A science que créa M. Arcisse de Caumont, d'illustre mémoire. « L'assemblée est encore sous le charme des souvenirs évoqués hier par M. du Châtellier, qui, plus qu'octogénaire, participe à la direction de nos travaux avec l'ardeur toute juvénile qu'il a le secret d'associer aux études compagnes si assidues de son extrême vieillesse, frayant de plus en plus au fils si distingué que nous connaissons, à l'adolescent son petit-fils, tous deux présents, les voies du vrai savoir en archéologie. Est-il besoin de rappeler ici que notre éminent et vénéré confrère fut l'ami fidèle et l'infatigable compagnon du fondateur de l'institution des Congrès annuels? Et pourrais-je oublier que, durant plus de quarante ans, la bienveillance de M. de Caumont honora et encouragea mon faible concours à l'œuvre? « C'est évidemment à cette circonstance que je dois le témoignage de sympathie qui m'advient. Peut-être une vieille assiduité aux Congrès en a-t-elle eu aussi sa part. A leur occasion, en effet, plus d'une frontière et naguère la Baltique elle-même ont été franchies. <<< Dans Vannes, d'ailleurs, quoique cité bretonnante, un Guérandais d'origine, fût-il septuagénaire, se considère d'autant moins comme étranger, qu'il n'y a point perdu toute trace de liens de famille ou d'amitié. << Que ne retrouve-t-il aussi dans l'une et dans l'autre région où se dirigèrent tant d'excursions de sa jeunesse, les antiquités précieuses qui depuis lors ont disparu? « C'était le bon temps. Pour heurter à chaque pas, pour ainsi dire, des monuments dont le nombre et tout ensemble la diversité devenaient véritablement inénarrables, le long de toute la zone côtière qui de l'embouchure de la Loire s'étend jusqu'à Quiberon, un cœur ardent et deux pieds légers suffisaient. « Depuis lors que de vides et quelle aveugle destruction désormais! « A l'œuvre donc, chers et vaillants doctes confrères. Luttez contre le vandalisme à force de science et de labeurs. Étudiez, conservez, décrivez ce qui survit de nos belles antiquités celtiques. << En terminant, je réitérerai notre reconnaissant hommage à la mémoire de M. James Miln, ainsi que nos remerciements tant à MM. les membres de la Société polymathique qu'à MM. les conservateurs anciens et actuels du musée, dont il nous a été donné d'admirer la richesse. En les désignant autrement, je risquerais de blesser leur modestie. <<< Mais il est aussi une mémoire demeurée chère, celle de M. Louis Galles. Le Congrès s'associera au tribut qu'elle ne cesse de recevoir de la part des amis de la science archéologique. Comment enfin, puisque, à notre grand regret, M. l'intendant René Galles est absent, ne pas citer aussi ses travaux, et ne pas prendre à témoin des bonnes intentions de l'assemblée, M. Lallemand, l'infatigable guide du Congrès dans l'exploration de la cité vannetaise, en son passé de tous les âges? » La parole est ensuite donnée à M. G. Vallier pour la lecture d'un curieux mémoire sur une boîte à hosties du xva siècle, en cuir gauffré et peint. Les développements qui accompagnent le travail de M. Vallier ont vivement intéressé l'assemblée. La boîte en question, déposée sur le bureau, est examinée par un grand nombre de membres du Congrès, qui en demandent la reproduction dans les comptes rendus. M. le président déclare qu'il sera fait droit à ce vœu. M. G. Vallier demande ensuite à garder encore la parole pour lire une note sur la numismatique gauloise de la Bretagne. Cette note, accompagnée de dessins, sera aussi publiée dans les comptes rendus du Congrès. M. E. Cartailhac rend compte de la visite du Congrès au musée archéologique de Vannes. Il expose la stupéfaction des membres étrangers en voyant ces richesses, qui font l'honneur du Morbihan, indignement logées. Au moment où toutes les municipalités s'imposent de grands sacrifices pour créer des musées qui attirent les étrangers et permettent à la science de marcher en avant, on peut croire que la ville de Vannes, qui renferme des collections hors ligne, voudra leur offrir un asile digne d'elles. M. Cartailhac passe en revue les plus belles séries préhistoriques du musée. Il insiste sur l'intérêt multiple des mobiliers funéraires de Tumiac, du Mannéer-Roeck, du mont Saint-Michel et des allées