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rosse de M. l'Intendant, seul, avec le Monsieur qui l'avoit harangué. Les autres capucins montèrent dans les autres carrosses qui le suivoient tous.

Il arriva à Caen et lorsqu'il fust arrivé à la Porteau-Berger, on tira sept coups de canon de la citadelle; en cest estat, on alla jusques au couvent des Capucins, où il y avoit 300 bourgeois soubs les armes. avec leurs officiers et tous les tambours de la ville qui le reçurent en le saluant. Ils estoient en haye depuis la Visitation, jusques au couvent tous les carrosses suivirent jusques audit lieu. Lorsqu'il fust arrivé, on chanta, dans le Sancta Sanctorum, quelques antiennes; après quoy, il s'assit dans un fauteuil, du costé de l'Évangile, contre l'autel, où tous les religieux vinrent luy baiser le cachet qu'il tenoit à la main. Il se retira ensuite dans le couvent et, aussitôt, M. l'Intendant, accompagné de six carrosses nouveaux, remplis de personnes distinguées de la ville, vinrent le complimenter. Toutes les compagnies y allèrent le lendemain, par députations, avec les présents de quelquesunes. On luy donna le vin de la ville. Il a resté quelques jours à Caen, après quoy, il est party et. lorsqu'il sortit de la ville, on tira sept coups de canon de la citadelle, comme on avoit faict à son arrivée (1).

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(1) Reg. de l'Hôtel de Ville, C. 83, fo 36. « 19 mars 1714. Arrêté que la Compagnie ira demain saluer le R. P. Michel-Ange de Raguse, général des Capucins de toute la chrétienté, arrivé aujourd'hui dans cette ville et reçu au bruit du canon du château et au-devant duquel tous les carrosses de la ville avaient été.

<< M. Le Grand, premier échevin, l'a complimenté et ensuite le vin de la ville lui a été présenté. Une aumône extraordinaire a été faite aux Capucins, en ayant égard à leur pauvreté et au nombre de plus de 80 religieux qui se sont trouvés au couvent ».

Il sortit de la ville, monté sur une petite mulle fort propre, avec un cheval qui portoit un vallet et son petit esquipage. Il est accompagné de dix capucins à pied, qui ne le quittent poinct.

Aujourd'huy, 18 avril 1714, M. Charles Harel (1) a pris possession de la charge de conseiller au Présidial, que possédoit feu M. Godard de Bérigny. Il l'a levée aux parties casuelles.

Le 4 may 1714, Monseigneur le duc de Berry, troisiesme fils de Monsieur le Dauphin. frère de M. de Bourgoigne et du Roy d'Espagne, est mort à Versailles, au grand regret de la France; il avoit espousé, il y a environ deux ans, la fille de Monsieur le duc d'Orléans, laquelle est demeurée enceinte.

Le lundy, 21 may 1714, la première feste de la Pentecoste, on a publié la paix entre la France et l'Empereur, de la manière qui s'ensuit (2). Tous les tambours de la ville, deux trompettes et un timballier marchoient devant; après quoy suivoient les huissiers et sergents de la ville, avec leurs escharpes, à cheval; puis suivoit le corps de la ville, M. de Canchy, maire, en robe rouge, à la teste: ensuite, tous les eschevins les uns après les autres, sur une ligne, à la droite; le major et les officiers de la bourgeoisie, sur une mesme ligne, à la gauche, privilège qui leur avoit esté attribué par une déclaration du Roy et pour quoy ils ont payé finances. Sur les aisles, il y avoit quatre hoquetons de la ville. Tout estoit en fort bon ordre.

(1) Charles Harel était le gendre du sieur Augustin Bourdon, conseiller au Présidial. Il mourut en 1761, à l'âge de 72 ans. Il avait acheté la charge du sieur Godard de Bérigny, écuyer, mort en 1713.

(2) Reg. de l'Hôtel de Ville, C. 83, fo 41, vo.

Ils ont commencé à publier ladite paix dans le carrefour de Sainct-Pierre. Après quoy, ils furent dans le Chasteau, où on la publia au bruict du canon de la citadelle. Ensuite, ils furent faire la mesme chose à tous les carrefours de la ville, dans le mesme ordre. Sur les 5 heures après midy, on chanta le Te Deum dans l'église Sainct-Pierre, lieu ordinaire, où tous les corps de la ville et toutes les parroisses et couvents se trouvèrent. Après quoy, on alla mestre le feu au buscher, dans le carrefour, au bruict de la mousqueterie de la ville et du canon de la citadelle, qui fist tirer une descharge par trois fois différentes, chacune de 24 ou 25 pièces de canon.

Il n'y eust ny feux, ny illuminations dans la ville comme on avoit faict à la dernière paix, qui fust au mois de juin dernier, et ce, à cause de la mort de Monseigneur le duc de Berry. M. Guynet, intendant, estoit à la teste du Présidial, en robe rouge, suivant la

coustume.

