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sans concession, sans lâcheté. Puisaye, admettons-le comme certain, fut un lieutenant général fidèle au devoir, et la bourgeoisie lui signifia son mécontentement par l'élection de Burban. Sans doute, l'ordre fut rétabli et force resta à la loi, mais un instant l'hostilité avait triomphé, son but était atteint. »>

Le Puisaye que nous trouvons ici eut une lignée. Nous la revoyons à la veille de la Révolution. Un descendant, petit-fils sans doute, présida avec fermeté l'Assemblée des notables réunis à Bellême pour la confection du cahier des doléances et la nomination des députés aux États Généraux.

Un autre petit-fils joua un rôle très-considérable dans les insurrections royalistes de l'Ouest.

Les confréries campagnardes, dites de charité, nous offrent un plus vif attrait de curiosité. La charité de Longny peut être considérée comme un des meilleurs types de cette populaire et vivace institution. Le patron. des charitains de Longny était saint Sébastien, et M. le docteur Jousset, qui a transcrit la charte constitutive de l'Association n'a pas dédaigné de recueillir le cantique que les confrères chantent encore aujourd'hui: nous serions porté à penser qu'il devait avoir un refrain à l'adresse des prêtres, comme le cantique communiqué par M. le curé de St-Langis-lès-Mortagnes :

O martyr saint Sébastien

Écoutez la voix du chrétien,

Prenez pitié dans ce moment
Apportez du soulagement.

Il y aurait lieu de rapprocher ce cantique du texte latin que nous trouvons dans la même brochure et qui est ainsi conçu :

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Les recherches de M. Jousset méritent d'être signalées à tous ceux qui s'occupent des usages, des mœurs et des chants populaires. E. DE B.

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27 Volume de la Société de l'Yonne. — 4o Volume de la Société d'Archéologie d'Avranches, par M, Cauvot.

Veuillez m'autoriser, Messieurs, à vous présenter quelques observations sur deux volumes qui m'avaient été remis il y a longtemps déjà, et qui, tous les deux, à des degrés pourtant inégaux, m'ont paru contenir des travaux importants.

Le 1er, le Bulletin de la Société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne, volume 27°, renferme une étude des plus remarquables sur un vieux poète français du XVe siècle, inconnu, je le suppose, d'un très-grand nombre d'entre vous. Les œuvres de ce poète, imprimées quelque temps après sa mort, étaient récemment.

encore, devenues tellement rares que le volume qui les contient avait atteint, on nous l'affirme, le prix énorme de 6,000 fr., lors de la vente de la bibliothèque de M. le baron Pichon.

Jehan Regnier, reçu bailli d'Auxerre en 1426, après avoir entrepris un long voyage dans la Grèce et dans la Palestine, s'était mis au service du duc de Bedfort, régent prétendu du royaume de France. Arrêté près de Rouen, par des coureurs du parti français, il fut conduit dans la citadelle de Beauvais, et là, tenu trèslongtemps dans une captivité rigoureuse. Le récit en vers, moitié sérieux, moitié plaisants, des fortunes et adversités de notre poète, forme la pièce principale de

ses œuvres.

L'auteur de la notice qui le concerne compare ce petit poème au touchant volume des prisons de Sylvio Pellico, qui passionna notre jeunesse. Et pourtant il est visible que, malgré les invocations dévotes qui se présentent souvent sous la plume de Regnier, le ton des deux auteurs, leur manière d'envisager la vie, diffèrent complètement. Qu'on en juge par le début de son récit, p. 382.

Après des citations assez nombreuses de vers plus que risqués, et qui ne rappellent que trop ceux de l'homonyme de l'auteur, Maturin Regnier, le satyrique célèbre, l'érudit, qui nous les fait connaître, conclut en affirmant que les poésies de Jehan Regnier sont curieuses à divers titres, mais surtout comme tableau des mœurs de son époque.

Le second des volumes dont je veux vous entretenir mérite infiniment plus d'attention, et par l'importance des morceaux qu'il contient, et par la confraternité bien plus intime qui unit notre Société à celle dont il

émane; j'entends parler du tome IVme des Mémoires de la Société d'Archéologie et de Littérature d'Avranches.

Le Mont-St-Michel, avec ses imposants souvenirs historiques, ses édifices grandioses, ses merveilleuses légendes, ne pouvait manquer d'occuper un rôle important dans ces études accomplies pour ainsi dire à l'ombre de ses murailles.

Nous trouvons d'abord, en ce qui le concerne une interprétation très-digne d'intérêt des fragments d'un poème en vieux français, composé probablement vers la fin du XIV° siècle, en l'honneur des miracles accomplis par l'intercession du glorieux Archange. Ces fragments, découverts à St-Lo dans le cartulaire d'une ancienne abbaye, sont dans la forme dramatique, et constituent des dialogues où l'on voit figurer tour à tour la foule des pèlerins, les moines de la sainte montagne, l'abbé du monastère, des hommes, des femmes, des enfants qui viennent solliciter la guérison de leurs maux. L'auteur de l'interprétation, qui nous touche de bien près, puisqu'il n'est autre que notre savant et aimé secrétaire, conjecture avec vraisemblance que ce drame naïf a dû plus d'une fois être représenté, pour l'édification des pèlerins, dans quelqu'une des vastes salles de l'antique abbaye.

Dans la suite du volume, un érudit normand justement apprécié, M. Le Héricher, a consacré près de cent pages à des renseignements historiques parfois neufs et curieux sur les événements que la célèbre montagne a vu s'accomplir. Il se plaît aussi à relater les témoignages nombreux d'admiration, tant en vers. qu'en prose, qui lui ont été décernés à diverses époques.

Laissons de côté quelques études, très-estimables

pourtant, sur les ruines d'anciens châteaux féodaux qui, jadis, en quelque sorte faisaient cortége au MontSt-Michel, en couronnant les bords de cette baie gracieuse, au fond de laquelle il dresse sa masse imposante. J'ai hâte d'arriver aux notices à la fois biographiques et littéraires concernant un assez grand nombre d'écrivains plus ou moins célèbres auxquels le pays d'Avranches a donné le jour.

Ici encore nous rencontrons notre zélé secrétaire, toujours fidèle au culte des souvenirs de sa patrie d'origine. M. de Beaurepaire a enrichi le volume que nous examinons de deux études de ce genre.

La première concerne un vénérable curé d'Avranches, mort presque centenaire dans les prisons de la Terreur, laissant après lui un nombre considérable de manuscrits qui racontent, au point de vue de l'intérêt local, les événements accomplis dans l'Avranchin, durant le dernier siècle à peu près tout entier.

La seconde se rapporte à un érudit du XVIIe siècle, que la ville de Caen, elle aussi, pourrait, ce semble, revendiquer pour elle, puisqu'il fut, avec Moysant de Brieux, l'un des fondateurs de notre Académie des sciences et belles-lettres, en 1652. Antoine de Garaby, sieur de La Luzerne, avait publié, tant à Caen qu'à Paris, quelques volumes de poésie sur des sujets variés. Le plus important d'entre eux, intitulé: Sentiments chrestiens, politiques et moraux, se compose de quatrains en vers français, toujours suivis d'une glose en prose, assez étendue, destinée à fixer plus fortement l'attention du lecteur, en développant le sens parfois mystérieux des vers. L'illustre évêque d'Avranches, Daniel Huet, qui a donné place à Garaby dans ses origines de Caen, reconnaît chez cet auteur un esprit

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