils ont amené plus d'une réhabilitation, précieuse toujours à

accueillir, puisqu'elle était réclamée au nom de la vérité, mieux signalée, et d'une justice consciencieuse et éclairée. L'archéologie, vengeresse, légitime sans doute, de déplorables dilapidations, ne pourrait-elle pas éprouver quelque crainte de voir un historien futur, et peut-être prochain, la mettre en cause et l'actionner en diffamation, au nom d'un grand peuple, les vrais et antiques Vandales ?

<< Ces fiers ennemis de Rome, qui écrivit leur histoire avec ses plumes du Bas-Empire, vainqueurs des conquérants et des continuateurs de sa puissance, commencèrent à la Baltique la course guerrière qu'ils n'arrêtèrent, aux extrémités de l'Europe, que le temps nécessaire pour donner leur nom à la plus belle partie de l'Espagne et du monde (1). Poursuivant, de là, le Grand-Empire jusqu'en Afrique, ils succombèrent enfin, mais noblement, comme le reconnut le César d'alors, en honorant de la pourpre consulaire Gélinier leur dernier roi. Ces intrépides antagonistes des maîtres du monde, marchant au poste périlleux de l'avantgarde, dans la grande et providentielle invasion du cinquième siècle, qu'eurent-ils de commun avec nos prétendus Vandales, avec ces enfants dégénérés de notre France, qui ont déchiré le sein de leur mère, non par le glaive des combats, mais avec la pioche du fossoyeur, en brisant ses tombeaux, abattant ses temples, et faisant, sans danger pour eux, mais non sans honte et sans douleur pour la patrie, une guerre de rapine et de lucre à des pierres glorieuses et à des marbres sacrés ?

« Les débris de ce grand cataclysme, légués aujourd'hui à notre commune sollicitude, sont exposés eux-mêmes à des agens de destruction et d'altération, si variés et si divers dans leur origine, dans leur nature et dans leur esprit, que.

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