Aujourd'huy, 18 juin 1714, Daniel Lemière, escuyer, sieur d'Allemagne, a esté reçeu en la charge de chevalier d'honneur du Présidial, suivant que ses provisions le portoient. Ses prédécesseurs avoient esté reçeus au Parlement. Il y a une dispense d'aage, n'estant aagé que de 20 ans et 9 mois il n'aura voix délibérative que lorsqu'il aura l'aage de 25 ans accomplis. Jacques Lemière, escuyer, sieur d'Allemagne, son frère, la possédoit pendant son vivant.

Le dimanche, 27 juin 1714, on fist l'ouverture de la cérémonie de la canonisation de sainct Félix de Cantalice, frère capucin, dans l'église des P. Capucins de ceste ville. M. de Camilly-Blouet, évesque de

Toul (1), en fist l'ouverture par un beau et poly discours. Le lundy et tout le reste de l'Octave, jusques au lundy au soir, 25, que s'en fist la closture par Monseigneur de Nesmond, évesque de Bayeux, il y eut exposition du Sainct-Sacrement et sermon l'aprèsmidy, ensuite la bénédiction. Toutes les parroisses et couvents de la ville prirent chacun leur jour. Les chanoines du Sainct-Sépulchre y furent le premier lundy et y chantèrent messe et vespres, et ainsy tous les autres jours durant l'Octave. Chaque parroisse ou couvent y restoit tout le jour et, pendant toute l'Octave, la musicque de Sainct-Pierre s'y rendoit au salut. Il y a eu une affluence de peuple furieuse et beaucoup de dévotion pour gaigner les indulgences.

Aujourd'huy, 11 novembre 1714, on a chanté un Te Deum dans l'église Sainct-Pierre, lieu accoustumé à ces sortes de cérémonies, en actions de grâces d'avoir réduit la ville de Barcelone, qui s'estoit rendue rebelle au Roy d'Espagne. M. de Berwick commandoit le siège, qui s'est beaucoup signalé, ainsy que toutes les troupes, ayant affaire à des gens qui se sont battus. comme des enragés. La ville a esté prise d'assaut; on leur a, cependant, donné la vie et on les a sauvés du

(1) La famille Blouet s'était divisée en deux branches, dont l'une portait le nom de Than et l'autre, celui de Camilly. L'évêque de Toul, dont il est question ici, illustra celle-ci. François Blouet de Camilly fut ensuite archevêque de Tours et mourut en 1723. Un autre de ses membres, M. Blouet, dit le chevalier de Camilly, servit avec distinction dans la marine, devint vice-amiral de France et mourut en 1753. Il a laissé un Journal de bord, qui a été publié, en 1902, par M. A. Gasté, dans les Mémoires de l'Académie nationale de Caen.

(2) Reg. de l'Hôtel de Ville, C. 83, fo 63.

pillage moyennant des sommes considérables. Après le Te Deum chanté, où tous les corps de la ville assistoient, on mist le feu au buscher, au bruict de la mousqueterie des bourgeois, qui estoient soubs les armes. On fist trois descharges, ainsy que les canons de la citadelle, au nombre de 28 pièces de canon.

Aujourd'huy, 22 décembre 1714, on a publié la paix générale entre la France, l'Empereur et tous les autres princes électeurs de l'Empire (1). La marche et la cérémonie se firent de la manière qui s'ensuit. Tous les tambours de la ville, avec 4 trompettes, 4 hautbois et un timballier marchoient en teste; après quoy, suivoient les 4 sergents de la ville et son huissier, habillés en la manière accoustumée, et, ensuite, les officiers de la ville. Suivoit M. de Canchy, maire, assisté du lieutenant maire, des eschevins, du major de la bourgeoisie, accompagnés des capitaines et lieutenants de ladite bourgeoisie, tous bien montés. On a faict une descharge de toute l'artillerie du Chasteau. Après quoy, ils furent, en bel ordre, dans tous les carrefours, faire la mesme publication. Ils avoient, autour des eschevins, quatre hocquetons avec leurs habits de cérémonie et leur hallebarde.

Le dimanche, 23 décembre 1714, on a chanté le Te Deum dans l'église Sainct-Pierre, en recognoissance de ceste paix générale. Tous les corps de la ville y assistèrent. M. Guynet, intendant, estoit à la teste du Présidial. M. de Loubère, lieutenant du Roy au Chasteau, au lieu et place de M. de la Croisette (2), y assis

(1) Reg. de l'Hôtel de Ville, C. 83, fos 67 à 73.

(2) M. de Loubert venait de remplacer M. de la Croisette, décédé quelques jours auparavant. Il arriva à Caen le 10 décembre.

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