couvertes. Il examine successivement les haches, les parures, les silex, les poteries. Il loue la présence de quelques plans en relief qui instruisent si bien le public, entre autres de celui du cromlech d'El-lanic, qui prouve que la côte du Morbihan s'est énormément affaissée depuis l'âge de la pierre. M. Cartailhac signale les diverses découvertes antéromaines conservées dans le musée de la Société, et qui établissent que la Bretagne a connu, avant les temps historiques, les diverses civilisations industrielles et successives que l'on a retrouvées dans le reste de la France. A l'occasion de ce très intéressant rapport, M. du Châtellier père fait remarquer la richesse et la pauvreté tout à la fois du mobilier de certains monuments morbihannais, et demande l'explication de cette différence. M. Lallemand répond qu'elle doit provenir de la violation antérieure des monuments pauvres en mobilier. La parole est ensuite donnée à M. Vallier sur l'examen qu'il a fait du médaillier de la Société polymathique. Il expose qu'il recherche les jetons du xvi° siècle au nom de Henri II et de François II, comme dauphins et ducs de Bretagne. Il en possède huit et serait heureux d'en augmenter le nombre, pour la monographie qu'il prépare sur ce sujet et pour laquelle il fait appel aux communications des numismates de la Bretagne. Il fait précéder sa communication d'une note déjà publiée par lui, en 1874, dans le Bulletin de la Société d'archéologie de la Drôme (Médailles du Dauphiné historiques ou de fantaisie frappées de 1494 à 1537; Valence, Chenevier et Chavet, 1874), note relative à la déclaration royale de 1532 et aux titres de dauphin et de duc de Bretagne, que l'héritier de la couronne de France devrait dorénavant porter, en écartelant les armes de France de celles de Bretagne et de Dauphiné, ainsi que cela fut fait sur une médaille de fantaisie frappée à Romans en 1533. M. Palustre rappelle qu'il a publié un travail sur les vitraux dela cathédrale de Rennes, et fait observer qu'il a trouvé sur ces vitraux des armoiries semblables à celles dont M. Vallier vient d'entretenir le Congrès. Sur un coffret en bois, fort curieux et très ancien, appartenant à la cathédrale de Vannes et exposé sous les yeux du Congrès, M. l'abbé Le Mené lit une note écoutée avec un vif intérêt et dans laquelle il explique les figures qui décorent ce meuble et en fixent la date entre 1150 et 1170. Après avoir, à la suitte de Littré, défini l'archéologie : k la connaissance et l'étude de l'antiquité, M. du Châtellier père prie le Congrès de vouloir bien émettre le vœu de voir compléter les Preuves de l'histoire de Bretagne, de dom Morice, et, pour faire toucher du doigt l'urgence de ce supplément, il raconte la perte et la destruction d'un grand nombre de documents fort précieux. A l'unanimité, l'assemblée s'associe à ce vœu, et M. Rosenzweig, archiviste du Morbihan, explique les projets qui touchent à ce sujet : M. de la Borderie s'apprête à publier, dans la Société des bibliophiles bretons, un quatrième volume de preuves, pour faire suite aux trois de dom Morice, et M. Rosenzweig lui-même a recueilli tous les documents qu'il a rencontrés. Il se propose de publier, en forme de cartulaire du Morbihan, ceux qui n'offrent point un intérêt assez général pour trouver place dans le volume de M. de la Borderie. La parole est ensuite donnée à M. l'abbé Luco, pour la lecture d'un mémoire inédit du regretté M. James Miln. D'un très grand intérêt archéologique, ce travail expose la découverte et l'exploration d'une sépulture circulaire, auprès du village de Nignol, dans la commune de Carnac. Ce monument se compose de deux murs à peu près concentriques; l'extérieur, construit en pierres plates et sèches; l'intérieur, bâti avec de gros blocs qui ont subi l'action d'un feu violent. L'enceinte centrale était destinée à la crémation des corps. Les cendres, recueillies dans des urnes, avaient été déposées dans la zone qui sépare les deux murs et même en dehors de l'enceinte extérieure. Pendant cette lecture, le Congrès avait sous les yeux, tapissant les murs de la salle, le plan et des vues de ce monument, ainsi que des planches représentant de grandeur naturelle les nombreux objets qu'on y a trouvés. |